mercredi 28 février 2018

montoire


Montoire







Voici le communiqué de presse de Vincent Bru et Max Brisson (27 02 2018)



Après avoir rencontré les représentants des prisonniers basques, leurs familles et travaillé avec les associations les soutenant,



Nous avons souhaité ce matin à Saint-Sébastien rencontrer COVITE, la principale association de défense des victimes et de leurs familles.



Lors d’un échange avec Consuela Ordoñez et Rubén Mugica nous avons présenté le sens de notre démarche, sa recherche d’équilibre et d’impartialité, et écouté le point de vue de l’association COVITE dans le respect mutuel et dans le cadre d’un dialogue bienveillant.



Nous avons abordé devant nos interlocuteurs l’évolution du contexte politique, les conditions de détention des prisonniers basques dans les prisons françaises et leur rapprochement, la dissolution de l’ETA, la question de la reconnaissance des souffrances des victimes et de leurs familles.



Ils ont à leur tour regretté l’absence de repentir de l’ETA et les démonstrations ostentatoires lors des sorties de prison qui vont à l’encontre de la reconstruction du vivre ensemble.



Cette démarche auprès d’une association de victimes du terrorisme (curieux, le terme officiel disparaît) et ce communiqué méritent quelques remarques.



La démarche de nos deux élus est fondée sur « une recherche d’équilibre et d’impartialité. »



Ils ont donc évoqué les conditions de détention des prisonniers du Pays Basque, abordé la question de la dissolution de l’ETA (sans la demander), ont abordé la reconnaissance des souffrances des victimes (sans la solliciter).  Les victimes de l’ETA (qui savent de qui elles sont victimes) regrettent l’absence de repentir, mais Bru-Brisson ne regrettent rien, Les victimes regrettent les manifestations ostentatoires lors des sorties de prison, mais Bru-Brisson ne regrettent rien. D’ailleurs, Bru a trouvé les prisonniers « corrects » quand il a visité les cellules, mais il n’a pas repris le mot devant leurs victimes.



Voici donc la situation. Il faut s’en tenir aux faits, aux paroles. Des photos derrière une banderole « nous les voulons chez nous », mais pas un mot de sympathie pour les victimes de l’ETA. D’ailleurs, l’ETA a disparu du vocabulaire Bru-Brissonien.



Ces deux-là, on aurait dû les envoyer en Corse à la place de Macron. Ils auraient expliqué à la veuve du préfet qu’ils ont rencontré les prisonniers corses, dans une recherche d’équilibre et d’impartialité. Ils auraient abordé la question du rapprochement des prisonniers corses. Madame Erignac  a regretté l’absence de repentir. Elle a regretté les manifestations ostentatoires lors des sorties de prison. Bru-Brisson n’auraient rien dit.





Franchement, ça aurait eu de la gueule. La France stupéfaite aurait retenu son souffle.



Désormais, Bru-Brisson vont pouvoir dire qu’ils ont rencontré les victimes. Des mois de discussion, de dialogue, de manifestations avec les organisations de soutien aux prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée.  On manifeste, on se congratule, on regrette que les gouvernements français et espagnol ne répondent pas à leurs revendications. Une rencontre sèche avec les victimes du terrorisme où nos deux élus n’ont pas un mot de sympathie.

La honte.



Tout ça pour un plat de quelques lentilles électorales.

lundi 26 février 2018

des deux côtés


On voit bien les difficultés, je ne dis pas l’impossibilité, mais les difficultés pour un homme politique, élu ou responsable, de prendre position critique à l’égard de l’ETA. Dans l’histoire de l’organisation terroriste, il y eut le franquisme qui justifiait tous les combats, puis l’après-franquisme qui n’était pas la démocratie. Puis le GAL.

On a le droit de dire « il y a eu des victimes des deux côtés » et conserver les voix patriotes. Mais à demander que l’ETA se dissolve et qu’elle demande pardon, on perd les voix patriotes. Pour conserver les voix patriotes, il faut justifier le recours aux armes.

Alors, le GAL, les bourreaux, les tortionnaires. Ces faits sont avérés. Un grand nombre de responsables ont été arrêtés et jugés. Et condamnés. Jusqu’à un ministre. Et la différence, c’est qu’aucun mouvement, aucun parti, aucune association n’organise des manifestations de soutien pour les criminels du GAL, personne ne demande le rapprochement, personne n’organise de fête à leur sortie de prison, aucun parti n’a porté à sa tête des hommes ou des femmes condamnés pour activités terroristes d’etat. . Alors que les criminels de l’ETA sont fêtés, on demande amnistie, ils sont applaudis sur des estrades. Et les abertzale demandent à leurs victimes une seule chose : qu’elles se taisent.


La pression est si forte que peu d’élus résistent. Certains accompagnent, d’autres se taisent. Alors, il faut le dire bien fort, tout haut, bien distinctement : la publication du discours de Zapatero par Max Brisson doit être saluée comme un acte de courage, un acte de conviction républicaine. Un petit pas dans l’histoire de la démocratie, un grand pas dans l’histoire du Pays Basque.

dimanche 25 février 2018

appel à l'oraison


Appel à l’oraison



J’ai une idée. Ceux qui me lisent régulièrement connaissent mes convictions antinationalistes en général et en particulier au Pays Basque. Je combats avec mes moyens les dérives identitaires qui me semblent représenter un risque réel dans nos pays développés. Parmi mes lecteurs, une bonne dizaine font connaître leur accord avec mes idées et m’encouragent à poursuivre.

D’autres sont porteurs du virus identitaire et soutiennent le combat abertzale. Ils me considèrent comme un adversaire. C’est leur droit.

Je m’adresse très précisément à ceux qui partagent mes idées mais ne sont pas d’accord avec la manière dont je les exprime. Je ne suis pas pédagogue, dit l’une, je suis obsessionnel dit l’autre, Je ne veux rien comprendre, je ne veux pas discuter. Ou bien, je suis bien seul et est-ce bien de révéler ainsi ma solitude ? Tout ça finit par être ridicule. Tu ne devrais pas poursuivre ainsi. Je suis d’accord avec toi mais ce n’est pas le moment, ou pas comme ça ou pas comme ci. Je m’adresse à ceux qui se taisent en partageant mes idées, à ceux qui chuchotent parce que c’est clivant

Alors j’ai eu une idée. Je sais que dans cette dernière catégorie, la plupart diront, le jour de ma mort, que j’étais courageux, que je défendais mes idées avec conviction et ardeur, que je menais le bon combat, qu’il aurait fallu davantage m’écouter. Bref, des louanges post mortem.

Alors j’ai eu une idée. Je leur propose de rendre publiques leurs louanges pendant que je suis encore en vie et que sur mon cercueil, ils disent tous à quel point il était chiant ce mec, vous ne vous rendez pas compte, pas une réunion où il ne posait pas la question de l’ETA, des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée, des victimes. Ça le rendait dingue. Il était chiant de chez chiant.

Qu’en pensez-vous ?

étudiants et prisonniers


Une association accorde des bourses d’étude à des « étudiants du Pays Basque ». Je l’ai lu dans un post de Max Brisson.

Voilà qui est réconfortant. Pas des étudiants basques. Des étudiants du Pays Basque. Lycéens dans un établissement du Pays Basque. Peut-être breton, ou alsacien, français, anglais… ou basque.

Réconfortant, parce que Max Brisson, dans ses activités politiques, ne demande pas le droit commun pour des « prisonniers du Pays Basque » mais pour des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée.

Si l’association avait accordé des bourses d’étude à des étudiants basques, il y avait manifestement discrimination, insupportable.

Mais pour les prisonniers, Max Brisson cesse d’être républicain. Il demande des privilèges sur une base ethnique.

vendredi 23 février 2018

le fantôme d'Elseneur


Les populismes émergents s’inscrivent dans une histoire. Poutine se place dans les traces du Grand Staline. Les nationalismes basques et irlandais ont accouché dans la douleur du terrorisme. Les néo-nazis en Allemagne relèvent les drapeaux ensanglantés du nazisme. Les populistes  italiens redécouvrent les sillons du fascisme italien. Le populisme français n’en finit pas de rompre avec Vichy.

Cette histoire est fondatrice et encombrante. Chaque fois, pour triompher, les ancêtres doivent être lavés de leurs crimes. Le populisme est un révisionnisme généralisé. Pour assurer son emprise idéologique, Poutine doit effacer les crimes du stalinisme. Les historiens sont censurés, les archives détruites, les instituts de mémoire étouffés. En Pologne, des lois menacent la recherche historique sur la participation de Polonais au génocide. Les populistes français cherchent à réhabiliter le pouvoir de Vichy, à nier sa participation aux rafles des Juifs. En Allemagne, les élus du nouveau parti nazi ne se lèvent pas pendant la minute de silence de la journée de la déportation. En Corse, Talamoni est absent de la cérémonie en l’honneur du préfet Erignac assassiné. Les communistes français furent de grands dissimulateurs des crimes du communisme. Les révélations du goulag sonnèrent le glas de ceux qui avaient voulu le cacher. Au Pays Basque français, les populistes et leurs complices s’efforcent de faire disparaître les victimes de l’ETA. Le nombre 829 leur est odieux. Les noms de Blanco ou de Yoyès les empêchent de dormir. Le musée de la terreur les terrifie. Quand ils franchissent la frontière, ils s’arrêtent généralement au ventas ou aux galeries commerciales d’Irun car d’aller plus loin, ils risquent de rencontrer les enfants de Yoyès ou la veuve de Blanco.  

Tous ceux qui inlassablement rappellent les crimes de l’ETA doivent refuser avec indignation l’accusation de ne pas vouloir « refermer les plaies ». Ce n’est pas lubie, ce n’est pas obstination. L’histoire des crimes de l’ETA est un obstacle au populisme basque. Qui veut lui dégager la route doit fermer les cimetières.

C’est pourquoi il est si difficile de traîner les élus munichois du Pays Basque jusqu’aux victimes de l’ETA. Agiles et légers pour rendre visite aux assassins, ils pèsent un pottok mort pour  rencontrer leurs victimes. Pour faire accepter leur complicité, ils doivent dissiper les fantômes, enterrer une nouvelle fois les morts. Ils n’y arriveront pas. La société basque française les soutiendra peut-être mais pas  la société basque espagnole. C’est là le principal point de clivage entre le nord et le sud basque : au nord, amnésie, au sud, lieu de mémoire.

Le Roi du Danemark assassiné réapparaît comme fantôme à Elseneur et sa fonction est de dire à Hamlet : n’oublie pas, n’oublie pas.  Lady Macbeth ne réussit pas à nettoyer la tache de sang. Les élus complices du Pays Basque doivent se laver les mains en permanence pour effacer les tâches de sang. Ils n’y arrivent pas.

Ils n’y arriveront pas. L’œil est dans la tombe et les regarde.

la dernière goutte


Il serait présomptueux de notre part mettre la dissolution de l’ETA sur le compte de notre action. La dissolution de l’ETA est dûe d’abord au rejet des activités terroristes par la société basque espagnole. Elle est dûe aussi à l’efficacité des polices françaises et espagnoles et à leur coopération. À côté, évidemment, nos interventions sont si légères. Mais vous connaissez ce jeu qui consiste à noyer des pièces de monnaie dans un verre plein d’eau. La dernière pièce, celle qui fait déborder le vase, est parfois une minuscule pièce d’un centime.

la farce


L’équipe de rugby ETA a enterré son ballon en 2011. Qu’est-ce qu’une équipe de rugby sans ballon ? Pendant huit ans, elle a continué d’exister. Une équipe fantôme.

Il restait l’uniforme, des cagoules noires.

En 2017, elle a indiqué à des supporters enthousiastes le lieu où était enterré le ballon. Ce fut une belle cérémonie.

En 2018, par treize voix contre deux, elle a décidé de se dissoudre.

Aujourd’hui, c’est donc un fantôme de fantôme.



Des gens très sérieux, qui ont fait des études, qui sont des élus de la République, affirment tout aussi sérieusement qu’enterrer un ballon, puis le déterrer, porter une cagoule, puis l’enlever, sont des actes importants.

La cantatrice Marguerite était certaine de chanter juste jusqu’au jour où on lui a fait écouter un enregistrement.
Qui va faire écouter l’enregistrement de la farce à Bru, Brisson et Etechegarray ?

jeudi 22 février 2018

as-tu du coeur?


As-tu du cœur ?



            Le courage est un muscle qui a besoin d’exercice pour fonctionner. S’il n’est pas sollicité, il se ramollit, les fibres se détendent, les tissus se défont.

Voyez par exemple l’intervention du député Vincent Bru au cours d’une réunion de l’association Bascos sur la PMA. ‘Sud-Ouest, 20 février) ; Je donne cinq euros à qui me donnera une définition claire de la position du député sur cette question.

À essayer de plaire à tout le monde, à ne déplaire à personne, les fibres musculaires se relâchent.

Un groupe de Basques antipopulistes a interpellé le député Bru et le sénateur Brisson sur des questions simples. Seraient-ils d’accord pour demander que l’ETA se dissolve ? Pour exiger des etarras qu’ils demandent pardon ? Pour prendre  contact avec les associations de victimes du Pays Basque espagnol ?

Autant d’occasions d’exercices musculaires, autant de cycles d’appartement pour affermir les cuisses, autant de rameurs domestiques pour les abdominaux.

Le député Bru nous a reçus. Sur la dissolution de l’ETA et la demande de pardon, il n’a rien dit. Il s’est engagé à prendre contact avec les associations de victimes avec notre groupe de pacifistes non-munichois. Ensuite il nous a dit qu’il irait tout seul, sans notre groupe. Ensuite, il n’a plus rien dit. Les muscles se sont distendus.

Le sénateur Brisson nous a seulement promis de prendre contact avec les associations avec notre groupe. Il a pris rendez-vous pour préparer la visite. Puis a décommandé le rendez-vous, n’a plus rien annoncé, n’a plus rien dit. Les muscles se sont avachis.

Quand j’entends dire que le maire de Biarritz manque de courage parce qu’il ne veut pas affronter des Biarrots mécontents du plan de stationnement, excusez-moi, je rigole. Il les affronte tous les jours, dans la rue, dans les réseaux sociaux, dans la presse.

Alors qu’avec Bru et la PMA, Bru et Brisson et les associations de victimes, voilà des fuites exemplaires, des paniques débilitantes. Max Brisson contemple ce qu’il appelle le marigot biarrot. À côté de leur mollassonne défection,  je vois plutôt une salle de sport.

mercredi 21 février 2018

à quai


« Les personnes accompagnant un voyageur sont priées de descendre du train ». Les haut-parleurs hurlaient. J’accompagnais ma compagne qui était une voyageuse. Je m’apprêtais donc à descendre. J’étais moi aussi un voyageur que ma compagne accompagnait. Elle aussi devait donc descendre.

Disciplinés, nous avons obéi à la consigne.

Nous étions tous les deux des accompagnants. Nous avons quitté le train et nous sommes restés sur le quai.

Si le compagnon et la compagne d’un voyageur l’accompagnent,  la seule solution pour partir ensemble est que le voyageur descende, à ce moment, ni moi ni elle ne sont des accompagnants. Seul le voyageur reste à quai.

mardi 20 février 2018

ils se croient à l'abri


Ils se croient à l’abri.



Pourquoi les élus des partis républicains suivent-ils moutonnièrement les indications routières des nationalistes basques ? On comprend tout à fait la stratégie des abertzale. Réclamer un statut officiel pour la langue basque, conserver le territoire pour les résidents, demander le blanchiment de la terreur en transformant les prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée en victimes du conflit. Ils demandaient un département, on leur a donné une agglo. Pas à pas, ils grignotent, ils avancent, ils plantent leur drapeau. Mais pourquoi les élus de la République jettent-ils leur écharpe aux orties ? Hier députées socialistes, aujourd’hui Vincent Bru, Max Brisson, Jean-René Etchegarray, qui ne sont pas des nationalistes, pourquoi reprennent-ils en chœur les revendications identitaires, sur la langue, le territoire, les prisonniers ?

Une première explication est simplement électorale. Tous ceux qui ont été battus à peu de voix près sont convaincus qu’en agitant l’ikurina, ils pourront rattraper leur retard. Sylviane Alaux et Colette Capdevielle ont désormais tout leur temps pour réfléchir  à cette tactique. Une deuxième explication est plus noble. Ils sont réellement des défenseurs de l’identité basque, de la langue, de ses martyrs. J’ai plus de doute sur cette deuxième hypothèse. Je ne les vois pas se presser dans les cours de basque et si parfois ils s’inscrivent à une formation payée par les fonds publics, c’est plus pour le faire savoir que pour apprendre la langue.

Plus convaincante l’idée que la meilleure manière de combattre le nationalisme est de reprendre ses revendications et ses idées. Les Républicains ont tenté cette stratégie avec le FN. Ils lui ont ainsi donné la première place à droite. Si tous ces élus obtiennent le même résultat au Pays Basque, ils seront aussi sûrement éliminés que leurs collègues de Corse.

Cela, ils le savent mieux que moi, je ne leur apprends rien. Et pourtant, ils continuent de batifoler dans les plaines identitaires. Il reste alors une hypothèse. Ils se croient protégés par le pouvoir jacobin. Ils applaudissent Macron à Bastia et le sifflent à Bayonne. Macron les protège d’une dérive identitaire et populiste. Ils sont républicains à Paris, voyez mes ailes, et patriotes au Pays Basque, voyez mes poils.

En Hongrie, en Pologne, en Autriche, en Israël, la victoire des populismes est faite de ces misérables faiblesses, ces douloureuses couardises, ces inquiétantes soumissions. En d’autres temps, on disait un lâche soulagement.

lundi 19 février 2018

societé secrète


Le notaire de Bayonne ne décolère pas contre la machine identitaire mise en place avec l’EPCI, les pertes de temps, le gaspillage, un interprète basque payé parce que quatre conseillers le réclament, il croit qu’un interprète est payé quand c’est nécessaire, parce que des assistants ne comprennent pas la langue. Pas du tout. Inlassablement, dans les festivals, les vernissages, les inaugurations, les affichages, un interprète traduit du basque en français alors que tout le monde parle français et comprend le français. Chaque élu doit au moins apprendre à dire agur ou milesker. Et aupa pour le rugby.

J’étais venu pour une histoire de donation et me voilà en train de discuter des dérives identitaires au Pays Basque. Je vous jure que ce n’est pas moi qui ai commencé.

Chaque Basque (défini comme habitant le Pays Basque) est tellement persuadé que la vague nationaliste a tout emporté que s’il proteste contre la vague, il croit être tout seul et alors il hésite à donner une opinion discordante. Chacun se croit seul dans son coin. Mais si quelqu’un parle, émet une opinion contraire à l’abertzalisme ambiant, il rencontre toujours, c’est mon expérience, une autre personne qui partage son refus de l’ikurina.

Il faudrait un logo (genre « je suis un basque anti-abertzale) pour se reconnaître. Ou des gestes de la main comme les francs-maçons. Une épingle, une couleur, un slogan, un geste, un frémissement qui exprime le refus de l’enfermement du Pays Basque.

            Le concours est ouvert. Envoyez-moi vos propositions.

dimanche 18 février 2018

un artiste basque


Exposition Zigor,  Artiste basque. Il se présente comme sculpteur basque. S’il décide d’être un artiste basque, il en va de sa liberté absolue. Il est reconnu dans tout le Pays Basque comme un artiste basque. J’aime beaucoup ses sculptures, ses vagues en bronze, ses arbres en pierre, ses formes en bois. J’aime ses photos, ses peintures, ses esquisses qui précèdent la mise en forme.

Dans des parcs en plein air, j’ai vu les immenses sculptures de Henry Moore et de Barbara Hepworth. Ils se présentent, on les présente, comme des artistes modernes, internationaux. Ils sont bien entendu couverts d’honneur, de médaille, de commandes, mais jamais on ne les qualifie d’« artistes anglais », et encore moins d’artistes britanniques. Mais Zigor se présente comme « artiste basque », un adjectif qu’il ne peut pas expliquer, il faut se « sentir » basque, dit-il, laisser l’identité basque vous envahir le corps, tous les sens, quand il se promène dans la montagne ou va pécher dans les ruisseaux des Pyrénées.

Le jour du vernissage de cette remarquable exposition, les élus, les conseillers, l’entouraient de leurs sourires, de leur bienveillance. Je voyais Zigor de dos, sur fond de sourires. De ces sourires, j’étais en dehors. Ces sourires enfermaient l’artiste dans un minuscule bout de territoire. Alors que Zigor fait partie des grands artistes du monde, avec Henry Moore et Barbara Hepworth, un artiste international, moderne, et jamais je ne l’aurais présenté comme artiste basque, pas plus que Picasso comme artiste français ou Dali comme peintre catalan.

Quand Brigitte m’a présenté à Claude Olive, maire d’Anglet, il m’a serré la main, en souriant. Je lui ai dit mon nom et j’ai ajouté, je milite activement contre les dérives identitaires au Pays Basque. Il a continué de sourire.

qui déménage?


Déménager déchire. Vous participez à la vie politique, culturelle, affective, familiale, associative, urbaine, par mille fils ténus ou solides. Certains se tendent mais ne rompent point avec l’éloignement géographique. D’autres ne tiennent que par la proximité. Un simple changement de quartier, quelques stations de métro, provoque un bouleversement de vos cercles et de vos réseaux. Ce n’est pas pareil de toquer à la fenêtre pour une tasse de café et de téléphoner à un ami qui habite à quatre stations de métro, une demi-heure à pied, vingt minutes en autobus. La retraite vous arrache au réseau professionnel et on se revoit et on se téléphone, mais on ne se téléphone pas et on ne se revoit pas. Les relations les plus fortes résistent. La toile retisse des rapports disparus, mais il suffit d’une panne de réseau, d’un incident informatique pour que l’ombre d’une relation perdue et retrouvée se dissipe.

Si vous restez dans le même pays, les préoccupations proches disparaîtront, resteront les récits partagés : une élection présidentielle, un massacre incongru, des migrants et des scandales sexuels. Une poubelle qui déborde et pue à l’angle de la rue Richomme et de la rue des Poissonniers ne dérangera guère au-delà d’une cinquantaine de mètres et votre grand-père qui habite Biarritz qui se plaint d’un trottoir défoncé aura du mal à partager vos malheurs olfactifs. Les incidents locaux freinent les conversations.

Quand je discutais sécurité, mixité sociale, communautarisme, prière de rue, zone d’éducation prioritaire, à la Goutte d'Or, j’avais le sentiment peut-être erroné, d’évoquer des idées, des difficultés, des conflits qui pouvaient être compris bien au-delà du périmètre. Et aujourd’hui, dans la ville de Biarritz, dans le Pays Basque, j’ai le sentiment de vivre dans un pays étranger, où je peine à faire partager mes préoccupations à mes amis qui ne cohabitent pas et mes inquiétudes à mes amis proches.  

Je lis les activités des élus, Vincent Bru, modem et en marche, Max Brisson, sénateur. Max Brisson, sénateur de la nation, passe beaucoup de temps et d’énergie pour que la ville de Bayonne puisse utiliser une monnaie locale l’eusko, un eusko, un euro, une monnaie qui ne s’accepte que par un millier de Basques sur trois cent mille et qui paraît-il permet d’acheter local, comme si je n’achetais pas local un fromage de chèvre, du vin des Pyrénées, des piments d’Espelette, en les payant en euros. Vincent Bru, député de la nation, visite dans les prisons les prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée et demandent leur rapprochement de leur famille, sans dire un mot de leurs victimes. Les deux défendent l’officialisation de la langue basque alors que son enseignement est déjà largement subventionné par les fonds publics. Avant eux, les élus socialistes se comportaient comme des élus cantonaux, jamais un mot sur les problèmes nationaux ou internationaux, jamais un mot sur l’Europe. Elles se présentaient comme des «élues du territoire ». Leurs remplaçants suivent leurs traces. En échange d’un soutien national, accompagnez nos engagements indigènes.

Dans les frontières de l’hexagone, les clivages politiques portent sur les réformes du droit du travail, les nouvelles mesures éducatives, l’accueil des migrants, les relations avec l’Europe. Pas au Pays Basque. Ici règne l’unanimité sur la langue basque, sur l’eusko, sur le rapprochement des prisonniers et sur un communautarisme bruyant ou silencieux. On ne discute pas de l’identité, elle est naturelle. Essayez de parler tennis de table dans les gradins d’une finale de coupe, vous comprendrez. Le Pays Basque se divise en supporters et en touristes.

De ce fait de nature, de cette essence authentique, de ces politiques qui s’appuient sur les paysages et sur les troupeaux, on ne discute pas. Au conseil municipal, les tensions sont vives sur l’aménagement des plages, sur le stationnement, sur le financement de la cité de l’océan, sur le statut de palace de l’hôtel de l’impératrice. Mais sur le fait national, sur l’ancrage par la langue, le territoire, le  nom de famille, sur l’idée qui partout ailleurs serait nauséabonde que les logements doivent être réservés aux autochtones, on ne discute pas. On ne discute pas de la couleur du ciel, la beauté des enfants, la basquitude. L’identité coule dans le sang, n’est pas soumise  à raisonnement. Tu n’es pas basque parce que tu ne comprends ce que c’est d’être basque. Tu es basque si tu comprends ce que c’est d’être basque. Il ne suffit pas de parler la langue. Tu peux être chanteur, écrivain ou sculpteur basque, si tu n’éprouves pas ce sentiment qui monte de la terre basque, tu perds ta qualité de basque.



Le drapeau basque recouvre le pays comme une chape de plomb.

vendredi 16 février 2018

pragmatisme


Je n’aime pas beaucoup le terme « pragmatisme ». Ce qui différencie l’être humain des animaux, c’est qu’il inscrit ses actions dans une certaine vision du monde. Le travail, les loisirs, les voyages, ne sont jamais pragmatiques, ils sont porteurs d’un imaginaire. La porte ainsi ouverte est- elle assez enfoncée ?

Est-il possible de prendre des mesures « pragmatiques » sur les migrations ? Bien sûr que non. Toutes les mesures prises sont d’abord politiques, accueil, ouverture, fermeture, mobilisation des bonnes volontés ou mobilisation des peurs égoïstes.

Tout ce qui se fait à Biarritz, ou ce qui ne se fait pas, n’est jamais « pragmatique ». Tout le monde a oublié les professions de foi des candidats et elles sont effectivement oubliables. Mais elles traînent peut-être dans une corbeille. Les listes de droite étaient vent debout contre la construction de logements sociaux, pour armer la police municipale contre l’insécurité de la Grande Plage. C’était la conception de Biarritz comme un ghetto de luxe. Surtout pas de mixité sociale. Cette conception a été battue. Aujourd’hui, dans la confusion qui s’est installée au sein de la majorité municipale, on distingue mal les visions d’ensemble. On parle beaucoup de pragmatisme, de démocratie locale, de concertation. Mais toutes ces pratiques sont d’abord politiques, c'est à dire au service d’une vision de la ville de Biarritz.

Les abertzale ont une vision claire de l’avenir. Le Pays Basque n’est pas à vendre. La population de la côté a perdu son âme. Il faut que les fortunes dilapidées servent à protéger les productions paysannes authentiques, à construire des écoles bascophones. Le soir, au coin du feu, les etarras aux cheveux blancs raconteront leurs exploits en basque à leurs petits-enfants qui prépareront ainsi l’oral des concours administratifs.

Les autres forces politiques qui ne veulent se fâcher avec personne reprennent les refrains patriotiques en mineur. Il faut financer la langue, rapprocher les héros des luttes indépendantistes, mais développer le tourisme qui est la première industrie de la ville. Ça bafouille et ça cafouille.

Pourtant nombre de Biarrots ont une vision ouverte de leur ville. Celle d’une ville touristique où les établissements de luxe tirent l’ensemble vers le haut. Une ville où les habitants pourront se loger pas trop loin des plages et de leur lieu de travail grâce au respect de la SRU. Une ville où des établissements dédiés accueilleront les accidentés de la vie, natifs ou étrangers. Une ville qui refuse les dérives intégristes de Mgr Aillet. Une ville où toute l’année, des activités diverses, des conférences, des festivals, des séminaires, maintiendront la vie culturelle de haut niveau. Une ville où ni la langue ni la culture ne seront pas des moyens d’exclusion, mais au contraire des ouvertures au monde.

mercredi 14 février 2018

métaphore


Quand Charles Pietri dit que désormais « la balle est dans le camp de l’état », il veut dire que le projectile est dans la tête du préfet.

eusko, euro, écu


Daniel Junquas signale un article du monde sur l’eusko et l’utilise pour qualifier mes combats contre les crispations identitaires de combats d’arrière-garde. Trois mille personnes utilisent l’eusko et franchement je trouve ça très bien. Quand j’étais très jeune, on jouait à l’épicier dans la cour de récréation et on échangeait une monnaie fictive qui nous donnait l’impression de participer au monde des grands.



Mais trois mille, ça fait un pour cent de la population du Pays Basque français et les agriculteurs, éleveurs, entrepreneurs, ont du mal à écouler leur monnaie ludique.



Je rappelle que les etarras n’acceptaient le paiement de l’impôt révolutionnaire en euros et jamais en euskos.



Si je comprends bien Daniel Junquas, les Britanniques qui ont voulu conserver leur livre sterling, Marine Le Pen qui bafouillait sur l’écu, mènent des combats d’avant-garde.


Donc si je mène des combats d’arrière-garde, je laisse volontiers Daniel Junquas avec ses amis avant-gardistes.

préalable


Qui intervient sur les réformes scolaires sans commencer par la phrase suivante : « le système scolaire français est l’un des plus inégalitaires, les plus discriminants, les plus injustes, de tous les pays développés »

Ne mérite pas d’être entendu.

lundi 12 février 2018

guérisons


D’après notre enquête d’opinion, sur vingt-trois millions de pélerins qui ont fréquenté notre chaîne d’établissements guérisseurs, douze se sont senties mieux après leur séjour.

une longue minute de silence


Max Brisson, Vincent Bru et Jean-René Etchegaray ont silencieusement annoncé qu’ils iraient prendre contact avec les associations de victimes du Pays Basque espagnol. Il n’y a pas d’association de victimes au Pays Basque français. Il y a juste des démineurs et des visiteurs de prison. Les morts sont outre-Pyrénées.

Vous ne les avez pas entendus ? Tendez l’oreille. Ils ne le disent pas très fort. Mais Vincent Bru l’a dit dans sa permanence à trois personnes. Et Max Brisson l’a dit dans le jardin public, devant cinq ou six témoins. Quand même, vous ne pouvez pas dire qu’ils ne communiquent pas, ces deux-là. Ils communiquent.

Ils pourraient annoncer leur action, ces trois-là, qui ont tellement communiqué sur les visites aux assassins de l’ETA, qui ont réclamé le retour à la maison des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée, sur le parvis de la Gare Montparnasse.

Ils restent discrets et personne ne peut parler à leur place. Ce qui suit est du domaine des hypothèses. L’hypothèse la plus probable est que les associations ne sont pas trop pressées de les recevoir. Les victimes de l’ETA (les morts sont de notre côté, dit le Lehendakari) veulent bien dialoguer avec des etarras repentis, qui demandent pardon, qui regrettent les crimes de l’ETA.

Mais recevoir des élus qui n’ont jamais été manifesté pour la paix au Pays Basque espagnol, et qui ne demandent pas aujourd’hui la dissolution de l’ETA, qui négocient le désarmement avec les terroristes, qui ne demandent pas que les criminels demandent pardon, c’est un peu compliqué.

Vous imaginez les trois élus de la République aller voir les associations de victimes et leur annoncer qu’ils œuvrent pour que les assassins de l’ETA disposent de privilèges refusés aux prisonniers de droit commun ? Comme si tuer un gardien de prison, un journaliste ou un conseiller municipal donnait des droits particuliers.

Si ces trois élus annonçaient publiquement, fièrement, à haute voix, qu’ils demandent à l’ETA de se dissoudre. Qu’ils demandent aux etarras de demander pardon, ils seraient peut-être accueillis avec plus de chaleur. Mais qu’ont-ils à dire aux associations de victimes ? Ils vont leur parler des douleurs des familles qui passent la nuit dans le train ? Ils risquent d’être froidement reçus.

Ils auraient pu emmener avec eux des citoyens qui demandent la dissolution, qui exigent le pardon, ça aurait pu aider. Mais ils se sont débarrassés d’eux. Non, pas avec vous, ça risquerait de nous fâcher avec les abertzale et nous avons besoin de leurs voix aux prochaines élections.

Ils se réunissent, tous les trois. Comment faire ? Il y a un mémorial de la terreur qui va être inauguré à Vitoria au mois de mars. Ils pourraient tous les trois aller devant ce musée. À trois ou quatre heures du matin. Dans une voiture aux fenêtres teintées. Ils seront devant le mémorial. Ils chuchotent. Ils lisent la plaque. Puis le silence.  Nous, on ne mégote pas, certains observent une minute de silence pour les victimes, nous ce sont des années.


dimanche 11 février 2018

ils sont corrects


4 oct 2011 Courrier international, (article publié par el pais)

            Les anciens etarras détenus qui ont pris leur distance avec l’ETA sont regroupés à la prison de Nanclares. Une partie d’entre eux ont demandé pardon à leurs victimes et ont souhaité les rencontrer. Condition sine qua non de la médiation : le criminel doit avoir pris conscience du tort qu’il a fait – dans le cas contraire, elle n’a pas de sens.

            Dans un colloque de l’université de Pau-Bayonne sur les commissions vérité réconciliation (janvier 2018), l’épouse d’un homme assassiné par l’ETA raconte qu’elle a rencontré l’assassin. Elle dit qu’il a demandé pardon, qu’il demande à l’ETA de se dissoudre. Autrement, la rencontre n’aurait pas pu avoir lieu.

Certains prisonniers ont refusé cette rencontre parce qu’ils craignaient des représailles contre leur famille. D’autres persistaient à justifier leur participation à des actions terroristes. Les victimes ne souhaitaient pas les rencontrer. Il en restait six. La rencontre est restée confidentielle.

Vincent Bru, Jean-René Etchegaray, Max Brisson, sont allés visiter des prisonniers qui n’ont pas demandé pardon à leurs victimes. Qui n’ont aucune conscience des souffrances qu’ils ont provoquées. Et s’ils en ont conscience, continuent de justifier leurs actions terroristes. Qui ne demandent pas la dissolution de leur organisation. En sortant, de la prison, ils ont dit que les prisonniers étaient « corrects ».

Si le préfet Erignac avait été abattu au Pays Basque français, Vincent Bru, Jean-René Etchegaray et Max Brisson aurait visité Colonna dans sa prison et à la sortie, aurait déclaré qu’il était « correct ».

demander pardon


Demander pardon



Dans la vie courante, je vous demande pardon signifie que j’ai commis un acte que je regrette, que je ne referais pas. C’est pourquoi il est si difficile pour l’ETA de demander pardon. Demander pardon, c’est se repentir, dire que le maintien dans la terreur de la société basque pendant si longtemps était une grave erreur.

C’est pourquoi tous ceux qui pensent que la terreur de l’ETA ne fut pas une grave erreur ne la prient pas non plus de demander pardon. Et tous ceux qui pensent le contraire expriment une opinion claire en réclamant le pardon de la part de l’ETA.

Je comprends moins bien les personnes opposées au terrorisme qui hésitent à faire pression sur l’ETA pour qu’elle demande pardon. Elles ont du mal à condamner ce terrorisme-là. Elles n’hésitent pas à condamner des terrorismes lointains, mais celui-ci, elles ont du mal.

La tendresse de la société basque française pour le terrorisme basque est inquiétante pour l’avenir. Vous me pardonnerez d’être insistant, dans la bataille d’idées qui ne cesse pas, dans le combat contre les monstres, il n’y a pas trois côtés. Impossible de garder l’équilibre sur le mur qui sépare barbarie et démocratie. Il n’y a pas trois côtés aux barricades. Il faut choisir. On peut ne pas choisir en fermant les yeux et en se bouchant les oreilles. Mais si vous ne dormez pas, vous ne pouvez pas vivre dans l’ambiguïté.

Regardez le monde autour de vous : partout où monte une marée brune, elle se manifeste par une tendresse envers les barbares nationaux, un refus de juger les monstres, une censure à l’égard des historiens et des centres de mémoire.

vendredi 9 février 2018

confusions


En réponse à ma persistante question sur l’oubli des victimes de l’ETA, FX Menou, le suppléant de Vincent Bru, m’envoie ce texte de Brisson, qui est un appel à manifester le 9 décembre dernier. (Huffington Post, 23 novembre 2017)

Ce texte confirme le refus de mener la bataille des idées contre l’abertzalisme. Sont mis dans le même sac des « souffrances » du Pays Basque les attentats terroristes de l’ETA, les actions criminelles des groupes paramilitaires, la guérilla urbaine et la répression policière. 850 victimes, des procès, des prisonniers. Pas sûr que Madame Erignac aurait apprécié un tel signe d’égalité entre les assassins de son mari et la police qui les a arrêtés. Pas sûr que le mari de Yoyès aurait apprécié que soient regroupés dans la même réprobation le tueur de Yoyès et les gardiens de prison. La soumission à l’adversaire se poursuit avec la reprise mot pour mot de ses éléments de langage. En 2011, l’ETA a déclaré unilatéralement la fin de la violence armée. Et depuis cette déclaration unilatérale, en face, ils n’ont rien fait. Que voulait donc l’ETA, un traité de paix entre d’une part les États français et espagnols. ? Quand une organisation terroriste cesse le feu, ce n’est jamais à la suite de décisions « bilatérales » qui mettraient sur le même plan une société démocratique et une bande armée.

L’ETA poursuit. Nous avons cessé le feu. Il faut régler maintenant la question des prisonniers. Non, excusez-moi, c’est Brisson qui parle : « le sort des détenus cristallise toutes les attentes ». La France doit montrer l’exemple, c’est un préalable. La question des prisonniers reste celle qui fait se perpétuer les ressentiments et parfois les haines des mères ou des enfants.

Max Brisson parle effectivement des victimes. De toutes les victimes. Assassins et cibles civiles. Prisonniers et policiers. Djihadistes et spectateurs du Bataclan. Il ajoute : c’est un préalable. Il ne dit pas que la dissolution de l’ETA est un préalable. Il ne dit pas que le pardon demandé est un préalable. Il dit que le sort des prisonniers « cristallise toutes les attentes » et c’est pourquoi il se prépare à aller manifester le 9 décembre derrière la banderole « nous les voulons à la maison ». C’est le maintien en prison des assassins qui perpétue les ressentiments. Pas le refus de demander pardon, pas le refus de se dissoudre.

Les familles de Miguel Angel Blanco et de Yoyès demandent elles aussi, en vain, le retour à la maison. Max Brisson entend l’ETA, il est sourd à ses victimes.

FX Menou m’avait promis un texte de Vincent Bru sur la question des victimes, mais il ne l’a pas encore trouvé. Si c’est la même veine, il peut arrêter de chercher. Ceux qui n’entendent que les bourreaux, ceux qui ne distinguent pas prisons et cimetières, ceux qui parlent de prisonniers politiques pour des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée, je les trouve directement sur le site des abertzale.

pas chez moi


Avec l’aide de militants en colère, des groupes de migrants ont investi des salles de l’université Paris VIII (Vincennes-Saint-Denis). Cette occupation a reçu l’appui enthousiaste d’intellectuels en pétition.

Ce n’est pas la première fois, dans la longue histoire de l’université, que des révolutionnaires de la rive gauche  utilisent ses locaux comme terrain de récréation. Il y eut les vendeurs à la sauvette, les balayeurs, les vendeurs de drogue…

Ils choisissent dans une grande générosité altermondialiste l’université qui travaille dans un territoire difficile, défavorisé, une université qui depuis sa création aide les étudiants de milieu modeste, les remet à flot, les tire vers le haut.

Les révoltés de la rive gauche ne choisissent jamais comme terrain de jeu les grands lycées parisiens, ni les grandes écoles, ni Dauphine ni Sciences Po. Ces intellectuels qui placent tous leurs enfants dans les classes prépas demandent à la direction de Paris 8 de ne pas expulser les réfugiés. Ils demandent aux étudiants de Seine-Saint-Denis de laisser leur place aux migrants pour mieux protéger les carrières des enfants de signataires. Pour éviter que les étudiants de Paris VIII ne viennent concurrencer leurs héritiers.


Maurice Goldring, professeur émérite (université Paris VIII)

jeudi 8 février 2018

le silence sur les victimes est un crime


Qui ne sait pas que Vincent Bru, Max Brisson et Jean-René Etchegarray étaient le 9 décembre 2017 derrière une banderole « Nous les voulons à la maison ». « Les », c’est les prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée.  Au dernier sondage : 4,5%. C’est que tous les jours, ils appelaient à la manifestation, ils déclaraient, ils répondaient, ils conférencedepressaient, ils tweetaient, ils facebookaient, ils selfisaient. Ils visitaient les prisons, ils envoyaient des messages publics à la Chancellerie. La parole est au gouvernement français, disaient-ils. Les abertzale et les associations de prisonniers leur déroulaient un tapis rouge.

Qui sait que les mêmes élus préparent une délégation auprès des associations de victimes de l’ETA ? O,1% ; au dernier sondage. C’est que sur ce sujet, c’est motus et bouche cousue, c’est annoncé un soir d’hiver, après le coucher du soleil, après vérification qu’aucun micro, qu’aucun appareil de photo, n’est présent. Comme un secret.

Ils sont si discrets que mêmes les associations de victimes de l’ETA ne sont pas au courant.

mercredi 7 février 2018

le grand écart


Les yeux dans les yeux : Vincent Bru et Max Brisson : nous irons avec toi, Maurice, et tes amis, les yeux dans les yeux, rencontrer les associations de victimes. Mais comment rencontrer les associations de victimes sans se fâcher avec les abertzale ? Comment rendre publics des entretiens avec des républicains militants sans se fâcher avec des patriotes qui honnissent la République ?

Vincent Bru fait partie de la majorité présidentielle. Nationalement, il accompagne le président en Corse avec Madame Erignac et localement, il promet le ciel et les étoiles aux prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée.  Max Brisson fait partie d’un parti LR, « les républicains » dirigé par un républicain intransigeant. Nationalement, il fustige les atteintes à la République et les complices des terroristes. Localement, il demande le rapprochement des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée et dialogue avec une organisation  terroriste.

Comment maintenir ce grand écart entre gazouillis local et cocorico national ? C’est tout simple. Localement, ils manifestent avec les amis de l’ETA, se font photographier à la porte des prisons, décrivent les assassins comme des gens « corrects », reprennent sans changer un mot le catéchisme abertzale. Ensuite, ils échangeront leurs escarpins contre des chaussons, porteront un costume sombre, conduiront un véhicule tous feux éteints, et iront chuchoter quelques paroles à Vittoria. Le minimum vital qui leur permettra de dire à Laurent Wauquier et Emmanuel Macron qu’ils n’ont pas oublié les victimes.

courage et soumission


Quand Emmanuel Macron se rend en Corse, le drapeau français est partout. Quand Vincent Bru et Max Brisson manifestent pour les prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée, ils ne portent pas leur écharpe d’élus de la république.

C’est la différence entre courage et soumission.

Quand Emmanuel Macron se rend en Corse, il invite à parler la veuve du préfet Erignac. Quand Vincent Bru et Max Brisson dialoguent, ils parlent aux assassins et oublient les victimes.

C’est la différence entre courage et soumission.

lundi 5 février 2018

victimes: impunité?


La dernière séance d’un colloque sur les commissions vérité et réconciliation de l’université de Pau-Bayonne comportait une table ronde de témoignages des victimes. Quatre victimes : une victime de torture pendant le franquisme, une femme dont le frère a été assassiné par le GAL, une femme dont le mari fut assassiné par l’ETA, et une femme dont les grands parents ont été assassinés par les phalangistes. Quand la victime du franquisme et du phalangisme puis du GAL parlait, les trois autres la regardaient avec sympathie. Quand la victime de l’ETA prit la parole, les deux victimes du franquisme la regardèrent avec sympathie. La victime dont le frère fut assassiné par le GAL n’eut pas un regard pour elle. Elle détournait les yeux.

Ainsi se dessinait une topologie des victimes. Il y a les bonnes victimes et les mauvaises. En 1945, les bonnes victimes sortaient des camps nazis, puis quelques années plus tard, il y eut de rares rescapés des camps staliniens. Ils furent considérés comme de très mauvaises victimes par les révolutionnaires marxistes. Quand elles parlaient, ils ne les écoutaient pas, comme la sœur victime du GAL ne regardait la veuve victime de l’ETA. Les victimes du franquisme, des phalangistes, du GAL, de la police française ou espagnole, sont des victimes des méchants, des fachos, des impérialistes. Elles méritent respect. Mais les victimes d’une organisation révolutionnaire, marxiste, socialiste, anti-impérialistes, libérateurs, ne peuvent être que des victimes ambiguës. D’ailleurs, elles sont utilisées par les forces réactionnaires espagnoles pour dénigrer le combat glorieux des patriotes basques. La preuve, vous vous rendez compte : la seule victime à parler vérité et réconciliation fut la victime de l’ETA ; Elle a rencontré des etarras, en Espagne, en Irlande, au centre de Glencree. Elle dit que la rencontre est possible si les assassins demandent pardon, s’ils disent « nous avons assassiné et nous le regrettons ». Sinon, la discussion est difficile. Or, les etarras qui s’excusent, qui demandent pardon, sont considérés comme des traîtres par leurs camarades de combat. Elle a rencontré l’assassin de son mari. Il a demandé pardon. Il s’est repenti. Et la veuve victime dit : il faut redonner une seconde chance à l’assassin de mon mari.

À la sortie d’un conflit, la question des victimes et des bourreaux est une question politique majeure. Les soi-disant artisans de la paix accordent amnistie et impunité aux prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée.  Ils déterrent les armes mais jamais les charniers.

La veuve dont le mari avait été assassiné par l’ETA n’était pas artisan de la paix. Elle dessinait un lendemain de conflit de liberté et de tolérance.


dimanche 4 février 2018

david et goliath


David et Goliath.

Les vagues de l’histoire et du hasard, du collectif et de l’individuel, en se retirant, m’ont abandonné sur une plage du Pays Basque. Dans un pays où la crue du nationalisme monte irrésistiblement. C’est un pays fort agréable, la mer, le soleil et la pluie, les festivals et la musique, les couchers de soleil. Il fait bon y vivre et s’y promener à condition de rester touriste. Étranger. Je ne supporte pas d’être touriste et d’être étranger. Je n’aime pas les vacances à cause de ce sentiment de vacuité extrême. Les hommes et habitations réduits à la situation de décor pour photos souvenirs.

Donc j’interviens. J’écris, je parle, j’organise des réunions, je lève le bras dans des meetings, et quand on me répond que je suis un étranger, je répète que je suis basque parce que telle est ma décision et que ceux qui me désignent comme non-basque révèlent par leur insulte leur soutien à un nationalisme d’exclusion.

Je ne fais qu’appliquer ici une prise de position qui m’est chère, qui m’est indispensable pour vivre. Le minoritaire éclairé. Le bonze qui s’immole  parce que les flammes de l’essence sont le dernier argument. Le suicide de Walter Benjamin ou de Stefan Zweig, mais quand ils se sont suicidés, ils étaient des écrivains connus, si je me suicidais, et je ne vous cache pas que l’idée m’a effleuré, un suicide comme arme contre les intégristes religieux ou nationaliste, étant donné ma notoriété limité, les effets seraient minimes. Une autre solution serait l’exil, comme James Joyce contre les crispations irlandaises, ou Romain Rolland contre la folie guerrière. Mais je me retrouve alors dans la même difficulté. D’une part, si je m’exilais, à Dublin ou à Trieste, je n’ai pas l’impression que la nouvelle frapperait beaucoup d’esprits. Et puis, déménager à mon âge…

J’ai souvent regretté les situations extrêmes. Un mot de travers, une parole interdite et l’auteur se retrouvait en prison ou parfois même fusillé. Souvent même pour rien du tout. Là, j’aurais été dans la liste des victimes du nazisme ou du stalinisme. Tout ça c’est terminé. Les œuvres sont censurés, les auteurs  hurlent, mais le sang ne coule pas. J’aurais rêvé rétrospectivement d’avoir été abattu par un commando de l’IRA quand j’écrivais des livres sur l’Irlande, ou par un commando de l’ETA quand j’écrivais sur la terreur basque. Malheureusement, comme je suis athée, que je ne crois pas à la survie après la mort, je ne n’aurais pas pu assister à ma gloire éphémère, aux discours éplorés. Quant à recevoir une balle dans le genou pour quelques exemplaires vendus de plus, j’hésite.

De là à jouir de ma solitude politique, il n’y a qu’un pas. Vite franchi. Il faut être logique. Il faut être conséquent. Je ne peux pas à la fois jouir de ma solitude politique et reprocher aux autres de ne pas s’engager. Certains, dont je ne suis pas, dénoncent la passivité des masses, le renoncement. Si j’arrivais à entraîner trop de gens dans mon combat, je ne serais plus seul et ce serait une catastrophe.

Quand on m’applaudit dans une réunion, je me demande quelle bêtise j’ai pu dire. Quand on me siffle, je retrouve mon calme. Ce plaisir que j’ai d’être minoritaire, par définition, ne peut pas être partagé. Si  trop de personnes me soutiennent, je perds le plaisir de l’ermite. J’oubliais, mon second prénom est David.

vendredi 2 février 2018

contre la tyrannie


Timothy Snyder, de la tyrannie. 2017 Gallimard. Vingt conseils pour résister ;



Qui ne cherche pas des conseils ? Des conseils pour mieux vivre, tout seul, en couple, en famille, dans le quartier, dans la ville, dans la région, dans le pays, dans le monde.

J’ai compris depuis longtemps, enfin pas trop longtemps, mais j’ai fini par comprendre deux règles importantes. La première, ne pas donner de conseils. La seconde, ne pas écouter les conseils. Surtout en ce qui concerne la personne, le couple, la famille. Mais pour la suite, je continue d’être avide de conseils. De recettes. C’est une faiblesse. Car non seulement je suis avide de conseils, mais j’utilise ma science accumulée, mes lectures, mes engagements, mes égarements, pour donner des conseils.

Dans cet état d’esprit, quand j’ai lu la recension d’un livre de Timothy Snyder, De la Tyrannie, un recueil de conseils pour résister à la tyrannie, un petit bouquin de la taille de Indignez-vous, de Stéphane Hessel, je me suis dit, pourquoi pas. Je n’avais pas été échaudé par l’indigence intellectuelle et politique du petit bréviaire de Stéphane Hessel. J’étais prêt à nouveau à butiner l’impossible car j’avais un préjugé favorable envers l’auteur de Terres de sang, ce magnifique historien qui a étudié avec minutie et passion l’impitoyable concurrence entre nazisme et stalinisme pour savoir quel système tuerait le plus de millions d’hommes en Europe centrale. Et que je vous conseille de lire.

J’ai été déçu et pas déçu. La plupart de ses conseils concernent les citoyens nord-américains après l’élection de Donald Trump. Ici et là, on picorera des recettes utiles, comme les gestes ressassées pour éviter la grippe.

Par exemple : le pouvoir autoritaire est librement consenti. Les individus anticipent sur sans qu’on leur demande rien. Ainsi, on peut brûler une maison au Pays Basque sans protester. Les symboles d’aujourd’hui permettent la réalité de demain. Repérez les signes de haine. Ne détournez pas le regard, ne vous y habituez pas. Retirez-les vous-même et donnez ainsi l’exemple aux autres. Je pense à Brigitte Pradier qui du haut de son mètre soixante, dans une assemblée de chrétiens présidée par Mgr Aillet, intégriste devant l’éternel, la salle occupée pour moitié par des curés et des bonnes sœurs, qui se lève et déclare « Vous vous êtes battus contre le divorce, contre la contraception et vos idées ont plongé des millions de femmes dans le malheur. Je suis chrétienne et je déclare que le divorce, la pilule et la contraception m’ont permis de m’épanouir  plus que tous vos sermons ». Plus tard, la même Brigitte Pradier a débranché une vidéo haineuse contre l’IVG dans la cathédrale de Bayonne. Sans le savoir, elle suivait les conseils de Timothy Snyder. Snyder dit : il est aisé de suivre le mouvement, et il peut sembler étrange de faire ou de dire autre chose que tout le monde. Mais sans cette gêne, il n’est pas de liberté. Il faut bien que quelqu’un, quelque part, le fasse. Comme l’enfant qui dit que le roi est nu.

Il faut lutter contre ce que Snyder appelle la pensée magique, fondée sur l’incantation et la répétition. Par exemple, dire que le Pays Basque est en guerre est du domaine de la pensée magique. Il serait en guerre parce qu’il y a des prisonniers. Mais c’est très exactement le contraire. Le Pays Basque est en paix parce qu’il y a des prisonniers. En temps de paix, une personne qui tue, qui rackette, qui détruit, est punie et emprisonnée. En temps de guerre, cette personne est un soldat.

La plus grande menace pour la pensée magique est la recherche de la vérité. Or, nous dit Snyder, à l l’âge de l’internet, nous sommes tous devenus des journalistes et des chercheurs.  Chacun a sa part de responsabilité dans le sentiment de vérité de l’opinion. Chacun de nous peut contribuer à la vérification et au sérieux des informations. Ne faites pas circuler n’importe quoi. Transmettez les informations des journalistes et des chercheurs à qui vous faites confiance. Tenez un blog.

Et quand vous éternuez, pliez le bras devant votre bouche.