« Le malheur accompagne et endeuille la vie des Basques depuis le putsch
franquiste jusqu’à nos jours (2007 !). Tous les Basques ? Au moins
ceux d’entre eux et ils sont innombrables, qui, se voulant Basques, entendent être
reconnus en tant que tels, parler leur langue, faire perdurer une antique
culture, décider de leur présent comme de leur futur, jouir enfin de ce droit
reconnu à tous les peuples de disposer d’eux-mêmes » Gilles Perrault,
préface à Marie José Basurco, sois forte,
Lucia, Gatuzain, 2007.
Je ne suis pas certain que les patriotes basques utiliseraient les mêmes
mots. Mais sur le fond, Gilles Perrault a raison : le malheur fait partie
de l’identité basque. Au point où cette référence au malheur, à la répression,
fait partie de ce qui me révulse, de ce que je rejette dans le mouvement patriote
basque. Dans la compétition pour le plus grand malheur, il n’est pas certain
que les Basques l’emportent. Dans les Jeux olympiques des massacres, pas sûr
que les Basques montent sur le podium. Il n’est pas sûr que la vie des Basques soit
endeuillée par un malheur permanent. Ils voudraient pourtant nous le faire
croire et de nombreux étrangers au pays Basque se laissent aller à une
compassion qui est une forme acceptable de condescendance.
La raison est évidente et universelle. Quand un groupe est minoritaire, qu’il
ne parvient pas à atteindre ses objectifs, la tendance est de trouver l’explication
des échecs dans la répression ou dans les ruses de l’adversaire, ses sortilèges, ses tricheries. Les objectifs
des patriotes sont clairs : la réunification des sept provinces du pays
Basque et leur indépendance. Ces objectifs sont minoritaires au pays Basque que
les patriotes appellent nord, ou Iparralde, et que vous et moi appelons pays
Basque français. Pourquoi sont-ils minoritaires ? à cause de la répression
de l’impérialisme français. La langue basque a tendance à reculer parce qu’elle
minorée dans les politiques publiques. La cause basque est mal entendue parce
que ses militants sont pourchassés, emprisonnés. Voyez la place des prisonniers
politiques dans toute la presse nationaliste, qu’elle soit irlandaise, corse ou
basque. Les militants ne sont pas des acteurs, ils sont d’abord des victimes. Pour
les patriotes basques, libération ne peut signifier que levée d’écrou, justice
ne peut être qu’amnistie. Le processus de paix est entravé par la victimisation
permanente qui entrave le chemin vers une citoyenneté. La politique qui
consiste à convaincre, à discuter, à reconnaître les raisons de l’autre, est
difficilement accessible à qui partage la société entre victimes et bourreaux.
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