Pour éviter de
réfléchir, il vaut mieux oublier hier et ne pas penser à demain. Comme les
nouvelles nous arrivent chaque jour, (un journal est un quotidien), les efforts
pour assimiler la vague des informations risquent de mobiliser tous nos neurones.
La discussion
sur les violences policières est soumise à cette pression. Le manifestant est
blessé à l’œil, répondez monsieur le ministre. Aujourd’hui, tout de suite.
Pour
introduire de la politique dans l’émotion, voici quelques idées.
Dans les pays
démocratiques, (où se tiennent des élections régulières, où le droit de
manifester et de donner une opinion est gravé dans le marbre de la constitution…),
de manière récurrente des hommes et des femmes utilisent des moyens illégaux
pour défendre leurs revendications. Ces moyens illégaux vont des émeutes
urbaines jusqu’au recours à la lutte armée.
Alors fleurissent
les explications les plus ahurissantes sur la légitimation de ces actes. Les
transgressifs et leurs soutiens se reportent à des régimes sans droits, sans
libertés individuelles et collectives pour justifier leurs actions. Ainsi le
peuple se soulève comme les révoltés américains contre une occupation étrangère,
comme les foules révolutionnaires contre une monarchie absolue, comme les colonisés
contre le colonialisme.
Comment faire
accepter des actions illégales ? En poussant l’état légitime à recourir à
des actions illégales. Il faut taper, taper encore, piller, tuer éventuellement,
jusqu’à ce que l’état démocratique
renonce à ses principes et se mette à ressembler à la caricature qu’en dessine les
insurgés.
Les
républicains irlandais légitimaient leurs actions en affirmant que rien n’avait
changé depuis l’indépendance. Les colonialistes britanniques occupaient une partie de l’Irlande,
la guerre de libération devait continuer. Les guérilléros basques affirmaient
que rien n’avait changé depuis la chute du franquisme. Action directe et
Fraction armée Rouge tuaient et kidnappaient parce qu’il n’y avait aucune
différence entre la dictature du capital et les dictatures fascistes.
Un état non
démocratique ne s’embarrasse pas de principes pour lutter contre cette forme de
terrorisme. Un état démocratique est plus démuni. Il doit respecter les lois,
la justice, ne pas enfermer sans
jugement. Contre ces formes d’action, la tentation est grande de recourir à des
modes de répression qui paraissent plus efficaces. Tous ces états, français, britanniques,
espagnols, ont été ainsi tentés : tribunaux d’exception et tortures
en Irlande du Nord, recours à des éliminations sans procès, le GAL et les tortures en Espagne…
Il faut alors
affirmer un principe qui ne souffre pas d’exception. Si l’état renonce au droit
et à la justice, s’il tend à ressembler au miroir que lui tendent les insurgés,
les insurgés ont gagné. Chaque violation des droits donne raison à ceux qui la
violent. Le massacre de Bloody Sunday, les tortures dans les prisons, le GAL,
ont prolongé la terreur armée. Dans la lutte contre les soulèvements factieux,
la seule arme efficace est la justice, la seule politique efficace est la démocratie.
Si des
brutalités policières sont avérées, si l’emploi de certaines armes doit être revu,
que les enquêtes de justice se mènent. C’est la condition pour que les cris d’état
policier, à bas la répression résonnent aussi creux que le cri de la mouette.
Quant à ceux
qui continuent à crier ainsi malgré les enquêtes de justice, il n’est pas
inutile de rappeler que leur condamnation de la violence est limitée. Ils
oublient les pillages des magasins, les ruines des petits commerçants, la
dizaine de morts sur les ronds-points, les policiers blessés, les voitures
incendiées. Eux et leurs soutiens
veulent nous faire croire à des émeutes paysannes, au banditisme social. Ils
veulent nous faire croire qu’ils sont Robin des Bois, Cartouche, qu’ils ont pris
la Bastille. Les résultats immédiats ont surtout précipité les faillites de
petites entreprises et le licenciement de leurs salariés.
Il faut pourtant
admettre que le résultat de leurs actions n’est pas nul. Une augmentation du
SMIC de cent euros, de la vitesse automobile de dix kilomètres et un grand
débat national sur la politique du gouvernement Macron qui renforce une
audience qui s’affaiblissait. Malgré les efforts hebdomadaires et les discours
répétées des révolutionnaires bondissants, le régime a bien résisté et s’en
sort par le haut.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire