mardi 11 février 2014

vélorution

J’ai toujours milité pour le bonheur de l’humanité. J’ai manifesté, distribué des tracts, vendu des journaux révolutionnaires, cotisé, voté, discuté. Aujourd’hui, toujours attaché au progrès humain, je poursuis l’engagement d’une vie en appuyant sur les pédales.

J’étais cycliste révolutionnaire, je suis devenu cycliste réformiste. Quand je militais pour la prise du Palais d’Hiver, le vélo était un instrument de lutte pour me transporter d’une réunion à une autre.  Aujourd’hui, il est témoin d’un engagement poursuivi. Il brandit mon vote à gauche. Chaque mètre parcouru me rapproche d’une société plus juste, plus solidaire, plus créatrice, plus apte aux compromis et au dialogue, plus constructrice de logements sociaux et de pistes cyclables. Chaque coup de pédale condamne les égoïsmes craintifs, les exclusions, le chauvinisme, les boucliers fiscaux pour ceux qui éclatent en sanglots dans le cabinet du notaire quand ils apprennent la somme à payer pour transmettre leur patrimoine à leurs enfants.

La droite déteste les pistes cyclables. Elle en construit parfois, obligée. Comme de Gaulle et Churchill ont mis en place l’État providence. Obligés. Mais quand la sécurité sociale protège et les pistes cyclables purifient, la droite condamne les profiteurs et se moque d’un urbanisme durable. J’éprouve jusqu’à la selle, jusqu’au guidon, les tensions qui s’installent quand la droite est au pouvoir. Quand ses idées dominent, l’arrogance des puissants n’a plus de limites. C’est la loi de la jungle, la loi du plus fort. Un piéton est moins fort qu’une moto, un cycliste moins fort qu’une voiture, un 4X4 plus puissant qu’une deux chevaux. Les voitures bousculent, me coupent la route, ne respectent plus les priorités et quand je proteste, le chauffeur me crie « on a gagné ». Ou bien : « travaille davantage, tu pourras t’acheter une Land Rover ».


Dans les grands moyens d’information se généralisent les justifications du droit des puissants. J’entends partout « les cyclistes doivent faire attention aux voitures ». C’est le monde à l’envers. Dans une société apaisée, il me semble que ce sont les voitures qui doivent faire attention aux cyclistes. Les parents font attention aux enfants parce qu’ils sont les plus faibles. Les lanceurs de poids font attention aux crânes parce que les boules sont plus résistantes que les têtes. Mais maintenant, les victimes sont responsables. Elles ne travaillent pas assez. Les cyclistes doivent faire attention comme les femmes doivent faire attention à leur toilette pour ne pas risquer le harcèlement ou le viol. Quand la droite domine, nous revenons aux temps anciens où l’homme était un loup pour l’homme. 

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