Dans le Chicago des années trente, une mafia
terrorisait la population, rackettait les commerçants, les chantiers de
construction, les boîtes de nuit. Cette mafia achetait les élus municipaux et
les policiers, exécutaient ceux qui n’étaient pas dociles. Les veuves et les
mères qui pleuraient trop fort étaient priées de s’exiler. Par la terreur, les
mafieux obtenaient un pouvoir sur la ville qu’ils n’auraient jamais obtenu par
les moyens politiques démocratiques.
Pourtant, ils n’étaient pas vraiment satisfaits. D’une
part, cette manière de régler les conflits par les armes les faisaient vivre en
permanence sous une pesante protection, les familles n’étaient jamais vraiment
à l’abri. Et la police avait recruté des incorruptibles qui réussissaient de
plus en plus à arrêter et mettre hors d’état de nuire cette bande de
malfaisants.
La pression policière et les plaintes de la population
étaient si fortes que de plus en plus de membres de cette mafia songeaient à
une reconversion. Pourquoi ne pas utiliser toute leur intelligence, leur
énergie, leur fougue, pour accéder à des carrières politiques. Pourquoi ne pas
utiliser des moyens réguliers pour arriver à gouverner la ville, comme tant d’autres
le faisaient sans mitraillette ?
Pour atteindre cet objectif, il fallait renoncer aux
règlements des problèmes par l’épée et ne plus utiliser que la ruse. Ils
envoyèrent les enfants à l’université, comme avocats, économistes, managers. Ils
cachèrent les armes ou offrirent même de les rendre à la police pour montrer qu’ils
avaient vraiment renoncé à la terreur. Ils
offrirent d’indemniser leurs victimes et leurs familles, de leur payer des
études ou des voyages à l’étranger. Petit à petit, les mafieux qui n’étaient
pas en prison renoncèrent à toute activité criminelle, tentèrent de se faire
accepter dans les meilleures sociétés, dans les assemblées, les parlements.
Ce qu’ils n’ont jamais réussi à faire, qui était vraiment
hors de portée, c’était d’organiser une belle fête populaire pour célébrer leur
reconversion. Il y a des limites à ce qu’une société peut accepter.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire