vendredi 30 septembre 2016

marronniers


Vendredi 30 septembre, 17 heures, à la sortie de la Gare du Midi, une vingtaine de manifestants déploient deux banderoles fatiguées demandant le rapprochement des prisonniers basques de leur famille. Ils ont vieilli et ont maintenant l’âge de leurs revendications. Ils ne savent pas encore que la guerre est finie, que des prisonniers basques ont retrouvé la liberté après s’être engagés à ne plus recourir à la violence armée, comme Aurore Martin. Que d’autres prisonniers considèrent que l’accord du 12 janvier 2016, signé par 35 prisonniers basques, par le juge Garzon, par des associations de victimes, est une forme de repentance, et que eux, jamais ils ne signeraient un tel accord.

J’ai vieilli aussi et j’ai maintenant l’âge de mes colères. Je supporte mal la complicité avec la terreur qui a été celle de l’ETA stalino-marxiste pendant deux générations. Je m’approche et je leur dis, en parlant d’abord doucement, puis de plus en plus fort, je leur dis, si vous voulez vraiment la libération des prisonniers, vous devriez leur conseiller de signer l’accord du 12 janvier qui a permis la libération d’Aurore Martin et de 35 autres prisonniers. Ils me disent qu’Aurore Martin ne s’est jamais repentie, que ce n’est pas vrai, que je me taise, que je me barre, ils se fichent de mes arguments.

De leur combat, il ne reste que des revendications humanitaires, il faut rapprocher les prisonniers de leur famille parce que leur famille meurt sur les routes en allant leur rendre visite. D’un immense combat pour la libération du pays Basque, il reste une manifestation pour la sécurité routière. Ils voulaient libérer les sept provinces, en faire une république indépendante, socialiste, un Cuba enclavé entre Espagne et France, une république socialiste dont seraient chassés les ennemis du peuple basque et ils se satisfont d’une réforme territoriale décrétée par des élus municipaux dont la majorité ne veut entendre parler ni d’indépendance, ni même d’autonomie.

Le risque est malgré tout de maintenir un certain degré de violence qui est toujours la conséquence d’une territorialisation de la politique. Plus de territoire, moins d’état, et la violence augmente, comme l’ont montré les étiologues. Pour combattre ce risque, il faut affronter jour après jour les complices de la terreur.

Je les affronte, je leur dis que l’ETA doit remettre ses armes, sans attendre, qu’elle doit se dissoudre car un groupe d’hommes armés qui conserver son arsenal et continue de fonctionner comme groupe de terreur n’a pas de place dans une démocratie moderne. Ils m’insultent. Je leur dis que dix années auparavant, ils auraient eu le grand plaisir de me tirer une balle dans la tête et que je comprends leur frustration. Maintenant, il faut réfléchir et argumenter et en plus Aurore Martin qui leur file entre les doigts. Les temps sont durs. Mais moi, je lutte pour ma survie, vous comprenez ? Je veux vivre dans un pays où un immigré antinationaliste à le droit d’exercer tous ses droits, sans crainte d’agression, sans avoir besoin de gardes du corps.

 

 

jeudi 29 septembre 2016

je reviens


Au festival latino, un film, X Quinientos, suit l’itinéraire de trois migrants, en Colombie, au Mexique, à Montréal, de la campagne à la ville. Pour les trois, c’est une immense catastrophe. Les trois se retrouvent délinquants, dealers, criminels, drogués, à la dérive, exclus du système scolaire. La solution, c’est le retour au village, le retour à la terre. Le sens du film apparaît clairement : bouger, c’est la catastrophe, pour ceux qui bougent et pour le pays qui les accueille. Il faut rester sur place.

            Pour des millions de migrants, quitter le pays représente une sortie de la misère, une libération de traditions étouffantes, pour les pays d’accueil, ces millions de migrants ont été une chance de développement. Le film confirme les scénarios catastrophes des églises et des crispés-de-la-frontière, restez chez vous, ne venez pas chez nous. Il conforte ainsi la musique dominante. Que chacun reste au village. Les églises n’aiment pas l’exil. Elles savent que ces millions de gens qui émigrent vont quitter les croyances, vont se libérer des traditions qui sont des rapports de force. Ne partez pas, disait l’église catholique de Dublin vous allez devenir des prolétaires ou des petits bourgeois. Vous allez être saisis par la débauche, la prostitution, la délinquance. Ne partez pas dit Jon Mirande avec les mêmes mots. Restez au village. Ne partez pas, disent les noués du territoire.  Vous allez oublier la langue et les danses basques au profit de contorsions perverses.

            Ayant fait le tour des églises, des croyances et de la modernité, j’écoute les sirènes panthéistes, je retourne au pays. Je vais apprendre la langue basque, m’inscrire aux cours de danse. J’abandonne la drogue, l’alcool, le tabac, le stupre et les joies frelatées de la Goutte d'Or. Attendez-moi, je reviens.

lundi 26 septembre 2016

bonne nouvelle


Bonne nouvelle

        La ligne d’autobus va continuer à fonctionner entre le futur territoire basque et la commune de Tarnos.

        Le train qui relie Dublin et Belfast a toujours maintenu un lien entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord. Quand des livres étaient interdits à Dublin, il permettait de les acheter en Irlande du Nord. Les produits contraceptifs étaient interdits dans la république d’Irlande, mais en vente libre en Irlande du Nord. Les Irlandaises prenaient le train en groupe et revenaient à Dublin en montrant triomphalement les pilules interdites.  

        Avec l’évêque intégriste à Bayonne et les replis identitaires au pays Basque, le maintien de la ligne de bus EPCI-Seignanx est donc une garantie pour l’avenir. On n’est jamais trop prudent.

dimanche 25 septembre 2016

nos ancêtres les Basques


Nos ancêtres les Basques.

 

 

Mon grand-père est Limousin, mais je n’ai pas appris l’histoire du Limousin, ma mère est gasconne, mais je n’ai pas appris l’histoire du Béarn. Quand vous devenez basque, vous apprenez l’histoire du pays Basque, vous parlez la langue basque. Vous n’agitez pas le drapeau tricolore, mais l’ikurrina. Vous soutenez l’EPCI, qui correspond aux frontières sacrées du pays Basque. C’est cela l’assimilation.

 

Qui l’a dit ? Max Brisson ? Colette Capdevielle ?, Nicolas Sarkozy ? Sylviane Alaux ?

cesser-le-feu


Les FARC signent un accord de paix avec le gouvernement colombien. Au pays Basque, l’ETA a cessé le feu depuis octobre 2011 mais refuse de rendre les armes et de dissoudre.

Les combattants renoncent à la guerre civile quand ils sont épuisés et isolés. Leur difficulté est connue : quand une organisation armée terrorise, la terreur occupe tout le terrain politique. Quand la terreur cesse, les anciens combattants plongent dans l’oubli. Tout le monde connaissait l’ETA, qui connaît Bildu ? Tout le monde connaissait l’IRA, qui connaît le Sinn Féin ?  
       Quand on cesse de se battre sans avoir atteint les objectifs, cela se nomme une défaite. Comment la camoufler ? En continuant de célébrer l’héroïsme des combattants, en légitimant la terreur passée. C’est compliqué. Au pays Basque, les ikurrinas ont disparu des fenêtres, comme ont disparu les drapeaux tricolores à Belfast.

     Des milliers de morts pour quelques élus et des voitures de fonction, c’est très cher payé.

dimanche 18 septembre 2016

réfugiés


La défaite de 1940 amena les réfugiés vers la côte basque. « Ceux qui l’on appelle les réfugiés déambulent sur les routes, sans savoir où ils vont, ayant perdu leur personnalité, tout sens patriotique, toute dignité, toutes ressources…hantés, effrayés par la menace des bombardements aériens ». (cité dans Louis Poullenoy, Basses Pyrénées, Occupation, Libération).

        Ainsi décrivait-on dans la presse la vague des réfugiés. Heureusement, personne, aucune personnalité politique ou intellectuelle, aucune institution, ne donna la moindre légitimité aux craintes de la population.  C’est pourquoi la population locale s’est organisée pour aider les réfugiés à surmonter cette épreuve. L’accueil et l’esprit d’assistance efficaces, écrit l’auteur, ont facilité l’intégration des réfugiés.




nationalisme totalitaire


Criés par les socialistes abertzale ou les abertzale socialistes, par Batera et EHbai, par Enbata et Bildu, par les champions d’un établissement public pour la coopération intercommunale, par Colette Capdevielle ou Max Brisson, réunis sous la bannière basque, par tous les adorateurs des frontières sacrées, les avis sont unanimes :

Les élus qui ont engagé un recours contre l’EPCI doivent démissionner des commissions qui mettent en place l’EPCI.

Jamais les élus des intercommunalités existantes n’ont demandé la démission de ceux qui ont œuvré pour les détruire. Parce qu’ils sont démocrates et républicains.

Ainsi se révèle le caractère totalitaire d’une entreprise nationaliste sectaire, identitaire. Seuls les patriotes peuvent être citoyens, comme au temps de la Révolution française. Comme au temps de la Révolution bolchevique. Comme au temps de la Révolution nationale.

Quand les adversaires de l’EPCI pointaient l’absence de démocratie dans le projet intercommunal, on leur répondait vous allez voir, tout va se mettre en place dans les commissions, ne vous inquiétez pas.

Effectivement, tout se met en place.

mercredi 14 septembre 2016

union sacrée


Dans ces temps agités, les promesses électorales et les prévisions d’avenir ne se dégagent pas clairement. Les frontières entre droite et gauche se brouillent. Il y a plus de différence entre Merkel et Sarkozy qu’entre Hollande et Juppé. Pour dégager une voie, il faut déblayer, réfléchir. Les choix politiques sont plus compliqués. Les temps sont mûrs pour les démagogues qui offrent des impasses simples, dégagées, mais qui restent des impasses : Sortir de l’Europe, construire des murs, pratiquer la préférence nationale et chasser les étrangers.

À tous les échelons de la vie politique, les élus et les candidats sont à la peine. Pour les futures élections législatives, députés sortants ou candidats aspirants ne savent plus à quel saint se vouer. Hollande, Macron, Sarkozy, Juppé ? À défaut de convictions, on se raccroche aux évidences classiques. La terre ne ment pas, l’identité promet à ceux qui la partagent un avenir radieux. Engouffrons-nous.

Ainsi peut-on comprendre l’Union sacrée autour de frontières non moins sacrées du pays Basque, une union qui regroupe députées et sénatrices socialistes, abertzale historiques, les Verts, les Républicains. On n’avait pas vu ça depuis la Première Guerre mondiale. Tout le monde veut une reconnaissance institutionnelle du pays Basque. Les partisans de l’EPCI, bien sûr, mais aussi les opposants. Les signataires du recours contre l’EPCI sont une association qui veut « contribuer  la création d’une organisation institutionnelle pays Basque conforme à son identité et à sa réalité territoriale ». Les mêmes mots que les constructeurs de l’EPCI.

Si tout le monde est d’accord, où est le problème ?

Le problème, c’est que pour une partie des partisans de l’EPCI, cet établissement public n’est qu’une étape. Max Brisson réclame déjà un département. Pour les abertzale, le pays Basque continuera d’être un pays Basque mutilé car le vrai, le seul, l’authentique pays Basque est celui qui réunit les sept provinces. L’EPCI est une étape vers une future réunification.

Tous les partisans de l’EPCI ou d’un subutex identitaire justifient leur revendication par le territoire (les frontières sacrées), une culture, une langue. Or les frontières sacrées traversent les Pyrénées. La culture et la langue se tourneront vers la communauté autonome pour se développer.

Une fois l’EPCI en place, la minorité qui demande la réunification du pays Basque deviendra peu à peu une majorité. Elle sera écoutée et entendue par les Basques du Sud, dont ils sont les orphelins.

Phantasmes, folies ? Une fois le pays Basque français ficelé en paquet cadeau, il ne restera plus qu’à le cueillir.

mardi 13 septembre 2016

Taubira


« Cela a changé quelque chose d’avoir François Hollande  plutôt que Nicolas Sarkozy. La politique budgétaire, la lutte contre la pauvreté, la relation à la société, qui n’est plus basée sur la fragmentation délibérée, la division arrogante, la vulgarité dans la représentation du peuple…tout cela est différent depuis 2012. »



Christiane Taubira, libération, 12 septembre 2016.

lundi 12 septembre 2016

droit du sol


L’une des définitions de l’identité est celle du sol terminal. Non pas le droit du sol où l’on est né, l’adresse de la maternité, du taxi, où le nourrisson a vu le jour, mais le sol terminal, celui où l’on est enterré. Pour beaucoup, c’est le sol terminal et non pas le sol parturiente qui est déterminant. Quand on parle du droit du sol, il faut distinguer le sol de la naissance et le sol de la mort. Au lieu de poser en permanence la question d’où venez-vous, où êtes-vous né, quelle nationalité, posez la question : où souhaitez-vous être enterré ? Souhaiter. Il y a des gens qui ne souhaitent rien, qui disent, moi je prends la peine de mourir, aux autres de prendre la peine d’enterrer. Parce que si on s’occupe de mourir, plus de ce qui va se passer après la mort, on n’en finit jamais. Si on attend que tout soit préparé minutieusement, jamais on ne sera prêt à mourir. Chérie, on va être en retard au cimetière, tu es certaine que tu dois passer des heures à te pomponner ? Si les cils ne sont pas noircis, les lèvres rougies, les ongles vernis, les joues poudrées, tu crois que ça fera une différence ? Mais dans le cas où la personne a choisi, où elle assure que le lieu de crémation ou d’enterrement est important pour elle, à ce moment, je crois qu’il serait utile de prendre ce souhait comme droit du sol. Qui veut être enterré en France est français. Qui veut être enterré au Maroc est marocain, qui veut être enterré en Israël est israélien. C’est tout simple, non ? Moi, je veux être enterré au pays Basque, je suis basque. C’est ce qu’on appelle le droit du sol.

zimbabwe


J’écoute les infos. Reportage sur les lieux d’accueil du Secours populaire. Les infirmières des services d’urgence qui se suicident. Les exploitants agricoles qui demandent de l’argent à leurs parents pour acheter du pain. La police de Seine-Saint Denis qui n’y arrive plus. Les enseignants non plus.

L’état de Zimbabwe est en train de construire un mur pour repousser les réfugiés français qui demandent l’asile.

vendredi 9 septembre 2016

complicité


Sylviane Alaux, députée nationaliste et socialiste du pays Basque rejoint la coalition du Pays Basque Nord et proteste contre la décision qui rend Arnaldo Otegi inéligible. "Je trouve cela absolument scandaleux. Ce n'est même plus une affaire de justice, je considère que c'est une décision politique, et je la trouve de petite politique."

La députée n'hésite pas à voir dans le refus opposé par le tribunal constitutionnel "le refus de la démocratie" et le produit "de la rancune et de la vengeance" de l’État espagnol. "Or, aujourd'hui les sociétés basques, que ce soit du Nord ou du Sud, ont dépassé ce stade et se tournent vers un espace de paix" et ce grâce à la contribution de personnalités comme Arnaldo Otegi, souligne-t-elle.

Sylviane Alaux n’a jamais manifesté contre les assassinats de conseillers municipaux au pays Basque, jamais pris aucun contact avec les associations de victimes de l’ETA. Les prisonniers basques qui ont été libérés ont regretté la violence armée, se sont engagés à ne plus l’utiliser. Aurore Martin a ainsi été libérée. D’autres prisonniers basques ont condamné cette « repentance ». Sylviane Alaux est restée sur les positions des nationalistes basques les plus extrêmes, qui ne veulent pas entendre parler de repentance ou de regret pour les actes de terreur qu’ils ont commis pendant plus de trente ans.

Sylviane Alaux n’a pas protesté contre l’emprisonnement de Jean-Marc Rouillan qui refuse, comme Otegi de condamner la terreur. Si Rouillan avait assassiné des conseillers municipaux socialistes au pays Basque, elle aurait protesté contre son emprisonnement..


trois discours


Trois discours Hollande, Merkel, roi de Norvège.



Dans l’orthodoxie marxiste-léniniste, il n’y avait pas de différence de fond entre le système démocratique et le fascisme : ils étaient pour le capitalisme deux manières différentes d’être au pouvoir. La queue de cette comète continue de briller : pour les extrêmes de gauche et de droite, il n’y a pas de différence entre Hollande et Sarkozy, pas de différence entre Obama et Trump.

Dans le glissement qui m’a éloigné de l’orthodoxie révolutionnaire, je place la conscience émergente que s’il n’y avait pas de différence entre démocratie bourgeoise et fascisme, je préférais quand même la sortie de crise des années trente aux États-Unis avec le New Deal, en France avec le Front populaire,  que celle qui a prévalu en Allemagne et en Italie. Je préférais la manière dont le capitalisme était au pouvoir aux États-Unis et en France. Était-ce choix politique ou égoïsme ? Les deux sans doute.

J’ai écouté hier jeudi trois discours, celui de François Hollande sur la démocratie comme arme décisive contre la barbarie, celui d’Angela Merkel : nous continuerons à dire qu’une Europe de de cinq cents millions d’habitants peut et doit accueillir les millions de réfugiés. Et celui du roi de Norvège : la Norvège est composé de gens qui sont venus d’ailleurs, n’écoutez pas ceux qui recherchent les « vrais » Norvégiens.

M’éloignant encore davantage de l’orthodoxie révolutionnaire, je partage le monde où je vis en deux grandes tendances : d’un côté Sarkozy, Marine Le Pen, Orban, Farage, etc. et de l’autre le roi de Norvège, François Hollande, Angela Merkel, Barak Obama et Alain Juppé.


dimanche 4 septembre 2016

ecoles


École



Une amie institutrice me conseille la lecture du magazine Marianne qui comporte un dossier sur l’école.   Consternation. J’ai l’impression de me retrouver quarante ans en arrière, quand le débat faisait rage entre pédagogie et enseignement. Les mêmes phrases, les mêmes mots, les mêmes rancœurs rancies.

Le système scolaire français est l’un des moins performants des pays développés. Le système scolaire français est l’un des plus inégalitaires. Quand des politiques, des administrations, des associations, des établissements tentent de remédier à cette situation, les syndicats enseignants les plus corporatistes, les plus conservateurs, grondent, se mettent en grève. L’enseignement qui coûte le plus cher, celui des préparations aux grandes écoles, est une chasse gardée et quand un gouvernement, comme celui de Claude Allègre, a voulu toucher aux privilèges exorbitants des profs de prépas, ils étaient tous dehors, manifestants, pas très loin, remarquez, Place de la Sorbonne, à cent mètres à pied de Saint-Louis, Louis le Grand, Henri IV.

Ce système de concours et de grandes écoles, singulier à la France, seul un gouvernement socialiste l’a affronté. Contre les enseignants aussi, car  il représente le débouché naturel des enfants d’enseignants.

Qui a souhaité et pris des mesures pour rapprocher le système des universités et le système des grandes écoles ? Les socialistes. Tout doucement, par touches successives, en bravant les énervements des Grandes écoles. L’évolution se fait lentement. Un point pour les socialistes.

De l’autre côté du système, vers le bas, les socialistes ont pris des mesures financières (primes, et avantages pour la retraite) à ceux des enseignants qui choisissaient de rester dans les établissements difficiles et à former ainsi des équipes plus solides et plus efficaces.

Mettre au compte des socialistes les tentatives difficiles mais obstinées de redessiner la carte scolaire pour les écoles et collèges. Mettre à leur compte les 60 000 postes supplémentaires.

On pourrait mettre au compte de la politique socialiste les revalorisations successives. Les enseignants du primaire qui sont devenus prof des écoles et suivent la même carrière que les profs certifiés. L’augmentation du nombre des maîtres de conf et des profs dans les universités ainsi que des primes de recherche et d’encadrement de doctorants.

Sur les quarante dernières années, l’enseignement français a bougé lentement, mais dans le bon sens, vers plus d’enseignants, mieux payés, mieux formés, avec des réformes qui finiront par rétablir un peu, pas beaucoup mais un peu, d’égalité des chances.

Contre tous les obstacles. Les parents ne veulent pas de mixité. Les profs râlent quand on enlève des heures ou quand on en ajoute. L’école est peut-être le domaine où les pesanteurs sont les plus contraignantes. Malgré tout, on réforme, on avance.

Pendant ce temps-là, Marianne et tant d’autres dénoncent les pédagogues, regrettent les dictées, la grammaire. Le bon temps des blouses grises et du certificat.

vendredi 2 septembre 2016

millénarisme


Le millénarisme conçoit  l’avenir comme un bonheur radieux qui doit émerger d’une grande catastrophe. Ce mouvement moyenâgeux n’a jamais disparu de la politique et ses avatars nous sont familiers : révolutions nationales, fascismes rugissants, bolchevisme des lendemains qui chantent. Sous des formes différentes, le millénarisme nous tire dans les bas-fonds, vers la vacuité politique. Au lieu de participer à l’analyse des problèmes précis et de dégager des solutions, les millénaristes s’ébattent dans la fange pour mieux illuminer un avenir radieux. Jean-Luc Mélenchon va éliminer l’usurpateur et remettre le peuple au pouvoir. Marine Le Pen va purifier un pays corrompu par le cosmopolitisme et les étrangers. Nicolas Sarkozy va libérer les ambitions égoïstes. Tous les anciens et plus récents ministres clament que ce n’est pas eux, mais lui. Depuis la rentrée, l’étendard a été repris par un nouveau cavalier blanc.

Les grandes catastrophes je n’en veux pas. Les grands bouleversements, je n’en veux pas. Les grandes lamentations je n’en suis pas. Des solutions construites patiemment, je prends. Elles émergent rarement des jacqueries  ou dans la fièvre des meetings. 

fin de règne


Fin de règne.
  Ségolène Royal voulait interdire les boues rouges en Méditerranée,   mais Manuel Valls a donné l’autorisation. Étrange impression de fin de règne. Si la ministre de l’environnement n’a pas réussi à interdire les boues rouges, elle est co-responsable de la décision finale. Ça s’appelle solidarité gouvernementale. Donc cette déclaration ne peut avoir qu’un sens : plus tard, elle pourra dire «  j’étais contre les boues rouges ». Une attitude de fuite qui ne renforce pas le respect nécessaire dont nos responsables politiques ont pourtant besoin.

rappel


Nous sommes aujourd’hui dans l’époque de l’adaptation à la nouvelle donne de la mondialisation. « En Allemagne et en Suède, les sociaux-démocrates ont redressé leur économie, réformé leur État providence, tout en inventant de nouvelles formes de protection comme la flexisécurité qui cherche à concilier droits sociaux et meilleure fluidité du marché de l’emploi.  …les résultats obtenus dans ces deux pays ont de quoi rendre jaloux n’importe quel gouvernement. François Hollande s’est inscrit dans cette voie : redressement douloureux de l’économie grâce à une meilleure compétitivité, prise en compte de la contrainte écologique, réformes de l’état providence comme le compte personnel d’activité, le tiers payant, l’investissement dans l’éducation, le retour de la retraite à soixante ans pour les travailleurs ayant commencé  leur carrière très tôt. Cette politique se distingue très clairement de la voie libérale choisie par la grande majorité des nations concurrentes. Elle a maintenu la France dans le groupe des pays les moins inégalitaires du monde.

(Laurent Joffrin, rendant compte du livre d’Henri Weber, Éloge du compromis, chez Plon. Dans libération 1 septembre 16)