Le
monde 10 janvier 2018. Une autre parole : un collectif de femmes dénonce
le puritanisme de la campagne metoo.
Dans
cet appel, le viol est condamné. Sans doute aussi le meurtre. Encore que le
meurtre passionnel pourrait être l’expression « d’une grande misère
sexuelle » comme de se frotter dans le métro. Mais tout le reste peut se
justifier. La drague insistante ou maladroite n’est pas un délit. Ni la galanterie
une agression machiste. Une campagne de délation qui a fait des victimes
innocentes : toucher un genou, tenter de voler un baiser, envoyer des
messages à connotation sexuelle. La liberté d’importuner est indispensable à la
liberté sexuelle.
Cette campagne est dénoncée comme puritaine.
Au nom d’un prétendu bien général, on emprunte les arguments de la protection
des femmes pour mieux les enchaîner. Crier contre les gestes équivoques, la
drague brutale, c’est la même chose que de couvrir les nus des tableaux, de
censurer les œuvres d’art. Cette fièvre de délation sert les pires
réactionnaires, la morale victorienne. Un climat de société totalitaire. Un
féminisme qui prend la forme d’une haine des hommes.
Tout
a été dit en réaction à ce texte. La sagesse me conseille le silence. Mais je sens que je vais parler. Tellement ça
m’énerve que je n’y tiens plus.
J’ai
lu ce texte attentivement. Il est dans la lignée de tous les textes condamnant
les avancées des droits des femmes, depuis le suffrage jusqu’au divorce, l’IVG,
la contraception. Toutes ces avancées ont retiré du pouvoir aux hommes et donné
du pouvoir supplémentaire aux femmes. Toutes ont rendu nos sociétés plus paisibles,
plus intéressantes. Dans ces campagnes, les femmes n’ont pas toujours été du côté
des droits des femmes. Beaucoup de femmes ont été contre le divorce, contre le
droit de vote, contre l’IVG, contre la contraception. L’égalité des sexes
suppose un pourcentage de réactionnaires aussi important chez les femmes que
les hommes. Il y a des Noirs et des Juifs racistes.
En
fin 19ème siècle, des femmes s’opposaient au droit de vote. Des femmes
s’alarmaient de ces femmes qui passent le matin à lire Malthus, l’après-midi à
Adam Smith, et leurs soirées des rapports parlementaires sur la balance
commerciale. (Blackman’s magazine, octobre 1861). L’auteur leur
demande de revenir sur terre : « descends, veux-tu, car l’amour est
dans la vallée » ». Une dame, dans the Catholic Bulletin (1901) se plaint des suffragettes : « depuis
que les femmes réclament le droit de vote, les hommes ne se lèvent plus pour leur
céder la place. D’autres femmes interviennent contre les suffragettes : on
nous demande de détester les hommes, je ne veux pas les détester. Nous
voulons être protégées. Allez à la bibliothèque
nationale, vous y trouverez sans peine les ancêtres de Catherine Deneuve et d’Elizabeth
Lévy. (si vous êtes intéressé, voyez mon livre « Tu ne voteras point, éditions Atlantica).
Est-ce
si compliqué de penser le harcèlement comme la nostalgie d’un pouvoir qui
échappe ? Comme l’un des moyens privilégiés de freiner ou de remettre en
cause les droits nouveaux exercés par les femmes dans tous les domaines ? Des
rapports de pouvoir. De haut en bas. Vous avez entendu parler d’un chauffeur
agressant Theresa May, un garde du corps importuner Madame Merkel, un
conseiller envoyer des messages équivoques à Christine Lagarde ? En
revanche, des puissants qui importunent des stagiaires ou des femmes de chambre…
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