lundi 21 octobre 2013

mixité sociale


            Pour Annie Clerval ‘Libération 19-20 octobre 2013),  la gentrification de la capitale. s’est faite aux dépens des classes populaires. Un processus d’exclusion que la politique du logement mené par la municipalité de gauche a ralenti, mais  pas enrayé.

            La gentrification est définie comme un embourgeoisement qui touche les quartiers populaires anciens où les classes populaires sont progressivement remplacées par une classe intermédiaire, la petite bourgeoisie intellectuelle. Elle rompt la fonction historique de ces quartiers populaires. Ils sont terre d’accueil, une force, un tissu de solidarité, une ressource commerciale dynamique. En les faisant disparaître, on ne change pas l’ordre social. On aggrave les inégalités. La gentrification ne change rien au quotidien des classes populaires. Au contraire. Leur situation s’aggrave. Les loyers augmentent, les prix montent. Sur les murs de mon quartier, cette analyse se traduisait en affiches : « La mixité sociale, c’est la guerre faite aux pauvres ».   

                        Les gentrificateurs ne s’installent dans ces quartiers que sous la contrainte du marché immobilier. Ils ne choisissent pas d’habiter un quartier mixte, mais d’habiter Paris coûte que coûte. En fait, ils ne pratiquent pas la mixité sociale, mais la sociabilité entre soi et l’évitement scolaire.

            Je me reconnais dans ce portrait. Je suis un gentrificateur. Prof de fac retraité, j’habite la Goutte d'Or. Je ne pratique pas la mixité sociale. J’ai choisi ce quartier sous la contrainte du marché immobilier. Si j’avais des enfants d’âge scolaire, je choisirais sans doute l’évitement des écoles publiques.            

            Si le portrait est juste, l’analyse me semble erronée.  

            Dans la Goutte d'Or il y avait des taudis, propriété de marchands de sommeil ils ont été détruits et remplacés par des logements neufs, privés ou locatifs, dont un certain nombre de logements sociaux. Il y avait des maisons closes avec des migrants qui faisaient la queue dans la rue (était-ce une ressource commerciale dynamique pour la ville ?). Ils ont disparu. Quand les bidonvilles ont été détruits, des militants ont protesté. Ces bidonvilles étaient des facteurs d’intégration, des réseaux de solidarité, de construction de la citoyenneté.
           
            Chaque fois qu’un quartier s’améliore, les loyers grimpent, les populations changent. Quand il reste ghetto ou bidonville, les loyers baissent, les catégories intermédiaires fuient, Ne rien faire, c’est rassembler les difficultés, les misères, les galères, dans des lieux à la dérive, aboutit à la pire des solutions : des ghettos de la misère.

            Les plus acharnés contre la mixité sociale sont les classes supérieures qui luttent contre toute présence de logements sociaux ou de lieux de solidarité sur leurs terres. Les plus accueillants à la mixité sociale sont ceux qui saluent l’installation de médiathèques, de cinémas, et l’arrivée de nouvelles couches sociales plus favorisées comme  une protection contre les dérives. Ont-ils tort ?


            Anne Clervel découvre que toutes les réformes sociales profitent d’abord aux catégories les moins démunies. Fallait-il pour autant renoncer à construire un État-Providence ? 

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