Rassurez-vous je ne crains rien.
Je veux le
dire et le redire à des amis inquiets par mes prises de position. Je ne crains
rien. Au contraire. Je suis l’un des hommes les mieux protégés contre tout geste
malveillant. Les séparatistes ardents, leurs complices souriants, les
blanchisseurs blanchissants veillent sur moi comme l’huile sur le feu. Surtout,
qu’il ne m’arrive rien. Quand j’allais exhiber ma pancarte (829), sur le parvis
de la Gare du Midi, des jeunes patriotes énervés voulaient me l’arracher, mais
leurs chefs sont très vite intervenus, surtout, surtout, ne le bousculez pas.
Il rêve d’être un martyr. Il ne cherche que ça. Quand notre groupe de citoyens opposés
à la sculpture de la hache à Bayonne a ouvert ses parapluies avec le même
chiffre 829, de jeunes patriotes énervés, se rappelant le bon vieux temps où
l’on éliminait les adversaires à coups de mitraillette, s’approchèrent en
bombant le torse, à défaut d’une arme à feu, tout de suite Txetx, le faiseur de
miracles, celui qui transforme des assassins en philanthropes humanitaires, est
intervenu pour les retenir, pour leur dire surtout ne les touchez pas, vous
voyez bien qu’ils ne cherchent que ça. Quand j’ai traversé la salle du Casino
Bellevue pour déposer la tribune de Libération
« En soutien aux victimes de Josu Urrutikoetxea », les responsables
de la cérémonie négationniste me parlaient avec respect, poliment, m’aidaient à
descendre et gravir les marches. Surtout
que je ne me foule pas une cheville et que j’accuse ensuite les blanchisseurs
d’attentat contre ma personne.
Je vous assure
que je ne risque rien. Personne ne risque rien. Maïder Arosteguy, candidate aux
élections municipales refuse de prendre position publiquement contre le
blanchissage parce qu’elle craint, me dit-elle, pour ses enfants. Je veux la
rassurer. Ses enfants ne risquent rien, pas plus que moi.
Parfois, ici
et là, les blanchisseurs ont mal secoué leur linge et laissent passer des
formules malheureuses. Si Josu Urrutikoetxea est extradé, si Txistor n’est pas
libéré, le radicalisme violent pourrait se réactiver. Attention, disent-ils à
ne pas réveiller les fantômes du passé. Folie ! Les demi-soldes d’une
armée morte n’ont plus qu’un seul rêve : que les années de prison soient
prises en compte pour le calcul de leur retraite. Jean-René Etchegaray et
autres blanchisseurs n’ont jamais combattu la terreur. De ne pas l’avoir combattue
les condamne à ne pas comprendre sa défaite.
Alors pourquoi
ce silence ? Lisez la tribune du Figaro, ceux qui défendent l’ETA et Jose
Ternura doivent aussi assumer leurs massacres ». Parmi les signataires
français, deux universitaires qui ne vivent pas au Pays Basque. Quatre
signataires français qui vivent au Pays Basque. Une élue qui ne se représentera
pas aux prochaines municipales. Un ancien maire. Le directeur de campagne de
Maider Arosteguy, le seul à prendre un vrai risque et votre serviteur. Tous les
autres sont des Espagnols ou des étrangers au Pays Basque français. Pourquoi
cette absence des Basques français, élus ou citoyens ?
Il se murmure
que le silence lourd de ceux qui ne sont pas d’accord s’expliquerait par la
peur. Peur de quoi ? Vous plaisantez ? Ils ne risquent rien. La
raison, la vraie, la seule, c’est que les patriotes ont déjà gagné la
bataille des idées. Je l’avais déjà remarqué en lisant les professions de foi
des candidats aux législatives. C’était à qui défendrait le mieux, le plus
fort, l’identité basque, l’identité historique et éternelle, la langue, le
territoire. Ce qui permettait à Enbata
de confirmer : « nous avons perdu les élections, mais nous avons
gagné la bataille des idées ».
Pour
comprendre le Pays Basque français, il serait utile de regarder un classique du
cinéma anglais, Passport to Pimlico.
Un immeuble effondré révèle un vieux parchemin qui prouve que le monarque avait
accordé totale indépendance à ce territoire devenu un quartier de Londres. Les
habitants, les élus, les élites, les conseillers, les commerçants, deviennent
fous. Ils défient le pouvoir central. Ils frappent monnaie, ils surveillent les
frontières, ils brandissent un drapeau, nomment des ambassadeurs, un
représentant à l’ONU, recrutent une armée. Folie collective. Vous vous rendez
compte. Un maire d’arrondissement, sans pouvoir, des conseillers qui délibèrent
sur un permis de construire, des associations qui gèrent un centre culturel
pour retraités, prennent du jour au lendemain un statut international. Dans
tous les pays, les journaux titrent sur Pimlico. Le conseil municipal devient
un Parlement, la police de quartier devient une armée, le centre culturel
devient l’UNESCO, le centre de soins devient Médecins du Monde, le maire
devient chef d’Etat. Qui peut résister à une telle promotion ?
Cette folie a
gagné le Pays Basque en France. La communauté d’agglo est devenue un royaume
indépendant. On y frappe monnaie, l’eusko. Le courant électrique doit être
nationalisé, ils ne veulent plus d’une énergie qui vient de l’étranger. On y
officialise la langue basque. Sur toutes ces questions, on défie le pouvoir
central, sur l’immigration, sur l’éducation des enfants, sur l’université, les
conseillers d’agglo devenus maîtres chez eux veulent légiférer. Si un tribunal
condamne un assassin, sa décision est contestée puisqu’il est étranger.
Les touristes
sont ravis. Il suffit d’un ticket de bus pour des vacances exotiques. Les élus
se prennent au jeu. Ils négocient avec le préfet devenu ambassadeur d’une
puissance étrangère. On ouvre des ambassades en Corse, en Catalogne, en Ecosse.
On signe un traité de paix avec l’état espagnol et l’état français. L’Irouléguy
monte à la tête.
L’ambition des
élus est sans limite. C’est sans danger me dit-on. Dans quel pays avez-vous vu Paillasse
arriver au pouvoir ?