Pour demander l’amnistie et le
rapprochement des prisonniers basques, il ne faut pas lire Inaki Rekarte. Inaki
Rekarte, ancien etarra, a publié en 2015 un livre confession (Lo dificil es perdonarse a uno mismo,
éditions Peninsula). Sa première victime fut un trafiquant de drogue, comme l’IRA
à Belfast, comme le président des Philippines, les terroristes clandestins ou d’état
font leur police. En 1992, il actionne le détonateur d’une voiture piégée et
tue trois personnes, un couple qui passait par là, laissant deux adolescents
orphelins et un jeune homme sur le point de se marier. Arrêté, torturé,
condamné, il est libéré en 2013. « Je me suis rendu compte que j’étais
raciste, fermé, ignorant…ETA est une secte ». Désormais libre deux fois,
et de la prison et de la secte, il n’attend qu’une seule chose : que l’ETA
rende son arsenal et disparaisse.
Il ne faut retenir de cette
période que les etarras emprisonnés, torturés, victimes, innocentes, toujours innocentes.
Il faut accepter que se pavanent sur les plates-formes, les estrades, les
scènes, les bibliothèques, les anciens bourreaux victimes innocentes d’avoir
torturé des entrepreneurs, tué des conseillers municipaux, mutilé des
journalistes, et qu’ils racontent, victimes innocentes, comment ils ont été
maltraités dans les prisons pendant que la fiancée du promis rangeait dans une
valise sa robe de mariée. Ayant oublié ou effacé ce qu’ils faisaient vraiment,
ces victimes innocentes, assassins de Yoyès, on peut alors demander qu’ils
soient rapprochés de leur famille, pas des familles qu’ils ont endeuillées, des
familles biologiques. Une fois rapprochés et libres, ils pourront regarder de
haut les survivants de leurs tueries et leur reprocher leur deuil. Comme des
kapos des camps de concentration libérés qui reprocheraient aux anciens
déportés leur pyjama rayé parce que quand même c’est terminé tout ça. Les
etarras, comme les kapos, comme les djihadistes, avaient décidé que certaines
personnes n’étaient plus des êtres humains, mais des vermines, des bêtes
nuisibles, qu’il était licite d’exterminer. Et maintenant, certains d’entre eux
écrivent des livres pour se repentir. D’autres pour montrer leur courage et
leur engagement sacré. Regardez les vitrines des librairies à Biarritz,
regardez les étals de livres à la Gare du midi, regardez les catalogues des
bibliothèques. Vous y trouverez les livres de Gaby Mouesca, mais pas ceux d’Inaki
Rekarte. Pas ceux de Yoyès.
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