Réfléchissons
dit le miroir. Il me reste, dit-il, à tout casser, cinq ou six années
possibles. Cinq à six années, c’est considérable. La première guerre mondiale a
duré cinq ans, la seconde cinq ans. En cinq ans, le monde a été bouleversé. De
zéro à cinq ans, je suis passé du statut d’un nouveau-né animal à un enfant
déchiffrant des livres et récitant des comptines. En cinq ans, la présidence de
François Hollande s’est engloutie dans les mots et les images.
Mais
tous ces événements ont mobilisé des moyens considérables. Des armées et des
armes. Des uniformes, des hôpitaux, des camps. Des réseaux, des partis, des
intellectuels et des infirmières. Je suis là à cinq ans du dernier quinquennat,
je veux dire à cinq ans du moment où le je présenterai à l’entrée de l’hôpital
de Bayonne pour faire une déclaration courte devant la presse : « j’ai
décidé de ne pas me représenter, j’ai décidé d’arrêter ». De toute
manière, la loi limite le renouvellement. On me demandera et que comptez-vous
faire désormais ? Je répondrai rien. Mon octogénat est terminé et je ne me
représente plus. Ce n’est pas l’envie qui me manque, Sachant ce que j’ai
appris, si je recommençais un octogénat, les erreurs seraient corrigées, je
saurais choisir le bon chemin. Bon, tant pis, la loi l’interdit.
Il
me reste un quinquennat. Certes sans réseaux, sans moyens, sans local, sans
armées, sans capital. Je dispose d’un livret de dix mille euros, d’une retraite
régulière et qui, même amputée d’une CSG renforcée, restera confortable. Je
dispose d’un logement et d’une relation solide que beaucoup m’envient. Quelques
amis, la famille, les enfants, les petits-enfants. Je dispose d’un ordinateur
et d’un vocabulaire utile. Quand je parle, on m’écoute. Quand je me tais, on s’inquiète.
Plus de trois cents amis suivent les textes que j’écris sur facebook. Tous les deux ans je publie un
livre ou un article.
Sur
la politique, qui m’a toujours passionné, il me reste comme pouvoir un droit de
vote et une intervention régulière dans des lieux de discussion qui rassemblent
entre vingt et trente personnes. Pas d’ambition de carrière, pas de réseaux.
Sur
un seul point, dans un seul domaine, il me reste un soupçon d’influence :
la résistance à la dérive identitaire du Pays Basque dont je suis devenu
habitant et citoyen. Partout où j’interviens on m’écoute avec intérêt et je
sens des graines de réflexion qui parviennent à germer sur le terrain stérile
du nationalisme. C’est donc à ce sujet que je vais consacrer le quinquennat qui
me reste.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire