lundi 28 octobre 2019

malaise vagal


Quand l’expérience confirme les hypothèses, quel pied. Laissez-moi vous raconter. Il m’arrive d’être fatigué. D’autres jours même, très fatigué. Quand je descends alors vers Hugo shop, librairie papèterie café journaux rencontres discussions, à pas lents, chaque levée de jambe me coûte. Puis je me repose en lisant les mauvaises nouvelles, en attendant le jour heureux où une manchette m’informera que le TGV Paris Biarritz est arrivé à l’heure. 


Ce jour-là, un dimanche, ce fut hier, j’étais plus fatigué que d’ordinaire et en m’asseyant devant le journal Sud-Ouest, je constatais que la fatigue, une immense lassitude, m’immobilisait sur la chaise. Au point où je commençais à m’inquiéter. Une fatigue comme une vague qui vous submerge. Au point où j’ai d’abord téléphoné au numéro ICE (In case of emergency) et j’ai immédiatement reconnu la voix du numéro ICE. Depuis que nous parcourons ensemble le territoire de cette planète, c’était la première fois que j’appelais ICE. Donc forcément, ce fut un choc. Je me rappelle les temps lointains où le téléphone n’existait pas, où même une lettre inquiétait tant elles étaient rares. Un télégramme était un événement, et rarement une bonne nouvelle. Tout le village suivait le facteur qui marchait d’un pas plus rapide que d’ordinaire, le bras levé avec ce papier bleu, informant les habitants qu’il portait un télégramme et les fenêtres s’ouvraient, les portes s’entrebâillaient, les sourcils se levaient. Eh bien, un appel ICE qui n’a pas été utilisé pendant ces vingt-deux ans, provoque nécessairement un choc. Une grande inquiétude. Une angoisse folle.


ICE me répond j’arrive, mais en attendant il faut appeler les pompiers, le SAMU, SOS médecin. Ce fut miel d’entendre la gentillesse et la compétence avec lesquels mes appels furent accueillis. Avez-vous des douleurs ? Au bras, à la poitrine, aux jambes, au ventre ? Non. Pas de douleur. Je vais vous passer un médecin qui va vous interroger. On me conseille de rentrer chez moi, de m’allonger, les jambes sur un coussin et si les symptômes persistent, appelez SOS médecin. ICE me ramène chez moi, je m’allonge et elle appelle SOS médecin. Tous les spécialistes concluent à un malaise vagal. Un malaise vagal est un truc qui inquiète mais qui n’est pas grave et n’a aucune conséquence puisque je suis en train de vous raconter. Si, quand même, une conséquence. L’inquiétude, l’angoisse même, les larmes de soulagement, confirment la solidité du lien affectif qui relie le malaise vagal  et ICE. 


Cette expérience confirme mes hypothèses. La maladie provoque plus d’intérêt que toutes les autres formes d’expression ou d’engagement. Plus d’angoisse. Que des élus placent sur le même plan les victimes et les assassins, aucun SAMU ne sera appelé. Qu’un élu insulte une députée européenne sœur d’une victime et aucun téléphone ne se mettra à sonner. Qui appelle malaise vagal les ravages d’un AVC serait mal vu. Mais qu’un élu appelle « conflit » l’agression d’une organisation terroriste contre une société démocratique, personne n’appellera SOS médecin. 


Conclusion. Malaise vagal, SAMU, pompiers, SOS médecin. Blanchissage de la terreur d’ETA par Vincent Bru, Michel Veunac, Jean-René Etchegaray, Frédérique Espagnac, Max Brisson, n’angoisse pas grand monde.

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