jeudi 9 juin 2016

l'ennemi principal


Coups de force, grèves minoritaires, actions d’avant-garde. Censurer les quotidiens, manifester devant le logement des élus et des ministres, bloquer les trains, les raffineries, transformer Paris en décharge…Pour certains, il s’agit de manifestations sociales, des colères populaires héritières en droite ligne des émeutes de la faim et de la prise de la Bastille.

Les actions minoritaires ont deux issues. Soit elles sont victorieuses et portent au pouvoir des personnes ayant pris l’habitude de mépriser la démocratie : coups de force fascistes ou communistes,  guérilla cubaine, la prise du Palais d’Hiver. Issue non-souhaitable, mais sans doute pas à l’ordre du jour.

La seconde issue est plus prévisible. L’opinion, les citoyens, la majorité, lassés des attentes sur les quais, sur les autoroutes, des ordures qui s’entassent, des pneus qui brûlent, aspirent à un pouvoir autoritaire qui mettra fin aux désordres. Lorsque vient le temps des scrutins, les assemblées élues prennent une teinte bleue horizon.

Risquons une hypothèse : les organisateurs des différents coups de force sont animés par une vieille lune des courants marxistes : l’adversaire principal, c’est la social-démocratie, c’est le réformisme. Il vaut mieux Trump que Clinton, Sarkozy que Hollande. Quand la droite dure est au pouvoir, au moins, les choses sont claires, les révolutionnaires ne perdent plus leur temps à gouverner, ils dénoncent, ils protestent, ils manifestent. Quand la gauche est au pouvoir, elle perd son âme à équilibrer le budget de la sécurité sociale, à défendre la laïcité, à lutter contre les discriminations, à réformer le code du travail, à assurer une plus juste redistribution des richesses. Misérables mesurettes alors qu’il s’agit d’escalader le ciel.

Dans la situation actuelle, la gauche divisée ne peut retrouver le pouvoir. La gauche radicale n’obtiendra qu’un seul résultat : l’élimination de la gauche au second tour des présidentielles. Ces perspectives ne sont pas des dégâts collatéraux, elles sont au centre des impatiences révolutionnaires, qui n’en peuvent plus de combattre une gauche trahissant la révolution, une gauche gestionnaire.

Jean-Luc Mélenchon, Pierre Laurent, Philippe Martinez, Benoît Hamont, ne réussissent à se mettre d’accord sur rien. Qu’ils patientent. Demain, contre une droite qui détricotera les réformes du gouvernement socialiste,  ils défendront les réformes aujourd’hui dénoncées, au coude à coude, dans des manifestations monstres, « tous ensemble, tous ensemble », pour défendre le code du travail, le tiers payant, le RSA, le mariage pour tous…L’air sera frais et l’horizon lumineux.

 

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