Le prix à payer pour l’abandon
du statut de tourisme est une tendresse pour la terreur quand elle brandit l’ikurina, le drapeau basque. Je ne peux
pas à la fois condamner l’emploi de la violence en politique et être accepté
comme appartenant à la nation basque. Je pourrai apprendre la langue, pratiquer
la pelote basque, danser selon les règles de l’Euskal Danza, mettre mes
petits-enfants dans une ikastola, chanter aupa
BO, si je manifeste une quelconque mauvaise humeur à l’égard des etarras, je resterai un touriste,
incapable de comprendre l’âme basque. Ce trait n’est pas spécifique au pays
Basque. Là où des personnes ont tué ou sont morts pour le pays, le
positionnement par rapport à leur engagement est central dans la vie politique.
On peut dire qu’ils ont eu tort de ne pas arrêter plus tôt, ou certaines formes
ont quand même dépassé les bornes, mais quand même, ils ont contribué à
l’édification de la nation, leur sacrifice n’a pas été inutile, il a même été vital.
Sans leur sacrifice, la nation n’aurait pas émergé. Le sang est nécessaire pour
que naisse le pays. Pas de construction nationale sans transfusion. Pas
d’église chrétienne sans le sacrifice du Christ, pas d’Irlande sans Bobby
Sands, pas de pays Basque sans Gaby Mouesca. Si tu ne comprends pas cela, tu ne
comprends rien. Tout le reste, la langue, les danses, les sports, la culture,
la poésie, sont accessoires par rapport au sacrifice suprême. Quand je dis que
Bobby Sands a été arrêté parce qu’il transportait des explosifs dans son
coffre, ou que Gaby Mouesca a été pris
sur le terrain d’un affrontement militaire avec un gendarme qui est mort et que
pour moi, la famille du gendarme comptait autant que la famille de Mouesca, je
sais, je sens, que s’abat le couperet aiguisé qui sépare les religieux des
apostats. Sur ce territoire grand comme un mouchoir de poche, où tout le monde
connaît tout le monde, on se salue, on se congratule on s’embrasse, au-delà
différences, de toutes les différences politiques. Mais pas touche au sang
versé. Respect pour les anciens combattants. Il faut les rapprocher de la
famille, il faut les amnistier pour maladie, il faut leur donner un statut de
sang politique. Comme touriste, j’ai le droit de penser que la découverte d’explosifs
au centre-ville, rue de la Poste mérite qu’on arrête leurs propriétaires. J’ai
le droit d’imaginer le déferlement de condamnations si des jihadistes avaient
été arrêtés pour possession d’explosifs, au centre de la ville de Biarritz. Comme
touriste, j’ai le droit de déplorer le silence sur la découverte, le droit de
condamner les manifestations qui protestent contre l’arrestation de terroristes
abertzale. Mais si je veux devenir habitant du pays Basque, citoyen, je perds
le droit de considérer les etarras comme des terroristes, comme les autres
terroristes, des individus qui veulent imposer leur point de vue, leur
programme, leurs idées, par la terreur.
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