Mardi 5 janvier 2010, j'assiste à la projection d'un film de patrick Rotman "Lionel raconte Jospin". Film qui sera projeté sur France 2 courant janvier. La salle du Forum des Images des Halles est pleine à craquer. Les quelques centaines de personnes qui sont là donnent l'impression d'une vaste cousinade. La presse, bien entendu, avec les grands noms des médias, tous les responsables passés et présents du PS, sauf Ségolène Royal, mais je ne sais pas si elle avait été invitée. On se salue, on se serre la main, on se demande des nouvelles. à l'interruption de séance, le buffet est pris d'assaut. A la fin du film, je me suis retrouvé dans le métro à la station les Halles. La grande majorité des spectateurs qui prenaient le métro étaient en face, direction Porte d'Orléans, vers le Sud. Deux ou trois prenaient le métro vers Clignancourt. Le film est bien fait, Lionel Jospin est intelligent et avisé, il raconte superbement son itinéraire politique, depuis l'enfance, ses relations avec Mitterrand, avec les communistes, avec Fabius et Rocard, toujours en termes mesurés et courtois. avec courage aussi. Quand il s'est interrogé publiquement sur les relations de Mitterrand avec Bousquet. Ou critiqué la participation de Tapie au gouvernement. Tout contribue dans ce film a fixer une image d'un homme d'état hors du commun, de gauche, inventif et réaliste, honnête, prenant ses responsabilités. respectable.
Seul un point me chiffonne. Les relations de Jospin avec le trotskisme de l'OCI. Il s'en explique longuement dans son entretien avec Patrick Rotman. Regrette d'avoir menti sur ce point quand il fut interrogé par le journal Le Monde. Confirme qu'il a été en relations étroites avec le trotskisme organisé y compris quand il a accédé au poste de premier secrétaire. Dit que cette relation a été intellectuellement productive. qu'il ne regrette rien. Qu'il respectait Lambert et que Lambert le respectait. ainsi pendant ces années 1970, le PS était dirigé par un socialiste trotskiste. J'étais à l'époque militant communiste et les relations avec l'OCI étaient rugueuses, il y avait même des affrontements physiques dans certaines universités. J'étais responsable du SNESUP et les membres de l'OCI agissaient au grand jour. Ils s'opposaient vigoureusement à la ligne majoritaire du SNESUP, la combattaient par tous les moyens. Mais aucun à ma connaissance n'a essayé d'infiltrer le courant majoritaire composé d'une alliance entre communistes et socialistes et si un membre de l'OCI avait été ainsi découvert, il aurait été immédiatement exclu de notre courant. Les confirmations de Lionel sur ce point me laissent perplexes. Il dit qu'à partir du moment où il a été élu, il a agi en socialiste et pas en trotskiste. Certes. Mais moi, qui étais à l'époque membre du PCF, je sais bien que l'orientation du syndicat, les décisions stratégiques, se discutaient autant au sein du PCF qu'à l'intérieur des instances syndicales élues. Bref, j'étais dirigeant syndical actif et dévoué, mais aucune décision majeure, aucune nomination de responsable à un haut niveau, ne se décidait sans avoir l'avis et l'aval du PCF. Comment c'était à l'OCI? J'aimerais savoir.
Ce n'est pas seulement une question pour historien. S'il parle avec une certaine chaleur, en termes positifs, de ses relations étroites avec le trotskisme dont l'objectif affirmé est la révolution socialiste, le renversement du capitalisme et la lutte contre les sociaux-traîtres qui gouvernent dans l'intérêt des capitalistes, comment est-ce compatible avec la fonction de premier secrétaire du PS? deux conceptions s'affrontent: ou bien il n'y a pas d'ennemis à gauche, ou bien l'alliance avec une gauche qui refuse de prendre des responsabilités gouvernementales est impossible. L'erreur dramatique des présidentielles de 2002 est qu'on a considéré à l'époque qu'il ne pouvait pas y avoir d'ennemis à gauche. Or la gauche a fait perdre la gauche en avril 2002. Pas parce qu'elle était divisée, mais parce qu'une partie de la gauche passait son temps à critiquer le bilan du gouvernement auquel ils avaient participé, sans recevoir de réponse vigoureuse de la part du PS. Il y a sans doute un lien entre la faiblesse des réactions contre la gauche radicale et les relations longues et chaleureuses avec l'un des courants trotskistes. Oui, le socialisme démocratique a des ennemis à gauche. Si la gauche "radicale" accède au pouvoir, la démocratie s'effondre en même temps que l'économie. La terreur est le moyen privilégié de gouverner. Si la gauche réformiste accède au pouvoir, elle devient l'ennemi à abattre, comme au Chili et comme pendant la campagne des présidentielles de 2002, ou mieux valait Chirac que Jospin . Ma longue appartenance me fait conclure que le communisme n'a pas de bilan globalement positif à présenter. Quel bilan Lionel tire-t-il de son appartenance à un courant trotskiste? Je veux dire un bilan politique, pas simplement le respect et la convivialité entre Lambert et lui.
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