Pour
François Cusset, « le début d’une longue veillée, le monde 8 avril 16. « nous sommes en train de faire quelque chose »,
il y a des signes qui ne trompent pas. Comme ces manifs sauvages, mobiles et
masquées. Le pouvoir a beau vouloir faire le tri entre casseurs et
manifestants, bons scolarisés et méchants cagoulés, ça ne marche plus. Car « nous
sommes tous des casseurs », car il faut « casser le capitalisme ».
Dans les assemblées citoyennes, la parole circule. F. Cusset salue la volonté
réfléchie de ne rien revendiquer, qui consomme la rupture avec un ordre
politique qui n’est plus reconnu comme légitime. Il salue les slogans neufs :
« « le monde ou rien », « ni loi ni travail » ; la rédaction d’une constitution de la république
sociale. Un humour guerrier. Les lycéens découvrent la violence d’état, les étudiants
sont dégoûtés par le mensonge des diplômes. Salue la certitude qu’aucune
élection ne changera l’ordre établi. La politique classique est morte.
La
lutte contre la violence d’un monde inhabitable a été refoulée derrière l’obsession
terroriste qu’on redécouvre sous la matraque policière. Contre cette violence,
les nuits debout se « déclarent en guerre » et la violence possible
de cette guerre-là, on n’a rien à y perdre.
Passons
sur l’assimilation guerrière entre casseurs et étudiants scolarisés. Passons
sur l’assimilation entre les attentats terroristes et les matraques policières.
Passons sur la redécouverte des paroles de l’Internationale. Passons sur les « mensonges des diplômes »
dénoncés par un professeur d’université, un insupportable emploi précaire
obtenu grâce au mensonge des diplômes. Il est trop facile de repérer les
colères qui laissent le monde en l’état. Mon expérience me permet seulement de
rappeler un fait tout simple. Tous les mouvements de jeunes, les grèves des
universités, les assemblées générales, n’ont jamais, au grand jamais, empêché la
tenue des concours d’accès aux Grandes Ecoles, n’ont interrompu les concours d’agrégation,
la tenue de jurys de thèse qui permettaient d’accéder au professorat. J’ai
passé une partie de ma vie d’universitaire à entendre des dénonciations
radicales des diplômes par des collègues en grève illimitée, jamais en grève
des concours d’agrégation, de concours d’entrée aux Grandes écoles, jamais en grève
des jurys de thèse.
Ne
passons pas sur la seule question qui vaille. Comment des slogans comme « nous
sommes tous des casseurs », « il faut casser le capitalisme », « ni
loi ni travail », peuvent-ils être salués comme des slogans neufs par un
universitaire ? Comment un journal sérieux comme le monde peut-il publier des enthousiasmes rupestres ?
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