Où ils sont nés vos parents ?
Fête du
quartier Bibi, à Biarritz. On se connaît, on ne se connaît pas. Debout, un
verre de rouge à la main gauche, une canne à la main droite, j’écoute, j’entends,
je parle. Un jeune homme à un autre jeune homme : je ne suis pas d’ici, je
suis d’Anglet. Tu es le bienvenu, lui répond l’autre. Moi : c’est pire, je
suis parisien. Bienvenue me disent-ils tous les deux, et me serrent la main. Celle
qui tient la canne.
Une
conseillère municipale qui a des ambitions. Elle rencontre une dame qui se
présente comme « basque » et lui demande où sont nés ses parents. Je
suis là, j’écoute, j’entends, je parle. Parce que la conseillère, ce n’est pas
la première fois qu’on lui pose la question. Elle va s’opposer dans les futures
campagnes à d’autres candidats à qui on ne posera pas la question parce que
leur nom, leur adresse, leur arbre généalogique, les enracinent dans la ville
et dans le territoire. Comment répondre à cette question ? Elle habite Biarritz,
mais ses parents ne sont pas nés à Biarritz. Son nom n’est pas basque. Que dit-elle
répondre ?
Elle peut
répondre gentiment : moi, je suis de Biarritz parce que j’ai choisi la
ville. Ce n’est pas un hasard de naissance.
Elle peut
répondre moins gentiment : « la dernière fois que j’ai entendu cette question,
c’était Donald Trump qui la posait à Barak Obama.
Moi, je
réponds rarement gentiment. La dernière fois qu’on m’a posé cette question, c’était
Xavier Larramendy. Un marcheur patriote.
Je lui ai répondu que la dernière fois qu’on m’avait posé cette question, c’était
en 1942, un fonctionnaire de Vichy. A l’époque, c’était une question qui tuait.
Quand on
me pose la question « où es-tu né ? Où sont nés tes parents ? »
Je réponds que la démocratie est un régime où la bêtise a le droit de poser des
questions stupides. Elle me donne le droit de ne pas répondre.
Parfois,
je réponds que je suis basque parce que
je l’ai décidé. Que la grandeur d’une culture se mesure à son acceptation des
différentes origines. Ma compagne déclare, elle, qui est née là où nous
parlons, sur une place qui porte son nom, dans un logement qui donne sur la
place qui porte son nom, qu’elle n’est pas basque. Je lui dis alors, puisque
nous vivons ensemble et que j’ai décidé d’être basque, qu’elle était basque par
alliance.
Une seule
bonne question, légitime, honorable : « où sont nés tes beaux-parents ? ».
Parce qu’on ne choisit pas ses parents, alors qu’on choisit ses beaux-parents.
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