mardi 29 avril 2014

Le Pen a raison


Le Pen a raison





En Hongrie, en Pologne, l’anéantissement des Juifs avait ouvert la voie à l’ascension d’autres           couches sociales. Car ils occupaient souvent des places dans la petite et moyenne bourgeoisie.             (Keith Lowe, L’Europe barbare, Perrin, 2012).

L’idée brillante du Front national est d’avoir compris que si des gens sont malheureux, ou chômeurs, ou mal-logés, c’est la faute aux étrangers. Le mot étranger est un terme vaste et permet tous les amalgames. Ainsi, en Pologne, en Allemagne, les Juifs, qui vivaient depuis des siècles dans le pays, sont devenus des étrangers comme les catholiques en Grande-Bretagne quand le Royaume-Uni  a rompu avec l’Eglise catholique romaine. L’expression, « c’est la faute aux étrangers » est justifiée  si celui qui la prononce est en capacité de définir ce que signifie exactement le mot « étrangers ». Si un pouvoir extérieur lui impose cette définition, alors la phrase perd son sens. Si de l’extérieur, quelqu’un lui dit que la plupart des « étrangers » dont parle le Front national ne sont pas plus étrangers que les paysans bretons du début de vingtième siècle, évidemment, la phrase devient difficile pour les descendants bretons du vingt et unième siècle[. Mais en Allemagne ou en Pologne, si l’État dit que les Juifs ne sont pas polonais ni allemands, alors la phrase « c’est la faute aux étrangers » prend tout son sens.

Et elle est même tout à fait juste. Ainsi que le rappelle l’historien Keith Lowe, l’anéantissement des Juifs pendant la Seconde guerre mondiale a permis à des milliers de Hongrois, de Polonais et d’Allemands d’accéder aux professions, aux entreprises et aux appartements qu’ils occupaient. L’anéantissement des Juifs avocats, banquiers, enseignants, médecins, marchands d’art, boutiquiers, tailleurs, producteurs de cinéma, a permis aux avocats, banquiers, enseignants, médecins, marchands d’art, boutiquiers, tailleurs, producteurs de cinéma de prendre leur place, ce qui prouve bien que s’ils n’accédaient pas à ces places, c’était bien la faute aux Juifs.

Ma conclusion est simple. Ce n’est pas parce qu’il a tort que le Front national doit être combattu. C’est parce qu’il a raison. Dans une pièce surchauffée et saturée, ce sont toujours les autres qui nous empêchent de respirer.




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