lundi 30 avril 2012

français à l'étranger


Retour de Cologne

Lucie passe six mois à Cologne dans une famille. Le père est agent d'assurance. Il a une heure de transport pour aller au travail. Train, tramway. La mère est pharmacienne. Elle travaille à mi-temps. Son lieu de travail est à dix minutes à bicyclette. Le lycée de Lucie est à un quart d'heure en pédalant. Elle est contente de son séjour, contente surtout de l'absence de pression qui est la marque de fabrique de tous les établissements scolaires. Les après-midi sont libres, pour le sport, les loisirs…

Le programme Voltaire rassemble dans ce lycée quelques élèves français et Lucie est très sévère à leur égard, sur leur comportement. Car étant français, ils sont implicitement les ambassadeurs du même pays et elle s'en trouve par conséquent comptable. S'ils se conduisent mal, elle est atteinte par la réprobation qu'ils suscitent. Tels sont les invariants de la question nationale.

mardi 24 avril 2012

Eva Joly, 5,6%, Marine Le Pen, 5,9%, Nicolas Sarkozy, 12,5%, Jean Luc Melenchon, 19%, François Hollande, 48, 9%. Tels sont les résultats du premier tour à la Goutte d'Or. Je propose un référendum qui déclarerait l'indépendance de notre quartier.

si on arrêtait de penser à la place des autres


Si on arrêtait de penser à  la place des gens?

Pour les observateurs du conflit Nord-irlandais, les belligérants se définissent comme catholiques ou comme protestants, mais en vérité, ils lancent des bombes incendiaires parce qu'ils sont chômeurs ou  mal logés. Les intéressés avaient beau dire qu'ils se définissaient par l'acceptation ou non de la transsubstantiation, on ne les croyait pas. Mais qui pouvaient prétendre parler à leur place et en leur nom? 

Quand les électeurs votent Front national, les analystes décrivent des gens modestes qui ont peur du déclassement. Les intéressés ont beau dire qu'ils votent Front national parce qu'ils pensent qu'il y a trop d'étrangers en France qui leur volent les emplois et les logements et les lits d'hôpitaux, on ne les croit pas.  Qui peut prétendre parler à leur place et en leur nom?

Quand Nicolas Sarkozy récupère les thèmes du Front national, les politologues disent qu'il s'agit de siphonner les voix de l'extrême droite nationaliste, mais qu'il ne partage pas les idées xénophobes d'une France recroquevillée. Qui peut prétendre parler à sa place et en son nom? En vérité, il pense ce qu'il dit. Il était maire de Neuilly, qui n'était pas vraiment Champigny ou le Bronx, mais il trouvait la grande ville menaçante et il est allé se réfugier au milieu de la Seine. Il pense vraiment que les étrangers sont une menace et qu'il ne faut pas construire de logements sociaux sur l'île de la Jatte. 

lundi 23 avril 2012

deuxième tour


Deuxième tour.

Le candidat de droite, ayant ouvert les égouts veut en recycler la fange. S'il est élu, nous savons sur quel socle idéologique il gouvernera. Dans le monde tel qu'il se dessine aujourd'hui, les pouvoirs se partagent entre une droite frileuse, égoïste et conservatrice, repliée sur elle-même, constructrice de murs, de barbelés, de frontières  et une gauche démoralisée. Les politiques sociales, les solidarités, sont considérées comme trop chères, inefficaces, le service public est constamment rogné, les grandes réformes sociales remises en question. Il reste alors des vagues de colère sans débouché politique. La gauche est dans la rue, la droite gouverne, divise, angoisse. 

Quelques contre exemples, Barak Obama, aux États-Unis, avec quelles difficultés… et peut-être demain, François Hollande qui pourra desserrer l'étau, redonner à  la France, à l'Europe, au monde la perspective d'un pouvoir politique ouvert à la société dans sa diversité sociale et culturelle, qui poussera les feux vers une organisation européenne et mondiale dont nous avons tous besoin. Contre une conception du monde comme lieu de tous les dangers: terrorisme, drogues, crises, il est possible d'imaginer une nouvelle étape, où les crises ne sont pas des prisons, les autres ne sont pas des ennemis, les mutations ne sont pas des menaces. Où il est possible de commencer la construction d'une Europe solidaire et d'un monde providence. 

mercredi 11 avril 2012

comparaison

Il se dit banalement que les deux principaux candidats sont plombés par leurs extrêmes: Marine Le Pen pour Nicolas Sarkozy, Jean-Luc Mélenchon pour François Hollande. La différence est pourtant si éclatante qu'on ne la voit même plus: le candidat de droite à ouvert les vannes aux idées du Front national alors que le candidat socialiste ne bouge pas d'un pouce: il s'en tiendra à son programme et rien d'autre. Marine Le Pen se plaint d'être pillée, Jean-Luc Mélenchon se plaint de ne pas l'être. Certains pourraient en tirer des conclusions sur la cohérence et la force de caractère des deux principaux candidats.

dimanche 8 avril 2012

fiction

Pour créer des personnages de fiction, il faut des compétences, une générosité, qui ne sont pas miennes. Quand j'imagine, j'imagine bien ce qu'a été la réalité, j'imagine mal ce qui ne s'est jamais passé. Je suis capable de lire le Petit chaperon rouge en mettant le ton, mais imaginer qu'une petite fille transporte la galette pour la porter à sa grand-mère en traversant une sombre forêt, et qu'ensuite un loup aux grandes dents prenne la place de sa grand-mère et que la petite fille ne la reconnaisse pas, est au dessus de mes forces. Jean Valjean qui passe toute sa vie à se sacrifier pour Cosette sans jamais éprouver de désir pour elle est inimaginable. Je ne pourrais pas l'imaginer. Pas plus tard qu'hier, dans le métro, j'étais assis auprès de ma blonde, avec ma canne. C'était l'heure de pointe. Une dame entre dans le wagon avec un enfant d'un an environ dans les bras. Tout autour, de solides garçons et de robustes jeunes filles étaient assis et regardaient la mère et l'enfant le regard vide et le cœur sec. J'ai attendu trente secondes et je me suis levé en m'appuyant avec ma canne, et j'ai laissé ma place à côté de ma blonde. Je sais bien pourquoi je l'ai fait. Le panache. Un vieux monsieur avec une canne qui laisse sa place à une ravissante mère de famille africaine qui n'arrêtait pas de me dire merci, je me rengorgeais. Je bichais. Les jeunes assis se sont rendus compte, évidemment, et ils se sont levés pour me laisser la place. Trop tard, je leur ai dit, c'était pour la dame avec son bébé qu'il fallait se lever. Ensuite la dame avec le bébé est descendu et m'a rendu ma place et j'ai dit à ma blonde: je suis Jean Valjean, sauf, que moi, je sauterais Cosette. Je lui ai dit, vous pouvez lui demander,  Si je ne l'avais pas dit, si je ne l'avais pas fait, je suis certain que j'aurais été incapable d'imaginer la scène. Conclusion: pour que j'écrive des romans, il faut que mes journées soient des scènes de romans que je peux le lendemain raconter. Si je passais seize heures par jour devant un écran pour écrire, je n'écrirais rien. L'inconvénient, c'est qu'il faut trouver le temps. Le temps de vivre le roman et le temps de l'écrire. Certains vivent leur vie comme un roman et l'écrivent la nuit. Je dors six à huit heures par nuit, c'est trop.

petite annonce

Petite annonce.

Nous habitons la Goutte d'Or qui concentre toutes les mutations du monde.  Ce quartier est un chaudron. Certains disent laboratoire ou terrain d'expérimentations, ou d'innovations. Les  habitants  récents aspirent parfois à sa transformation en résidence protégée, avec pelouse, jets d'eau et rues piétonnes. Ceux qui habitent depuis plus longtemps voudraient conserver leur environnement familier et regardent les bouleversements avec ressentiment. Puis la journée arrivent les usagers de l'espace public, les étranges étrangers qui se côtoient sans se voir, les touristes qui se demandent effarés si le chemin vers la Butte Montmartre passe par les consommateurs et dealers de drogues, les vendeurs de cigarettes les commerces à la sauvette, les prostituées.

Liée au quartier les élus, les salariés et les bénévoles d'une politique de la ville, enseignants, médecins, policiers, médiateurs, animateurs culturels.

Les lieux où se décident et se débattent le présent et l'avenir de la Goutte d'Or sont configurés par les hommes et les femmes qui travaillent et habitent ici. Dans la déferlante quotidienne, ils représentent un petit pourcentage. Mais ce sont eux qui votent et désignent leurs élus. Eux qui sont écoutés sinon entendus par les pouvoir publics, eux qui sont présents dans les conseils de quartier. La majorité des gens qui déferlent la journée et une partie de la nuit ne connaît des pouvoirs publics que son aile armée. Dans quelques cas, il y a eu dialogue. Par exemple, les prières de rue est un "problème" qui a été réglé avec des responsables religieux, qui n'habitent pas le quartier. L'accueil des usagers de drogue s'est constitué dans un dialogue entre usagers, qui n'habitent pas ici, les personnels de soin et d'accueil, qui n'habitent pas ici, et les habitants. Mais la majorité des présents n'a aucune manière d'influer sur leur mode de vie. Ils sont trop souvent considérés comme des intrus. Des illégaux, des sans-papier. Pour les habitants qui se sentent impuissants, il reste l'appel régulier aux forces de l'ordre, sans résultat probant, la déploration, les plaintes. Ou encore les solutions individuelles protection individuelle, le déni (c'est formidable, l'exotisme…), la transhumance des enfants au-delà du Bd Barbés.

Dans les grandes villes du 19ème, on a essayé de soigner le choléra par des leçons de morale, par des patrouilles sanitaires et policières. Ce qui a gagné la guerre à la maladie c'est le tout à l'égout. Dans les hôpitaux, la mortalité a chuté quand les chirurgiens se sont lavés les mains avant d'opérer. Dans nos rues, les usagers de drogue ont atteint l'âge de la retraite quand on leur a distribué des seringues. Avis à la population: cherchons solutions d'avenir pour urgences d'aujourd'hui.

jeudi 5 avril 2012

Melenchon Hollande

Mélenchon et Hollande



J'ai rencontré un électeur qui ne savait pas pour qui voter et si même il allait voter. Je lui ai dit, en fin de compte, si je dois résumer mon sentiment dans cette campagne électorale, je dirais une seule chose: j'ai l'impression depuis une dizaine d'années de vivre dans une atmosphère confinée, lourde, close, recroquevillée sur des querelles rancies, et j'aspire à ce qu'on ouvre les fenêtres. Un grand souffle d'air frais. Je ne demande pas autre chose. Qu'on respire. Il est parti en me disant qu'il partageait ce sentiment et que peut-être il irait voter le 22 avril. Voter pour celui qui va ouvrir les fenêtres. Pas un déclamateur, un ouvreur de fenêtre. Un porteur d'air frais.

J'ai écouté Mélenchon à Limoges. Sacré tribun. Il me rajeunit. Il va faire la révolution. Avec des comités du front de gauche qu'il appelle à organiser partout. C'est comme ça dit-il que la Révolution française a commencé. C'est comme ça que la Commune de Paris a commencé. Il n'a pas dit comment elle s'était terminée. Il faut rompre. Rompre avec l'Europe, rompre avec le système. Rompre comme Chavez, comme Fidel Castro, comme le Che. Il faut refaire le chemin qu'on pris nos ancêtres, des siècles de luttes pour construire une société meilleure. A long terme. Oui mais à long terme, nous serons tous morts. A court terme, je souhaite qu'on ouvre les fenêtres.