mardi 31 mars 2020

31/03/2020


Mardi 31 mars 2020.



Multirécidiviste. Je me refuse à faire la liste de tous les maux qui me frappent et dont la preuve répétée est la longueur des listes des médicaments sur les ordonnances qui exigent pour être photocopiées plusieurs feuillets. Ça m’avancerait à quoi ? Par les temps qui courent, qui échappe aux malheurs, maladies, afflictions, ruptures sentimentales ou d’anévrisme ? Sans compter les coups de vent, les voitures qui vous éclaboussent, le petit dernier qui a été malpoli avec la maîtresse sur son écran parce que de toute façon, comment voulez-vous qu’elle vous punisse virtuellement cognitivement et rien n’empêche que le responsable soit le bug. Vous pensez bien madame, que jamais je ne vous aurais dit MDR ou LOL.

Non seulement, les malheurs du monde n’ont pas disparu, mais ils se sont acidifiés avec le coronavirus. Les désagréments quotidiens s’étaient normalisés. Ainsi, mordant dans une baguette trop cuite, la prothèse se brise, un incident familier aux porteurs de prothèses plus nombreux depuis que le remboursement est assuré. En temps normal, Bernard Palissy enfourne la prothèse dans son four, la recolle grâce au modèle 3D et dans la journée, vous récupérez l’objet d’art. Aujourd’hui avec le coronavirus qui frappe également le Prince Charles et l’émigré afghan, Bernard Palissy refuse de travailler sans  masque et de toutes les manières, les ateliers de poteries et porcelaine ne sont pas considérés comme des lieux de première nécessité. Des fonctionnaires vous posent la question : Pourquoi pas Dior et Chanel ? Voici l’inconvénient de la démocratisation du luxe. Si tous les robinets sont en or massif,  chaque plombier devra obtenir un CAP de joaillerie.

Maintenant, il suffit de répéter une question pour qu’on vous appareille les oreilles. Comment vous appelez-vous? Uachtaran na hEreann ? Ioulia Timochenko ?  Vous n’avez pas compris du premier coup ? Ordonnance d’appareillage. Vous augmentez le son de la télé ? Appareil. T’as d’beaux yeux dit Jean Gabin à Michèle Morgan et Afflelou lui offre deux montures, plus une gratuite.

Plus les hanches, les dyalises, les scanners, les prises de sang, qui tous les jours raccourcissent le temps du jour et rallongent le confinement en EHPAD.

Sans compter non plus les ongles qui doivent être taillés sous peine de déchirer la chair des partenaires, les cheveux raccourcis pour moins dissimuler les yeux et les oreilles. Cabinets de pédicure, salons de coiffure, Toutes ces boutiques qui sont fermées, jugées non indispensables. Les semelles qui grincent, les matelots qui chantent. Jeanne Calment serait courtisée par Edgar Morin et la Dame aux Camélias recevrait des bouquets de fleurs d’Alain Delon.

Encore un effort et il ne restera du monde que quelques faits divers et des pages entières de notices nécrologiques.

lundi 30 mars 2020

lundi 30/03/2020


lundi.30/03/2020 Si j’avais su



Tant qu’une cellule nerveuse lance un influx dans le bras qui aboutit aux doigts de la main dont la frappe dessine des mots sur un écran illuminé par un courant électrique fourni par des équipes de salariés d’EDF infusant un câble d’un grande finesse, le monde ne peut pas s’arrêter de tourner.

Chaque maillon de cette chaîne qui a pris des millions d’années pour se construire est d’une grande fragilité. Un brin de fil électrique se rouille, un influx se bloque, un plomb fond, le compteur se relève, un fusible saute, une prise se déprise, un bug se croque-en-jambe, un doigt se paralyse, une douleur pique le nerf, tout s’interrompt.

Le miracle à chaque instant renouvelé est la remise en état de marche de cet ensemble complexe. Personne ne se pose plus de question sur ce fonctionnement. La terre tourne et la pluie l’arrose. Or, au lieu de se féliciter à chaque chaland qui passe de la bonne température du café servi par un barman souriant, une bonne partie des mots que se dessinent sur l’écran, qui se bousculent dans les écouteurs, qui s’impriment sur les fibres des arbres, sont des mots de regret, de complainte, des mots qui disent : « si j’avais su ».

Par exemple. Si j’avais su, moi personnellement, que l’invention du moteur à explosion et de la roue à chambre à air allait tuer des dizaines de millions de personnes sur les routes, sans compter les millions de mort par oxyde de carbone, est-ce que je n’aurais pas tout fait pour arrêter la production de ces armes de mort ? Si j’avais su que la poudre à canon et le neutron allaient  tuer des millions de personnes, est-ce que je n’aurais pas manifesté pour l’interdiction de ces produits ? La liste est infinie de ces produits meurtriers, glyphosates et magrets de canard.

Dire si j’avais su est une expression qui ne sert à rien. Puisque c’est passé, le mal est fait. Il vaut mieux désormais chercher autour de nous les nuisances que nous pouvons encore éradiquer.

C’est le contraire qui se passe. Le concert politique reproche aux responsables de ne pas avoir su ou tout en sachant de ne pas avoir diffusé se connaissances. Le nombre de gens qui savaient et qui n’ont rien dit de leur science est impressionnant Naturellement, prenons en compte que tous savaient mais que tous ne savaient pas la même chose. S’ils parlaient tous ensemble, le peuple aurait du mal à se faire une raison.

Pourquoi voulez-vous que celui qui sait cache ce qu’il sait alors que s’il dit qu’il le sait, il est célébré comme un sachant sachant sacher, et trouve ainsi une gloire parfois durable. Voyez Galilée et Copernic.

Moi personnellement, quand je sais quelque chose, je diffuse ma connaissance par tous les moyens dont je dispose et bon sang, que ça fait du bien d’entendre une voix murmurer : « il le savait, et il l’a dit, mais personne n’a voulu l’écouter ».

Je ne crois pas une seconde qu’une personne retient ce qu’elle sait. Tout le monde sait donc ce qu’il doit savoir. Personne n’a le droit de dire  « je ne savais pas ».

vendredi 27 mars 2020

27/03/2020


Vendredi 27 mars 20

Vendredi c’est la veille du week-end donc nous pourrons prendre la voiture et rejoindre une maison à la campagne. Non ? Alors à quoi sert un week-end qui ressemble à la semaine ? Le confinement de fin de semaine ressemble au confinement de la semaine comme le duc de Bordeaux ressemble à son frère, comme deux gouttes d’eau.

Il parait que ce qui inquiète le plus est le jour d’après. Mais si nous avons tenu le jour d’avant, pourquoi ne tiendrions-nous pas le jour d’après ? Il suffira le jour d’après de se rappeler comment nous avons tenu le jour d’avant pour se rendre compte qu’il n’est pas plus difficile de tenir le jour d’après que le jour d’avant. Le plus dur, finalement, c’est le jour d’aujourd’hui, car rien ne prouve qu’il sera aussi facile que le jour d’avant et moins dur que le jour d’après.

Une manière assez simple de passer la journée est de vérifier la concordance entre votre horloge biologique et l’horloge informatique. Vous lisez un livre. Vous avez commencé à lire   à 10h.45. Après avoir lu deux ou trois pages, Vous posez le livre. Vous dites,  à mon avis, il est maintenant 11 heures moins cinq. Vous vérifiez. Il est onze heures moins dix. Votre horloge biologique ne correspond pas à l’horloge mécanique. Ne vous découragez pas. Reprenez la lecture. Vérifiez. Vous constaterez qu’à force de répétition, les deux horloges vont peu à peu se rapprocher. En vous entraînant, vous pourrez vous débarrasser de toutes les horloges mécaniques ou informatiques ou électriques qui encombrent votre logement. Vous serez capable de dire à chaque instant l’heure exacte. Ça en jette. Un passant vous demande l’heure. Vous répondez du tac au tac sans remonter le manche de chemise qui désormais ne cache plus la montre absente. Naturellement, le passant se méfie. Comment savez-vous, vous n’avez pas consulté votre montre-bracelet ? Vous lui répondez, sans vous démonter : quel est le sens de votre question ? Vouliez-vous en me questionnant savoir l’heure ou savoir si j’ai une montre ? Le passant rougit de confusion. Il ne sait plus maintenant pourquoi il a posé la question.

Maintenant qu’horloge biologique et horloge quantique coïncident, vous êtes le maître du temps. Il suffit que vous disiez quatorze heures vingt pour qu’il soit quatorze heures vingt. L’inconvénient est que le jeu qui consiste à vérifier la concordance entre les deux horloges vous est désormais interdit. Comme cette malédiction assez familière qui consiste à vous donner le numéro gagnant du loto avant qu’il sorte. D’accord, vous êtes fabuleusement riche, mais privé de cette montée d’adrénaline qui accompagne chaque chiffre sortant. Et bien, vous ne vous posez pas la question de l’heure puisqu’elle est désormais inscrite dans vos neurones.

Il faut désormais trouver d’autres moyens de passer la journée.

jeudi 26 mars 2020

26 mars 2020


26 mars 20

Radio, émission spéciale sur le coronavirus. Hier, le journal de vingt heures entièrement consacré au Coronavirus. Les chaînes d’information et de débat couvrent le même sujet. Le professeur Raoult a-t-il inventé l’arme suprême ? Cet envahissement total de tout l’environnement par un sujet unique est la preuve que nous sommes en guerre. On peut discuter l’emploi du mot. La guerre, c’est l’élimination des adversaires par la violence. On utilise le mot pour le terrorisme (nous sommes en guerre contre le terrorisme). Pour la drogue : « nous sommes en guerre contre la drogue). Mais si la guerre est l’élimination de tous les sujets sauf elle-même, alors nous sommes en guerre.

En Irlande du Nord, jusqu’au cessez-le-feu, tout était simple. La violence armée, les attentats, les crimes, chassaient tous les autres sujets. Le nombre de morts, les arrestations, les justifications, les condamnations, les prisons spéciales, les cours de justice hors norme, les demandes de libération, les grèves de la faim dans les prisons, occupaient tout l’espace. Chômage, santé, écoles, logements, étaient balayées sous le tapis.

Le confinement n’est donc pas seulement un enfermement physique. Il est aussi enfermement intellectuel. Nous sommes enfermés en un seul lieu avec un seul sujet. Comment vas-tu ? sonne comme un coup de clairon. De la fenêtre, on applaudit les troupes qui passent. Les cercueils marquent les défaites. L’arrière tiendra-t-il ? Les civils sauront-ils fabriquer les armes dont nos soldats ont besoin ?

Comment s’échapper ? Le diable au corps en montre l’impossibilité. Une relation avec une femme de soldat est trahison suprême, et cette trahison est punie par la mort. Un lycéen est attiré par l’épouse d’un infirmier. Vous voulez que je vous raconte la suite ?

S’il est impossible d’échapper à ce sujet unique, allons voir dans d’autres situations d’enfermement comme les enfermés dans un seul lieu, un seul sujet, gouvernaient leur temps. S’ils disposaient d’un calendrier à feuilles volantes et connaissaient la date de leur libération, chaque jour ils décollaient une feuille et se réjouissaient de l’amaigrissement du bloc. Sans calendrier, ils gravaient sur le mur des bâtons qui s’accumulaient en semaines, en mois, en années.

Et nous ? Impossible d’échapper au sujet unique. Allo, combien de masques ? Un examen ou pas d’examen ? Jusqu’ici tout va bien. Dépister tout le monde ? Annulés les Jeux Olympiques. Annulée la visite des enfants. Depuis combien de temps tu n’as pas ri ? Des psys nous donnent des recettes pour survivre.

Vous sautez par la fenêtre, vous tombez sur un policier qui vous oblige à rentrer par la porte. Non, décidément, la seule issue est d’admettre que nous sommes dans un merdier qui va durer encore quelques semaines. Ce n’est pas à coups de morceaux de musique, de gymnastique sur tapis, de séries policières, de lectures absorbantes, que nous allons en sortir. La seule solution : admettre que nous sommes dans un cloaque. Il ne nous reste qu’à maintenir la bouche au-dessus du bourbier. Et demander aux voisins de ne pas faire de vagues.

mercredi 25 mars 2020

25 mars 2020


25 mars 20. Encore au moins quatre semaines de confinement. Si vous connaissiez des êtres intelligents vivant dans une autre planète et que vous deviez leur expliquer ce que signifie ce mot, vous leur diriez quoi ? Que d’habitude, les enfants sont envoyés dans des établissements scolaires pour apprendre à lire et à écrire, peut-être même à raisonner et à penser, à calculer et à comprendre d’autres langues que la leur. Que les professionnels qui assurent cette formation se nomment enseignants. Vous leur expliquerez que ces établissement sont fermés parce qu’un virus dangereux se promène dans les rues et les campagnes et que la manière la plus efficace de lutter contre ce virus est de limiter au maximum les rencontres, les sorties, les manifestations. Donc, sur cette planète terre, les spectacles, les défilés, les rencontres sportives, les manifestations pour et les manifestations contre, les cérémonies religieuses sont interdites et à la place de ces événements festifs, vous avez des images animées qui leur ressemblent mais ne les remplacent pas. Les personnes qui ne peuvent pas être confinées sont celles qui fournissent les produits de première nécessité : des abris contre la pluie et le froid, les moyens de transport pour se déplacer, des légumes et des viandes pour se sustenter, des personnels médicaux pour soigner les malades, surtout en cas d’épidémie. Et les journalistes radio et télé qui nous prouvent en parlant très vite que le monde continue de tourner.

Faut-il en conclure que grâce à ce virus, s’établit une hiérarchie des urgences et des nécessités ? Sont nécessaires les paysans et agriculteurs, pour que les calories produites permettent le renouvellement de la force de travail. Nécessaires les enseignants qui fournissent les outils indispensables pour la vie en société et le travail. Nécessaires ceux qui bâtissent et transportent. Nécessaires ceux qui soignent. Nécessaires ceux qui parlent dans un micro. Mais tous ceux que le confinement enferme pendant de longues semaines découvrent peut-être qu’ils ne sont pas nécessaires. Je prends un exemple au hasard. Je suis prof de fac retraité. Pendant une quarantaine d’années, j’ai réussi à persuader un nombre de personnes suffisant de me payer un salaire honnête, des voyages à l’étranger, des rencontres et des séminaires, sur les relations entre religion et guerre communautaires en Irlande du Nord. Le confinement m’indique que le monde continue de tourner sans ce travail de recherche. Et me demandent les habitants de la planète lointaine, y at-il d’autres métiers ou activités qui se révèlent non indispensables  à l’occasion de cette crise ? Hélas oui, des millions. Ne sont pas vraiment nécessaires les curés, les rabbins, les pasteurs, les chanteurs, les poètes, les comédiens, les petits commerçants, les musiciens, les greffiers, les administrateurs de bien, les banquiers, les soldats, les gourous. Tous confinés. Et on remarquera à l’occasion de ce confinement que ceux dont le travail est le plus nécessaire sont les plus mal payés.

Le confinement modifie les  hiérarchies. Sur notre terre, les applaudissements sont généralement réservés aux vedettes sportives, aux chanteurs. Voici que les confinés ouvrent les fenêtres pour applaudir le personnel soignant. Demain ils applaudiront les éboueurs, les pompiers, les maçons et les professeurs des écoles.

Pendant ce temps sont confinés des millions de personnes qui se rendent compte que le monde peut se passer d’eux. Ce n’est pas le confinement qui les rend tristes ou moroses ou de mauvaise humeur, c’est de se rendre compte que le monde peut se passer d’eux. Le peintre continue de se rendre dans son atelier, le pianiste fait ses gammes, le comédien répète son rôle.  En apesanteur.

Et demain, quand tout sera redevenu normal, tous ces gens qui ne servent à rien devront reconquérir leur place dans la société, trouver des arguments pour que les producteurs les entretiennent à nouveau et tout ce qui a mis des siècles à se mettre en place devra  à nouveau être retrouvé.

mardi 24 mars 2020

24 mars 2020


24 mars 2020.



Le confinement dure, se durcit, le nombre de malades et de morts grimpe. Selon les conditions matérielles, affectives, morales, les conséquences sont plus ou moins bien ressenties. Une semaine, ça va. Deux semaines, bonjour les dégâts. Ce n’est pas la même chose d’être confiné dans un logement vaste et confortable, avec des enfants qui courent dans le grenier ou confiné dans studio de vingt mètres carrés. Je ne veux pas dire ce qui me manque, car à côté de toutes les catastrophes qui m’entourent, j’aurais honte même de dérouler les petites choses de la vie qui aident à vivre mais n’aident pas à mourir. Un jour, je le dirai. Une balade jusqu’au marchand de journaux et lecture à la terrasse ensoleillée, cinq ou six personnes chaque jour qui vous reconnaissent et disent bonjour, comme ça va ? Des amis des membres de la famille qui viennent échanger quelques idées. Ça ne semblait rien, mais ça meublait. Le téléphone ou internet ne dispose pas du poids des corps, de la densité des chairs. Ça ne remplace pas.

Jusqu’ici, collectivement, j’ai eu l’impression que tout le monde attend que ça se passe pour que tout reprenne comme avant. Les écoliers reprennent le chemin de l’école, les examens et les concours trient les futures carrières, les boutiques rouvrent, les voyages reprennent avec leurs images et leurs souvenirs. Les embouteillages qui nous irritaient tant aux ronds-points sont salués par des applaudissements. Les apéros entre amis. Les visites des enfants et des petits enfants. Et puis en politique, les candidats préparent un nouveau premier tour, se regroupent, répartissent les postes. Les criailleries et les insultes reprennent. Le coronavirus est un mauvais souvenir.

Peut-être. Ou peut-être une vague de nouvelles réflexions sur les modes d’organisation de nos sociétés.  Je me désolerais que localement, la campagne pour les municipales reprenne comme s’il ne s’était rien passé d’autre qu’une parenthèse lourde. N’y a-t-il pas dans toutes les bonnes volontés de la ville suffisamment d’idées et d’engagements pour imaginer une autre ville ? Il n’est pas interdit de rêver.

lundi 23 mars 2020

23 mars


23 mars 2020

La vie politique s’est arrêtée. Quand les partis politiques s’expriment, c’est pour réclamer plus ou moins ou davantage ou regretter ou pour condamner. Un député tout frais sorti de l’ENA demande que le vaccin découvert par un médecin marseillais soit impérativement essayé sur tout le monde. Les médecins discutent entre eux. Le député est sûr. Il utilise les mêmes gimmicks que la publicité pour une chaine de garage : « c’est sûr hein ? Oui c’est sûr. Demain, tout le monde aura oublié ses déclarations, mais si le vaccin marche, il dira : j’ai recommandé ce vaccin avant tout le monde. Il sera peut-être élu. Donald Trump déclare qu’il sait quoi faire et demain, il sera peut-être réélu.

La campagne électorale s’est arrêtée. C’est le grand confinement. Des centaines de milliers de citadins ont entassé leur famille dans un 4x4  hybride et après avoir une dernière fois applaudi les infirmiers de leur balcon se sont précipités sur les routes, ou peut-être entassés dans les trains où ils ont multiplié  en un seul voyage le nombre d’infectés de leur région. Mais dès qu’ils seront arrivés, ils sortiront les vélos, les skates, partiront le long des plages, Voyons, il n’y a personne. Et je vous fiche mon billet qu’ils voteront LR aux municipales, ou peut-être insoumis, contre un pouvoir qui n’avait rien prévu. Pendant ce temps, des personnes modestes, pas bavardes, pas râleuses, organisent des centres de réceptions pour les sans-abris, courent après les masques, et en trouvent au lieu de dénoncer la pénurie, courent après les bénévoles et en trouvent pour décharger le travail des soignants. Et puis il y a les élus qui demandent qu’on ferme les centres d’accueil. Surtout, comme le dit élégamment le putatif adjoint aux affaires sociales de Maïder Arosteguy, que la plupart de ces miséreux ne sont pas d’ici.

Je fais un pari : je ne pourrai jamais vérifier. Je parie que cette partie de la population qui refuse les règles du confinement, qui aggrave la situation des hôpitaux et des soignants, la partie de la population qui dans chaque crise révèle son égoïsme ou son étroitesse d’esprit, que cette partie de la population vote pour les extrêmes, insoumis ou union des droites. Ou ne vote pas du tout.

Des crises il y en eût, guerres, épidémies. Quand ces crises ont produit des extrêmes, nazisme, communisme ce fut pour le grand malheur des peuples. Quand elles ont produit des compromis, des négociations, des réformes, ce fut le New Deal aux États-Unis, l’état providence au Royaume-Uni et en France, les réformes sociales dans l’Europe du Nord. La crise actuelle nous place devant un choix de même nature. D’un côté, Trump, Boris Johnson, Poutine, Bolsonaro, Orban, ou encore, Le Pen plus Wauquiez. Peut-être les solutions à la Chavez, pas terrible (je vous recommande la lecture de La fille de l’Espagnole). Et de l’autre, un centre droit et gauche réformiste, Merkel, Macron, Sanchez, Leo Varakar, Tsipras…Vous avez le choix. Et vous avez le temps. Le confinement ça peut servir à réfléchir.

dimanche 22 mars 2020

pas de confiment intellectuel


À quoi bon répéter ce qui est mille fois dit sur les écrans, les journaux, les tablettes, les radios. Je cherche des mots et des idées que je n’ai pas encore entendus et je n’en trouve pas. À ce moment de mon réveil, je risque le confinement intellectuel. Est-il plus grave que le confinement physique ? Le confinement intellectuel, c’est l’idée qu’il ne vaut pas la peine de sortir de notre univers mental puisque rien de neuf n’apparait. Nous sommes menacés par un virus sans programme, sans idéologie, sans chef. Des gilets jaunes biologiques, qui reviennent régulièrement sur les ronds-points et emmerdent tout le monde sans hiérarchie.

Quand la maison brûle, on célèbre les pompiers. Quand la peste frappe, le cours des blouses blanches grimpe. On applaudit à vingt heures le personnel médical. En septembre prochain,  peut-être applaudira-t-on les enseignants à la porte des écoles.

Tout ça pour dire quoi ? Autant il faut prendre au sérieux, en responsabilité, l’épidémie qui nous frappe, en obéissant sagement aux médecins qui savent, il n’y a aucune raison que cette épidémie nous sidère, envahisse tout. Le coronavirus frappe les poumons, les voies rescisoires. Il n’y a aucune raison qu’il frappe aussi les neurones, l’appareil compliqué qui nous permet de réfléchir.

Ce n’est pas sous-estimer le danger que de refuser qu’il envahisse d’autres domaines que le sien. Quand, pendant une campagne électorale, le journaliste de 20 heures, d’une voix grave, étranglée par l’émotion, les yeux dans les yeux, disait « la France a peur », à la suite d’un crime particulièrement crapuleux, il contribuait à paralyser les esprits et permettait aux fantômes du FN d’irriguer les esprits.

Aujourd’hui, confiné ou pas, je mène campagne contre un danger particulier à Biarritz : le danger qu’arrive à la mairie une droite extrême, rabougrie, xénophobe. Ce danger n’a pas disparu avec le coronavirus. Il  porte un nom : Maider Arosteguy. Mais les amis de cette candidate genre union des droites me somment de me taire : l’heure est à la mobilisation générale contre le coronavirus, silence dans les cerveaux, arrêtez de réfléchir.

Ils veulent m’empêcher de penser. Avec votre permission et sans la leur, je continuerai mon combat.

Parce que le sommeil de la raison engendre des monstres.

jeudi 19 mars 2020

une élue de la république


Après publication du post de Jean-Françouis Ernst, Maïder Arosteguy a vivement réagi. Contre des opinions antisémites ? Pas du tout. Extrêmement bizarre. Des soutiens de Maïder Arosteguy (Alain Noguès, Jean-François Ernst) expriment sur la toile des opinions clairement antisémites. Je fais connaître ces opinions. J’engage avec la LICRA une plainte pour insultes antisémites. Et Madame Arosteguy, au lieu de soutenir cette procédure, m’accuse de la « harceler », a déjà déposé une main courante contre moi et maintenant m’annonce qu’elle va « porter plainte contre mes agissements ».



                       Elle porte plainte contre les victimes des insultes antisémites, parce que ces victimes refusent de se taire. Si j’avais accepté les insultes sans réagir, Maïder Arosteguy ne porterait pas plainte contre moi.

                       J’ai appris que racisme et xénophobie ne doivent jamais rester sans réponse. Quand Maïder Arosteguy stigmatise les femmes voilées, cette stigmatisation doit être dénoncée. Quand elle banalise les camps nazis, cette banalisation de la shoah doit être dénoncée. Quand ses soutiens expriment des opinions antisémites, leurs opinions doivent être dénoncées.



                       Les racistes du monde entier, quand les antiracistes les dénoncent, crient au « harcèlement ».



                       Mais qu’une élue de la République, membre d’un parti républicain, se sente elle aussi harcelée, est plus surprenant.

confinement J+3


Que voulez-vous que j’ajoute sur le confinement et sur le coronavirus ? À situation inédite, je ne peux ajouter qu’une angoisse sourde qui de temps en temps me noue l’estomac. Je pensais finir ma vie tranquillement dans une chambre d’hôpital et me voilà menacé par un connard de virus. Les amis, la famille m’appellent. Les amis, pas trop, parce qu’ils ont mon âge et qu’ils font partie de la population à risque, car tous, après une certaine date de péremption ont des pathologies qui, si elles étaient mises en contact avec ce con de virus, auraient des conséquences foudroyantes. Bon je sais très bien qu’un jour ou l’autre, il faut passer sous une voiture ou cesser de respirer. L’inconvénient de la crise actuelle est qu’elle prive les morts et leur famille de la cérémonie de l’enterrement, que chacun imagine glorieuse et chaleureuse. Et voilà que les morts n’ont pas le droit de sortir et leur famille n’ont pas le droit d’entrer. Comme je ne suis pas croyant, il n’y aura pas de curé, ni de rabbin ni d’imam ni de pasteur ça fait du monde en moins. Et les rassemblements étant interdits, il y aura un ou deux croquemorts et la famille restreinte, en respectant les distances.

Nous sommes entourés de nouvelles assourdissantes et je me rappelle à la fin de la Seconde Guerre mondiale,  nous plantions des drapeaux russes si nous étions communistes, américains si nous étions antisoviétiques,  français si nous étions patriotes. Ici, la carte est télévisuelle. Une première carte pour la météo, où sont indiqués nuages, vents et pluies. Une deuxième carte du monde où la journaliste météo se retire, il ne reste plus qu’une voix off qui indique les zones les plus touchées, les moins affectées. En vérité, tout ça reste lointain. Ce qui est proche, c’est l’annonce d’un proche mis en quarantaine, d’une connaissance hospitalisée, d’un membre de la famille déclaré infecté. Ce qui est proche, c’est le coup de téléphone de l’hôpital qui vous annonce que l’examen prévu est annulé. Ce qui est proche, c’est votre médecin traitant qui vous annonce une consultation par vidéo-conférence.

Et avec une grande régularité, les catastrophes font resurgir les haines nouvelles ou traditionnelles. Les Chinois qui ont commencé. Puis les Juifs. La faute à Soros, le Juif milliardaire. Et puis à Biarritz, un sympathisant de la candidate LR aux élections municipales qui dénonce « une certaine élite ou nomenklatura juive » donneuse de leçons à charge contre Maider. C’est signé Jean-Français Ernst, un supporter de Maider Arosteguy. Bon, il n’a quand même pas construit les camps de Buchenwald ou d’Auschwitz.

lundi 16 mars 2020

nous sommes en guerre


Il n’existe pas de barbarie sans discours sur la barbarie.  



Puisque nous sommes en guerre, les souvenirs de guerre remontent. La guerre réanime le meilleur et rallume le pire. Solidarité, patriotisme ou petits arrangements, collaborations. Indifférence aux malheurs des uns ou risques héroïques pour aider les personnes en difficulté.

Puisque nous sommes en guerre, examinons un peu les différentes réactions des candidats qui se présentent à notre suffrage pour les élections municipales.

Devant l’arrogance des puissants, certains ont accepté. (C’est aux actionnaires de décider nous disent Arosteguy et Saint-Cricq). Esprit de collaboration. D’autres ont su dire non. Esprit de résistance.

Dans la tourmente, certains ont su réagir avec célérité. La réunion électorale a modifié son ordre du jour pour permettre aux invités de Nathalie Motsch d’écouter le discours du président de la République et à Nathalie Motsch de détailler sa contribution en tant qu’élue. Chez Maider Arosteguy, la candidate a relégué l’important discours en fin de meeting et la réponse aux nouvelles urgences fut la lecture détaillée d’un programme devenu hors du temps.

Les temps de guerre nécessitent solidarité pour les plus faibles, les plus démunis. Didier et Géneviève Borotra qui soutiennent la candidature de Nathalie Motsch ont su imposer, contre les égoïsmes, la solidarité à l’égard des malades du Sida (« Chrétiens et Sida). Puis ont su imposer, contre les frilosités, le point d’accueil Zuekin. Maider Arosteguy s’apprête à s’allier avec Saint-Cricq qui demande la fermeture de Zuekin. La guerre réanime le meilleur et rallume le pire.  

Les barbaries des temps de guerre se préparent dans les insultes et les discours. Ils ne sont pas si affreux, les affreux, puisqu’ils n’ont quand même pas construit Buchenwald et Auschwitz. Derrière ces brèches s’engouffrent les insultes antisémites. Et encore une fois, le solidaire, le généreux Saint-Cricq, demande l’éloignement du point d’accueil. Comment ne pas faire le lien entre cette demande répétée et le fait que des barbares inspirés par ces discours viennent régulièrement maculer la serrure de Zuekin avec la merde de leur inhumanité ? Saint-Cricq aux affaires sociales comme adjoint à  Maider Arosteguy ?
Je souhaite avec passion que la population de Biarritz se ressaisisse, qu’elle trouve les moyens de se hisser au niveau des valeurs morales que nécessitent ces temps tourmentés. Que les politiques qui partagent ces valeurs sachent se réunir et inscrire notre ville dans une histoire dont nous n’aurons pas à rougir.

mardi 10 mars 2020

mieux vaut la maladie qu'une panne de réseau


Après l’orage, l’accès au réseau internet m’est interdit. Je ne sais pas pourquoi une panne de réseau me déprime davantage qu’un cancer du poumon. Pourquoi ? Sans doute pour une question de vanité. Un cancer du poumon, ça classe un homme, c’est trente ans de cigarettes, de pipe, de papier rizla, de mains fiévreuses roulant le tabac, une vie d’homme, de vrai. Les gens se découvrent devant un cancer du poumon, ils prennent un air inspiré, envoient des messages de sympathie. Ou entourent de silence respectueux.

Tandis qu’une panne de réseau vous enfonce dans l’anonymat d’une foule dépendante de la foudre, d’une fibre cassée, d’un fil brûlé, vous replace dans les six milliards de dépendants de l’éther  pour communiquer, dans la foule de ceux qui attendent l’oreille collée contre le haut-parleur ne quittez pas, une personne va vous répondre, tapez deux pour un renseignement commercial, trois pour une aide technique, et si vous dites notre nom, ils s’en fichent complétement, ah bon, vous êtes Einstein, monsieur ou madame, ne quittez pas, Dieu va vous répondre, vous êtes Jésus, vous êtes Lénine, vous êtes sœur Theresa, l’abbé Pierre, ne quittez pas, quel est notre numéro de fixe, votre date de naissance, votre numéro de contrat, votre code d’accès au septième ciel, Monsieur Therésa ou Madame Thérésa ? Adresse ? Un technicien va passer dans trois semaines, entre le cinq et le huit mars, de huit heures du matin à vingt heures le soir, non, nous n’avons pas d’autre créneau,  Pour la mise en croix, nous n’avons plus rien pour Pâques, il ne nous reste que la Pentecôte,  pour la prise du Palais d’Hiver, il ne nous reste que la fin du mois d’octobre et pour la prise de la Bastille, nous n’avons rien avant le 18 juillet.

La panne de réseau vous plonge dans la dépression de l’anonymat tandis qu’un solide cancer du poumon vous redonne une identité qui pâlit avec le temps qui passe.