lundi 28 janvier 2019

lutter contre la violence


Pour éviter de réfléchir, il vaut mieux oublier hier et ne pas penser à demain. Comme les nouvelles nous arrivent chaque jour, (un journal est un quotidien), les efforts pour assimiler la vague des informations risquent de mobiliser tous nos neurones.



La discussion sur les violences policières est soumise à cette pression. Le manifestant est blessé à l’œil, répondez monsieur le ministre. Aujourd’hui, tout de suite.



Pour introduire de la politique dans l’émotion, voici quelques idées.



Dans les pays démocratiques, (où se tiennent des élections régulières, où le droit de manifester et de donner une opinion est gravé dans le marbre de la constitution…), de manière récurrente des hommes et des femmes utilisent des moyens illégaux pour défendre leurs revendications. Ces moyens illégaux vont des émeutes urbaines jusqu’au recours à la lutte armée.



Alors fleurissent les explications les plus ahurissantes sur la légitimation de ces actes. Les transgressifs et leurs soutiens se reportent à des régimes sans droits, sans libertés individuelles et collectives pour justifier leurs actions. Ainsi le peuple se soulève comme les révoltés américains contre une occupation étrangère, comme les foules révolutionnaires contre une monarchie absolue, comme les colonisés contre le colonialisme.



Comment faire accepter des actions illégales ? En poussant l’état légitime à recourir à des actions illégales. Il faut taper, taper encore, piller, tuer éventuellement,  jusqu’à ce que l’état démocratique renonce à ses principes et se mette à ressembler à la caricature qu’en dessine les insurgés.



Les républicains irlandais légitimaient leurs actions en affirmant que rien n’avait changé depuis l’indépendance. Les colonialistes  britanniques occupaient une partie de l’Irlande, la guerre de libération devait continuer. Les guérilléros basques affirmaient que rien n’avait changé depuis la chute du franquisme. Action directe et Fraction armée Rouge tuaient et kidnappaient parce qu’il n’y avait aucune différence entre la dictature du capital et les dictatures fascistes.



Un état non démocratique ne s’embarrasse pas de principes pour lutter contre cette forme de terrorisme. Un état démocratique est plus démuni. Il doit respecter les lois, la justice, ne  pas enfermer sans jugement. Contre ces formes d’action, la tentation est grande de recourir à des modes de répression qui paraissent plus efficaces. Tous ces états, français, britanniques, espagnols, ont été ainsi tentés :   tribunaux d’exception et tortures en Irlande du Nord, recours à des éliminations sans procès, le GAL  et les tortures en Espagne…



Il faut alors affirmer un principe qui ne souffre pas d’exception. Si l’état renonce au droit et à la justice, s’il tend à ressembler au miroir que lui tendent les insurgés, les insurgés ont gagné. Chaque violation des droits donne raison à ceux qui la violent. Le massacre de Bloody Sunday, les tortures dans les prisons, le GAL, ont prolongé la terreur armée. Dans la lutte contre les soulèvements factieux, la seule arme efficace est la justice, la seule politique efficace est la démocratie.



Si des brutalités policières sont avérées, si l’emploi de certaines armes doit être revu, que les enquêtes de justice se mènent. C’est la condition pour que les cris d’état policier, à bas la répression résonnent aussi creux que le cri de la mouette.



Quant à ceux qui continuent à crier ainsi malgré les enquêtes de justice, il n’est pas inutile de rappeler que leur condamnation de la violence est limitée. Ils oublient les pillages des magasins, les ruines des petits commerçants, la dizaine de morts sur les ronds-points, les policiers blessés, les voitures incendiées.  Eux et leurs soutiens veulent nous faire croire à des émeutes paysannes, au banditisme social. Ils veulent nous faire croire qu’ils sont Robin des Bois, Cartouche, qu’ils ont pris la Bastille. Les résultats immédiats ont surtout précipité les faillites de petites entreprises et le licenciement de leurs salariés.



Il faut pourtant admettre que le résultat de leurs actions n’est pas nul. Une augmentation du SMIC de cent euros, de la vitesse automobile de dix kilomètres et un grand débat national sur la politique du gouvernement Macron qui renforce une audience qui s’affaiblissait. Malgré les efforts hebdomadaires et les discours répétées des révolutionnaires bondissants, le régime a bien résisté et s’en sort par le haut.








vendredi 18 janvier 2019

gilet étoilé


Gilet étoilé

 

            Il avait promis de construire un mur au sud des Etats-Unis. Ce mur serait financé par le voisin mexicain. Cinq ou six milliards. Le voisin refuse. Le gilet étoilé se met en colère. Il me faut ce mur, il me faut ces cinq milliards. Comme le voisin refuse, il demande aux élus de voter la subvention. Les élus refusent. Ils disent que le mur ne servira à rien.

 

            Le gilet étoilé, qui avait sur d’autres sujets montré des signes d’irritation, devient fou de rage. Il se met à tourner jour après sur le rond-point du Capitole, à Washington. Il empêche la circulation des voitures. Il crie qu’il représente le peuple alors que les élus ne représentent pas le peuple. Il demande la dissolution des assemblées qui ne représentent pas le peuple.

 

            Tous les jours, en tournant autour du rond-point du Capitole, le gilet étoilé insulte les élus qui ne représentent pas le peuple. Il les traite de tous les noms. Il dit que le peuple américain, qui a déjà fait une révolution en 1776, montrera comment on renverse un pouvoir injuste. Le Gilet étoilé est particulièrement en colère contre les moyens d’information qui d’après leurs journalistes, ne voient qu’un seul gilet étoilé sur le rond-point.

 

            Les élus qui ne représentent pas le peuple ne cèdent pas. Alors le Gilet étoilé manifeste partout où des bâtiments officiels abritent des élus. Il détruit les distributeurs de banque et interrompt le versement des salaires de tous ceux qui travaillent pour les élus. Des milliers d’entreprises font faillite. Comme les cuisiniers de la Maison Blanche  ne travaillent plus, n’étant plus payés, le Gilet étoilé déjeune avec des hamburgers et des frites sur le rond-point. Il lève le bras chaque fois qu’une voiture passe et demande que les conducteurs l’encouragent en klaxonnant.

 

            Le Gilet étoilé en est je crois bien à l’acte 24 de sa campagne. Tous les jours il revient sur le rond-point. Il reçoit les encouragements de Salvini, de Mélenchon, d’Orban, de Marine Le Pen.

 

            Depuis que le Gilet étoilé occupe la Maison Blanche, les rapports de force ont remplacé les négociations. Les adversaires ne font plus partie de la solution, ils doivent être écartés. On ne discute pas avec eux. Il paraît que les élus organisent un vaste débat sur la nécessité ou l’inutilité du mur. Le Gilet étoile n’y participera pas. C’est un vaste enfumage, dit-il. Je ne demande qu’une seule chose, les cinq milliards pour construire le mur.

 

           

gilet étoilé

jeudi 17 janvier 2019

content pas content


Content pas content

 

            Décembre 2018. Un groupe de quelques dizaines de milliers de personnes mécontentes d’une augmentation de la taxe sur le diesel et d’une diminution de la vitesse sur les routes départementales ont revêtu un gilet de sécurité jaune dont l’obligation avait failli créer des émeutes en 2008 mais le mouvement avait avorté car les conducteurs n’étant pas encore obligés de posséder un gilet jaune dans leur coffre n’avaient pas de gilets jaunes pour manifester et il fallut dix ans pour que l’obligation du gilet jaune puisse enfin déboucher sur des manifestations de masse.

 

            Première observation : les deux premières revendications des gilets jaunes étaient contraires à l’intérêt général. Les mesures contre lesquelles ils manifestaient étaient des mesures de sécurité routière et de santé publique. Moins de mort, moins de carbone. On peut tourner les choses dans tous les sens. Les gilets jaunes ont manifesté pour plus de carbone et plus de morts sur les routes. Ils n’ont pas manifesté pour la construction de logements sociaux ni pour l’augmentation du salaire minimum, ni pour l’augmentation des minimums retraites, ni pour la construction d’une école, ni pour la paix au Moyen Orient.

 

            A ce sujet d’ailleurs, je demande immédiatement que les deux cent trente personnes qui sont vivantes aujourd’hui alors qu’elles seraient mortes sans la diminution de la vitesse, se manifestent auprès des mairies et des préfectures afin de se faire enregistrer comme « survivants ». Les préfectures leur délivreront un badge de « survivant » qu’elles auront le droit de porter. Elles auront également le droit de donner des cours de sécurité routière dans les auto-écoles et dans les maternelles. Je demande également que les quatre-vingt-trois personnes qui ont évité le cancer du poumon grâce à la diminution du carbone reçoivent elles aussi un badge de « miraculés » qui devra être homologué par une commission de médecins, les mêmes qui homologuent les guérisons de Lourdes.

 

            A ces premières revendications s’ajoutèrent d’autres demandes diverses, la réduction des impôts et la démission du président de la République. Un ensemble hétéroclite qui fut soutenu par les partis d’opposition. Les Insoumis, les LR, les RN, qui naviguaient péniblement par calme plat ont tendu la drisse pour que cette brise inattendue gonflent leurs voiles en berne.

 

            Les gilets jaunes ont été rejoints par des manifestants rouges et bruns qui ont introduit dans le sabbat social une violence extrême. Barricades, pillages, incendies. Sans compter les agressions contre les forces de l’ordre et les journalistes. Ici se place un épisode assez curieux. Des syndicats, des économistes réformistes, des chercheurs progressistes, avaient mis en garde le gouvernement Macron contre un certain déséquilibre de sa politique. Ils ne furent pas écoutés. Alors que des gilets jaunes vrillèrent les tampons des responsables en cassant. Encore une fois, on peut retourner les choses dans tous les sens. Si les gilets jaunes avaient manifesté aussi pacifiquement que les syndicats, les associations écologistes, les mouvements féministes, rien n’aurait bougé. Ce qui a fait bouger les lignes fut la violence extrême et la transgression des lois républicaines. Actes soutenus par près de la moitié de la population. Si l’on avait proposé il y trois mois les mesures du plan d’urgence, on nous aurait expliqué doctement que ces mesures étaient impossibles.

 

            Aujourd’hui le gouvernement tente de reprendre la main avec le « grand débat » qui a l’immense avantage de remettre au centre à la fois les gilets jaunes qui devront clarifier leurs revendications et les mettre en regard d’autres urgences. Et les citoyens engagés qui étaient repoussés dans l’ombre par un tsunami médiatique.

 

            Espérons que ça va marcher. Participons aux débats, comme les marcheurs du comité de Biarritz de la REM, heureux de pouvoir discuter dans un climat de liberté.

 

            Mais reconnaissons que la difficulté est grande. Trente personnes qui discutent pendant trois heures des solutions souhaitables, dans une grande salle du centre de Pays Basque, les journalistes invités ne se sont pas déplacés. Si les mêmes trente personnes avaient mis un gilet jaune, cassé un distributeur de banque et scandé « Macron démission », les caméras et les micros seraient accourus.

 

            Ceci est une donnée qu’on ne peut pas effacer. Inutile de se lamenter. Elle ne disparaîtra pas. Elle signifie seulement qu’il faut des efforts incessants, des initiatives répétées,  pour que les réformistes républicains se fassent entendre. Il leur faut dix fois plus d’effort, efforts intellectuels, efforts de communication, efforts d’explication, qu’un groupe de casseurs orangés. Ces efforts, ces réflexions, sont vitaux, car elles visent d’abord à dissiper le soutien gazeux dont disposent des émeutiers.

 

            L’étape actuelle est pleine de dangers. Rappelons-nous. Au lendemain de la Première guerre mondiale, les années de crise eurent des issues diverses. La Révolution d’octobre en Russie, puis dans les pays capitalistes développés, le New Deal aux Etats-Unis, le Front populaire en France, l’état providence au Royaume-Uni et le fascisme en Italie et en Allemagne. Les différences entre ces diverses issues sont de nature politique. Les peuples sont intervenus dans un sens ou l’autre, pour renforcer telle ou telle option. Aujourd’hui, le choix nous appartient. Entre une issue genre Brexit, ou Italie, ou Orban, ou Bolsonaro, ou Pologne. Ou un New Deal, un Etat providence à la française. Telle est l’ombre portée sous laquelle se mène le grande débat.

                       

 

           

mardi 15 janvier 2019

contribution au grand débat




L’avantage de ce grand débat : il donne la parole à d’autres personnes que les gilets jaunes. Depuis deux mois : il y a les gilets jaunes et ceux qui les comprennent, qui les soutiennent. Et ce qui ressort de l’avant-débat : c’est que tout va mal.



Alors oui, les choses vont mal pour 20 % de la population, très mal pour dix pour cent et cinq pour cent sont à la dérive. Ça  veut dire que pour l’énorme majorité de la population, les choses ne vont pas si mal. Plus d’éducation, plus de soins, plus de loisir, plus de cultures. Et c’est parce que tout ne va pas à vau l’eau, que notre société est vivante. Qu’elle affronte de manière vive les injustices, les inégalités, les violences. C’est parce que notre système d’éducation est l’un des plus accueillants que l’on supporte mal les relégations. C’est parce que notre système de santé est l’un des moins inégalitaires que l’on supporte mal les difficultés d’accueil. Et la France est l’un des pays où la redistribution est la plus importante.



Nous avons la chance de vivre dans un environnement qui considère de manière majoritaire qu’une société se juge à la manière dont elle traite les  plus maltraités. Les minorités, les migrants, les galériens de la vie. Cette société, cet environnement, cette démocratie, méritent d’être défendus.



A tous ceux, séparatistes pour qui rien ne va tant que le Pays Basque reste dans la République, Insoumis qui ne supportent pas qu’un logement social ou une école démente leur catastrophisme,  nationalistes  qui ne sont à l’aise que dans la haine, une partie des gilets jaunes pour qui la révolte est une solution, je souhaite qu’ils ne réussissent pas à à saper le moral, des élus, des associations, des ONG, des bénévoles, des enseignants, des chercheurs, des travailleurs sociaux, des médecins, des animateurs, des syndicats et des entrepreneurs, qui passent leur temps, leur énergie, leur intelligence pour que tous les hommes et les femmes restent debout et marchent.



D’autres diront leurs urgences. Que ce débat, que ces revendications, n’abîment pas ce qui marche et qui est vital. L’Europe nous protège. On s’en rend mieux compte en observant ceux qui s’en éloignent. L’état providence nous protège et il doit mieux protéger les habitants qui vivent dans l’urgence.



La démocratie nous protège. Dans le cahier de doléances, je m’adresse à ceux qui oublient que les libertés sont le bien le plus précieux de ceux qui n’ont guère d’autres protections. Arrêtez les atteintes à la République, les attaques des élus, les insultes aux journalistes, les menaces. Vous abimez notre société, vous risquez de la transformer en sommes d’égoïsmes où les privilèges financiers, culturels, ou la force brutale, auront remplacé une société de droit.



D’une manière plus générale, je demande que soit tissé en permanence le lien politique et moral entre les revendications particulières et l’intérêt général. Au sommet bien sûr, pour les plus fortunés. Mais aussi pour tous les corps intermédiaires, pour les syndicats : tissez ce lien avec le bien commun.



 Seul ce lien peut éviter les demandes les plus démagogiques les revendications les plus folles et les égoïsmes les plus désastreux.



Voici ce que j’ai envie d’écrire aujourdhui dans le cahier de doléances.


dimanche 13 janvier 2019

cent fois sur le métier


Le plus grand nombre de citoyens du Pays Basque français se désintéresse du débat sur la « sortie du conflit ». J’essaye de les persuader que ce débat est central, qu’il porte sur la démocratie. Pas toujours en vain, mais quand même, on m’écoute plus par politesse que par intérêt. Mes interventions font désormais partie du folklore politique du Pays Basque français.

            C’est un défi excitant de tenter de briser ce désintérêt. Cent fois sur le métier je remets mon ouvrage. De nouveaux arguments apparaissent avec la crise des gilets jaunes. Curieusement, bizarrement, deux mondes aussi éloignés que les Artisans de la Paix et les gilets jaunes ont négocié, le 12 janvier dernier, le territoire de leur manifestation. Tu me laisses Bayonne, je te laisse Biarritz. Jamais je n’ai entendu les conditions de cette répartition. Les Artisans de la Paix ont-ils demandé aux gilets jaunes de ne pas briser de vitrines ? De ne pas agresser de policiers ? Les gilets jaunes ont-ils demandé aux Artisans de la Paix de demander la libération du boxeur emprisonné ? Rien n’a filtré. Mais pour qu’un tel accord puisse se réaliser, il faut bien un minimum de terrain commun. Lequel ?

            C’est un accord politique. Un accord entre ceux qui acceptent plus ou moins activement de légitimer deux graves atteintes à la démocratie. Ce brouillard de sympathie autour des anciens terroristes annonce le brouillarta qui entoure les gilets jaunes. Quand une minorité veut imposer son point de vue par la terreur, en politique, cela s’appelle un putsch. Pinochet au Chili ou les FARC en Colombie ont en commun de ne pas supporter le peuple quand il ne partage pas leurs opinions. L’IRA et l’ETA n’ont pris les armes pas parce qu’ils représentaient « le peuple » mais parce que la majorité du peuple ne souhaitaient pas les suivre.

            Le deuxième principe qui est bafoué par tous ces manifestants est non moins central ; dans une démocratie, les conflits ne manquent pas, mais ils sont généralement résolus par la négociation, par des compromis. Pour les putschistes de toute nature, la résolution d’un conflit passe par l’élimination de l’adversaire. Regardez bien ceux qui sont désignés comme adversaires à éliminer par les terroristes basques comme par les gilets jaunes : les élus, les journalistes. On ne discute plus, on élimine. Symboliquement d’abord.

            Quand la terreur ou la violence armée, se répand, qu’elle obtient l’appui d’une partie de la société, la démocratie peine à s’exercer. En Irlande du Nord, au Pays Basque espagnol, tant que durait la terreur, rien n’était plus urgent que de l’arrêter. Tous les autres problèmes étaient balayés par la nécessité d’un retour à la paix. Les partis politiques se réalignent sur cette question, les syndicats, les associations, les mouvements culturels, les mouvements féministes, étaient tous traversées, et souvent paralysées, par la présence permanente de la violence armée.

            Les gilets jaunes, par leur comportement, leurs actions, leurs agressions contre l’état de droit, contre les élus, les commerces et les journalistes, agissent selon le même principe : a raison celui qui dispose des moyens de la violence et de la terreur. En mode mineur, bien évidemment, mais le principe est le même. Les incendies de résidences secondaires, les descentes sur les voies du TGV,  les vitrines des agences immobilières, sont de même nature. Ils ont raison parce qu’ils utilisent la violence.

                        Demain, quand un certain nombre de manifestants violents auront été condamnés, nous pouvons compter sur les séparatistes basques pour organiser des manifestations de soutien, des demandes conjointes de libération de rapprochement, d’amnistie. Avec le soutien actif ou résigné d’une partie des élus du territoire.

            Ce qui est en jeu c’est la défense d’une société démocratique. Chez nous. Ici et maintenant.

ecrire ou parler


Ce que je sais faire de mieux, c’est d’écrire un article. Organiser un groupe, le rendre politiquement efficace, je n’ai jamais su. J’ai essayé. J’ai participé. J’ai été exclu du PCF pour activité fractionnelle, je faisais partie d’un groupe animé par Henri Fiszbin. Je militais contre la régression identitaire du PCF. Puis j’ai été exclu du Parti socialiste parce que je dénonçais semaine après semaine la régression identitaire des élus socialistes au Pays Basque. Aujourd’hui, je milite contre la soumission des élus marcheurs au mouvement identitaire au Pays Basque. Si je suis à nouveau exclu, j’entre dans le livre Guinness des records, le seul homme qui a été exclu trois fois par trois partis politiques différents.

            Chaque fois, les raisons de mon exclusion furent littéraires. Des articles, des livres. Même mais interventions dans les réunions étaient écrites. J’étais incapable de me lever et de déclamer comme Danton « nous sommes ici par la volonté du peuple ». J’aurais dû écrire et terminer par écrit « nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes ». C’était un peu gênant. Dans les Assemblées Générales (AG) de Vincennes Paris VIII, tout le monde se levait, les mains libres, sans papier, et réclamait avec éloquence la fin de l’ancien monde. Moi, j’avais préparé mon intervention, car je connaissais par cœur les discours répétitifs, je me levais avec un papier écrit à la main ou tapé à la machine, je levais ma main libre vers le ciel et l’autre main tenait fermement mon texte. Je ne vous raconte pas ce que déclarais, vous le trouverez dans mes libres ou mes articles, car l’avantage d’écrire mes interventions était que je pouvais ensuite les recycler dans mes textes écrits, articles, recensions, chroniques, communications dans les colloques, livres.

            Quand France Bleu Pays Basque m’a proposé de débattre avec Michel Berocoirigoin, animateur des « artisans de la paix », j’ai rédigé soigneusement les arguments que vous pourrez lire dans un autre texte que je vais d’ailleurs réécrire. A la radio, ce n’est pas gênant.  Les auditeurs ne voient que votre voix. C’est ce que je répétais à ma compagne avant cet important débat, qui insistait pour que je mette une chemise bien repassée, avec une écharpe assortie. « Je suis certaine, disait-elle, que les auditeurs d’une radio voient la couleur des chemises et le camaïeu des écharpes. Un journaliste a d’ailleurs confirmé cet avis. Quand un interlocuteur arrive à France Bleue Pays Basque habillé n’importe comment, les auditeurs s’en rendent compte immédiatement. Ils arrivent donc tous habillés élégamment, les politiques en costume cravate, les gilets jaunes en gilet repassé, les insoumis en chemise blanche largement ouverte, les gilets basques en espadrille.

            Participer à un débat à la télévision, dans ces conditions, c’est un peu plus compliqué et c’est pourquoi je suis rarement invité. Dans les débats, les Talk Shows, personne n’arrive avec un papier écrit. Ils ont tous l’air d’improviser, d’être spontanés. Les journalistes et les présidents de la république ont des prompteurs. Quand j’étais invité à la télévision, rarement je vous l’ai déjà dit, à cause de ça, le journaliste me voyait arriver avec une feuille 21/27 et me disait tout de suite, s'il vous plaît, il n’est pas question de lire. Vous allez regarder la caméra, pas votre papier. J’ai parfois demandé un prompteur. En vain. Les prompteurs sont réservés aux journalistes et aux présidents de la république.

samedi 12 janvier 2019

gilets jaunes, gilets basques


Les gilets jaunes laissent la place aux gilets basques. Pendant que Vincent Bru, Michel Veunac et Jean-René Etchegaray manifesteront à Bayonne pour les terroristes de l’ETA, les gilets jaunes manifesteront à Biarritz pour le boxeur emprisonné. Si des magasins sont abimés à Biarritz, qui va protester ? Jean-René Etchegaray ? Max Brisson ?

Les gilets jaunes ont laissé la place aux gilets basques. Ils se comprennent. La calle borrokai, ils connaissent. Les maisons incendiées, ils connaissent. Le matériel urbain saccagé, ils connaissent. Donc Jean-René Etchegaray leur a proposé l’échange, amicalement. Vous laissez Bayonne tranquille, et vous allez perturber la ville voisine de Biarritz. Pas sûr que Bru et Veunac ont été consultés.

            Gilets jaunes et gilets basques savent les uns et les autres que le Pays Basque est accueillant aux incendiaires. Ils savent les uns et les autres, que s’ils sont condamnés, les élus du Pays Basque manifesteront pour leur libération, leur rapprochement, leur amnistie.

un homme courageux


Un homme courageux



Le député Modem macroniste Vincent Bru a partagé une journée avec Deborah, une gilet jaune, serveuse de restaurant. Cette personne a ensuite partagé une journée avec lui (Sud-Ouest 12 janvier 2019).

Vincent Bru a découvert que le métier de serveuse de restaurant est un métier pénible. Qu’elle parcourt huit kilomètres par jour à servir. Il va transmettre l’information à la ministre du travail.

A côté de cette découverte, la loi de la gravitation universelle Newton, le vaccin contre la rage et le mouvement de la terre autour du soleil sont dérisoires.

En effet, il m’arrive de manger au restaurant, et j’ai toujours cru que le travail des serveurs était un ballet aérien, les plats légers comme un nuage, que leurs chaussures avaient des ailes.

Merci à Vincent Bru de m’avoir décillé les yeux.

Le député a donc transmis l’information à la ministre du travail    

Vincent Bru a transmis une demande d’un coup de pouce au smic. Il n’a pas dit qu’il avait été augmenté, si Deborah l’avait mal pris. Et plus de progressivité dans l’impôt. Il n’a pas parlé de la taxe d’habitation, Deborah aurait peut-être été fâchée.

Il n’a rien dit à la serveuse Deborah des mesures gouvernementales qu’il a votées et qui sont favorables aux revenus les plus modestes. Il a juste transmis. Il n’a rien dit non plus à Deborah des violences et des insultes des gilets jaunes. Il n’a exprimé aucune solidarité avec ses collègues députés insultés et agressés.

Il visite une prison et trouve les bourreaux de l’ETA « corrects » et ne trouve rien à leur dire. Il manifeste contre les victimes de l’organisation terroriste là où elle n’a pas fait de victimes.

Vincent Bru est un podomètre, un sismographe, un thermomètre, une girouette, une feuille d’arbre, une plume au vent. Il est aussi mon député.

lundi 7 janvier 2019

Munich


L’appel à manifester « pour les prisonniers » du 12 janvier 2019 renouvelle le Montoire de l’intelligence, le Munich des esprits, la grossière soumission à l’abertzalisme. Ainsi le « processus de paix » engagé au Palais d’Aiete en 2011 a « connu deux avancées historiques » : le 8 avril 2017 (le désarmement de l’ETA) et le 4 mai 2018 (dissolution de l’ETA).

 

La décision d’ETA du 20 avril 2011 de cesser le feu n’est même pas mentionnée. Or, dans toute l’histoire des batailles entre démocratie et terreur, la victoire de la démocratie est datée du cessez-le-feu des terroristes. La démocratie l’a emporté en Irlande quand l’IRA a cessé le feu. Elle l’a emporté en Colombie quand les FARC ont cessé le feu. En cessant le feu ce jour-là, ETA a officialisé sa défaite au Pays Basque. La démocratie l’avait emporté sur le terrorisme.

 

Tout le reste n’est que récit, habillage, décor, hallucinations. Que Jean-René Etchegaray Michel Veunac, Ghys Haye, Vincent Bru, après avoir passé les années de plomb dans leurs pantoufles au coin du feu, signent un appel où le cessez-le-feu  d’ETA n’est pas « une avancée historique », est une insulte grave aux victimes, aux familles, à tous ceux qui ont vécu dans la terreur pendant une génération. Que des élus puissent sortir en famille sans gardes du corps, pour Jean-René Etchegaray Ghys Haye, Vincent Bru et Michel Veunac, ce n’est pas une avancée historique puisque dans le même temps, ils se promenaient paisiblement avec leur famille, leurs amis.

 

Il ne faut surtout pas s’énerver. Remarquer que le nombre d’élus qui ont signé cette abdication a considérablement diminué. Que des élus qui avaient participé à la comédie du désarmement ont préféré s’abstenir.

 

Il ne faut pas s’énerver. Surtout pas. Mais parfois, je vous demande pardon, excusez-moi, quand je vois les visages souriants de Vincent Bru, Jean-René Etchegaray et Michel Veunac qui manifestent à côté des assassins dans les rues de mon beau pays, alors qu’ils n’ont jamais trouvé le temps de visiter le musée de la terreur au Pays Basque espagnol, il m’arrive parfois de m’énerver. Mais il ne faut pas.

vendredi 4 janvier 2019

pessimisme révolutionnaire


Steve Pinker, Le triomphe des Lumières, les Arènes, 2018 (Entretien, Le Monde 1 janvier 2019.



Le monde se porte mieux et le pessimisme domine. Selon un récent sondage, seul 3% des Français estiment que la situation du monde s’améliore. A l’échelle de la planète, l’espérance de vie, en un siècle, est passée de 30 ans à 71 ans. Les pires maladies : malaria, pneumonie, sida sont en recul. Le taux d’extrême pauvreté a chuté de 75% au cours des trente dernières années et il n’y a plus que dix pour de la population mondiale qui est concernée.



Pourquoi le pessimisme ? Les désastres sont rapides et spectaculaires, les progrès sont lents et peu visibles. Un immeuble s’écroule, les victimes sont présentes partout (à juste titre…). Dix mille logements sociaux se construisent, ce n’est pas une nouvelle. Quel journal va titrer : 137 mille personnes ont échappé hier à l’extrême pauvreté ? Ou encore : dix personnes hier sont restés en vie parmi les leurs depuis la diminution de la vitesse sur les routes.



Comme ce sont les événements les plus spectaculaires qui dominent l’information, la société apparaît comme « un puits sans fond d’inégalité, de racisme, de terrorisme, de violence et de chômage. »



Ce pessimisme  démoralise. Si tous les efforts pour que ça aille mieux sont vains, et aboutissent chaque fois à une aggravation de la situation, à quoi bon ? Ce pessimisme stimule le radicalisme. Si tout va mal, tout va pire, il faut détruire l’existant, renverser la table et essayer quelque chose de nouveau.



J’ai passé environ la moitié de ma vie à refuser de voir ce qui allait mieux parce que si les choses allaient mieux, à quoi bon la révolution ? Et l’autre moitié à combattre le pessimisme révolutionnaire. En Irlande du Nord, les patriotes les plus durs refusaient de voir ce qui allait mieux alors que l’Irlande n’était pas réunifiée et les Britanniques n’étaient pas tous partis. Je me vois à Derry, avec un de ces patriotes, dans un quartier du Bogside composé des pires taudis de l’Europe. /Le quartier avait été rasé, des maisons propres les avaient remplacés et mon patriote répétait en boucle « rien n’a changé ».  Les taudis et les logements insalubres étaient détruits dans la Goutte d'Or et les fougueux révolutionnaires n’étaient pas plus contents. Ils disaient que les pauvres avaient été chassés et remplacés par des bobos. Ils ne voulaient pas voir la population modeste qui continuait d’habiter la Goutte d'Or.



A tous ceux, patriotes intransigeants pour qui rien ne va tant que le Pays Basque n’est pas indépendant, insoumis qui ne supportent pas qu’un logement social ou une école démente leur catastrophisme,  nationalistes  qui ne sont à l’aise que dans la fange, gilets jaunes pour qui la révolte est une solution, je souhaite pour l’année 2019 qu’ils ne réussissent pas à à saper le moral, des élus, des associations, des ONG, des bénévoles, des enseignants, des chercheurs, des travailleurs sociaux, des médecins, des animateurs, des syndicats et des entrepreneurs, qui passent leur temps, leur énergie, leur intelligence pour que tous les hommes et les femmes restent debout et marchent.



Pendant que d’autres vocifèrent et gesticulent.




jeudi 3 janvier 2019

jean lassalle la politique spectacle


Jean Lassalle ou la politique spectacle





            Un film que le député Jean Lassalle est présenté ce soir à Bayonne à l’Atalante. Un film réalisé par Pierre Carles, le fougueux pourfendeur des médias aux ordres, sauf quand ils sont contrôlés par Chavez ou Castro.



            Jean Lassalle mérite un film. C’est même dans les salles de spectacle qu’il devrait réserver sa carrière. Il ne sera pas seul. Maxime Gremetz, député communiste, dont l’inculture et la grossièreté faisaient la joie de ses ennemis et le désespoir de ses amis, avait choisi de se présenter à l’Assemblée nationale en bleu de travail. François Ruffin le concurrence sur les planches. Frank Capra avait déjà campé le personnage avec Monsieur Smith au Senat.



            La politique spectacle ne se discute pas. Le spectacle est bon ou mauvais. Mais permettez-moi d’en évoquer quelques dangers.



            La politique spectacle s’enracine dans un principe. Elle vise à remplacer la réflexion, le débat, les processus électoraux, par des « coups ». Coups médiatiques, sans trop de danger. Coups  terroristes, dont le principe est le même : on n’est pas au pouvoir, mais on bouscule les lignes par des actions d’éclat. Les gilets jaunes ont vite appris. Les flammes des poubelles et des voitures valent des millions de voix aux élections. D’autres organisations ont ainsi théorisé les meurtres et les destructions.



            Allons plus loin. Les dérives les plus dangereuses ont généralement été fondées sur une politique spectacle. Voyez Mussolini et le fascisme italien. Voyez les grandes parades hitlériennes, staliniennes ou coréennes du nord, où les grands spectacles tiennent lieu de réflexion.



            Soyons raisonnable. Jean Lassalle ne s’inscrit pas dans le pire. Mais donnez-moi un exemple d’une idée, d’un raisonnement ? Je n’en vois pas. Il est en plein dans la politique spectacle. Celle qui remplace le travail, l’éducation, l’apprentissage, les programmes, les débats, les expériences, les études, par des gesticulations. Une politique méprisante pour le peuple dont ses tenants pensent qu’il est incapable de se hisser à un haut niveau de connaissance et de réflexion.