Sur
la révolution, je suis capable de radoter jusqu’au petit matin. L’homme est un
loup pour l’homme. Sans loi, sans état, sans règles, nous vivrions dans une situation de guerre
civile permanente. D’une part. D’autre part, les états et les règles qui
évitent le chaos servent l’intérêt des puissants. Les puissants sont ceux qui
possèdent. La révolution dépossède les puissants, donne le pouvoir à ceux qui
ne possèdent rien que leurs capacités individuelles et le nouvel état dépérira
pour laisser à la place à une collectivité d’individus qui n’auront que le
bonheur des autres en tête, comme condition du bonheur individuel. Racontée
ainsi, comment voulez-vous que les têtes ne tournent pas quand la révolution
vous prend dans ses bras ?
Mettre le feu ou crever les pneus des 4x4
est nettement plus excitant que de demander aux pouvoir publics une dérivation
qui va diminuer le nombre de tués dans la ville, car il faut monter des
dossiers, discuter à la préfecture et à la mairie, faire signer des pétitions,
vaincre les craintes des commerçants qui vont perdre leur clientèle automobile,
ça prend du temps, c’est fastidieux, épuisant. Pendant tout ce temps passé en
réunions, les copains et les copines organisent des soirées dansantes où ils se
bourrent la gueule, puis s’envoient en l’air dans les meules de foin qui
sentent l’herbe tendre.
Mais pourquoi ne pas tout concilier ? Incendier
une maison, taguer la vitrine d’une banque, crever les pneus des 4x4 en sortant
d’une soirée entre copains, après s’être bourré la gueule et envoyé en l’air
dans les meules de foin fraîchement coupé. Dans la journée qui précède cette
soirée avec les potes, négocier la déviation avec le représentant de la
préfecture, avec la mairie, avec un club
automobile qui défend le droit sacré de tuer, aussi sacré qu’aux états-Unis le droit de disposer d’une
arme à feu. Pourquoi le même bonhomme, costume trois pièces quand il soudoie,
dockers et souliers vernis quand il festoie, shorts et tennis quand il baisoit,
ne passerait pas ainsi de l’efficacité administrative paisible à la frénésie de
l’éclatement alcoolisé et musical, culminant dans le souffle d’un pneu qui rend
l’âme. Selon l’heure du jour, selon l’humeur, selon le goût, le même individu
serait réformiste, festayre ou révolutionnaire.
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