ETA et Iparretarrak
Iparretarrak (l’ETA du Nord) a cessé ses activités
militaires en 2003. Il n’y a pas eu de contorsions, de mise en scène,
d’interventions de la société civile. Les cagoules ont été ôtées, les armes enterrées,
l’organisation terroriste s’est dissoute. Jamais il n’y eut d’accusation contre
le gouvernement français, jamais Iparretarrak n’a dit « le gouvernement
français nous empêche de désarmer ». Ils ont désarmé et dissous leur
organisation sans demander la permission à personne. D’Iparretarrak il reste
quelques morts oubliés, quelques prisonniers libérés qui font carrière dans la
nostalgie, un documentaire qui leur donne la parole. Les abertzale leur rendent
parfois visite comme on visite le Musée Grévin.
Ce qui fut possible pour Iparretarrak ne l’est pas
semble-t-il pour ETA. Pourquoi ?
Premier élément de réflexion. Iparretarrak s’est
constitué contre la volonté de l’ETA côté espagnol qui souhaitait conserver le
Pays Basque français comme base arrière où l’on pouvait trouver le repos, des
soins médicaux, des maisons hospitalières, sans être trop harcelée par les
forces de l’ordre. Mais les patriotes basques du Nord grommelaient :
pourquoi n’avons-nous pas le droit de faire joujou avec les armes et les explosifs ?
Pourquoi ce sont toujours les mêmes qu’on emprisonne, qu’on célèbre, pourquoi
ce sont les mêmes portraits de martyrs ou de prisonniers sur les
murs ? Ils voulaient leur part du panthéon.
Quelques morts plus tard, quelques emprisonnements célébrés, ils semblent
satisfaits. Mais ils n’ont jamais réussi à se placer au centre comme leurs
co-terroristes du sud. Jamais ils ne réussirent à terrifier la société basque
du Nord, les élus n’ont jamais eu besoin de gardes du corps, on pouvait
discuter tranquillement, à haute voix, dans les cafés et les lieux publics, les
chercheurs, les intellectuels, les hommes politiques pouvaient organiser des
colloques sans crainte d’être harcelés ou éliminés. Au Pays Basque sud, dans
les années sombres, on chuchotait, on surveillait son vocabulaire, on se
donnait rendez-vous dans un jardin public.
Une société terrorisée n’a guère de tendresse à
l’égard des terroriseurs. Jusqu’au cessez-le-feu de l’ETA espagnole, l’objectif
central de la vie politique au Pays Basque était la fin de l’épouvante. Les
assassinats étaient suivis de manifestation contre les etarras, pour la paix.
Les principaux partis politiques condamnaient la terreur armée et
applaudissaient les arrestations. Les victimes de l’ETA et leurs proches
s’organisaient en associations de victimes du terrorisme (AVT). La société
basque espagnole n’est pas disposée à aider l’ETA à sortir de son impasse au
cours d’une grande cérémonie au drapeau. En ce mois de décembre 2016, l’AVT a
reçu avec chaleur la juge Laurence Le Vert, qui vient de prendre sa retraite
après avoir passé quarante ans de sa carrière professionnelle à pourchasser les
terroristes basques. Les victimes l’ont chaleureusement félicitée pour son
efficacité. On attendra encore longtemps une visite de Laurence Le Vert à
Bayonne ou à Biarritz. Elle a pourtant contribué à nous protéger autant qu’elle
a contribué à pacifier le Sud.
Les etarras d’Iparretarrak n’ont jamais réussi à
terroriser la société basque française. Pas assez nombreux, pas assez
déterminés, pas assez soutenus. Ils ont rarement tué et se sont contentés de
faire sauter ici une agence immobilière, là un Macdo, avec des bouteilles à
gaz. Pour la majorité des habitants et des touristes, la vie continuait. Moins
de terreur, moins de haine. Les victoires du BO et quelques vitrines brisées occupaient
les informations de la semaine.
Comme le ressentiment est moins fort, il est
possible d’expérimenter au Pays Basque français des formes de reddition qui
sont difficiles, voire impossible au Sud. On n’imagine pas au Sud des échanges
de correspondance entre des militants de bonne volonté pour permettre à l’ETA
de rendre les armes honorablement. On n’imagine pas que les responsables
politiques du Parti populaire, du Parti socialiste manifestent côte à côte avec
Otegi et les anciens etarras. Il n’y a pas d’association de victimes au Pays
Basque français. C’est qu’il y a eu là-bas huit cents morts, des kidnappings,
des tortures, des extorsions, des règlements de compte. Mais maintenant que les
faiseurs de paix ont montré leur savoir-faire, aussitôt, dans le Sud, les
soutiens de l’ETA ont sauté sur l’occasion et se sont réunis pour clamer :
faisons la même chose au Pays Basque sud. Les événements de Louhossa sont une
étape des efforts des terroristes pour se réinsérer sans payer le prix
politique de leurs crimes.
De tous ceux qui n'ont rien a dire, les plus intéressants sont ceux qui se taisent, m. Goldring.
RépondreSupprimerM. Goldring, il parait que vous êtes communiste. On dit souvent que le communisme est une grande idée aux mains de petites gens. Celui qui a dit ça devait s'y connaitre, ou devait vous connaitre? Aucun doute là dessus.
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