mardi 12 juin 2018

La Valse des Adieux


La Valse des Adieux.

A Belfast, à Bilbao, des hommes tuaient, des hommes tombaient, des immeubles brûlaient. Des avant-gardes armées prétendaient imposer leur point de vue par la terreur. Les appareils d’état et d’énormes manifestations pour la paix leur imposèrent silence.

A l’époque où la société espagnole au Pays Basque avait vraiment besoin d’artisans de la paix, Jean-René Etchegaray, Vincent Bru, Max Brisson, Michel Veunac n’écoutaient pas, n’entendaient pas, ne voyaient pas. En politique, un contraceptif s’appelle boule Quies.

Ils ont attendu sept ans, semelles de plomb et casque audio. Prudemment, ils ont débranché, ouvert les yeux. Pas un mort, pas une bombe, c’était le moment enfin tant désiré. On peut sortir ? Oui, c’est possible. Et là, courageusement, ils ont manifesté contre rien. Le stade est vide et les supporters sur les gradins applaudissent une équipe qui ne joue plus. La plaie est cicatrisée et l’on comprime le sang. Les bombes sont enterrées et l’on racle la rouille. Des milliers de personnes descendent dans la rue pour demander la fin de rien. Pour réclamer la réconciliation entre les rivaux de Painful Gulch. Ils demandent la fin d’un non conflit, un enterrement sans cadavre, un désarmement sans artilleries, un divorce sans mariage, un armistice sans guerre, des fêtes de Bayonne sans alcool.

L’ETA a annoncé sa dissolution après un vote difficile, car ses membres ont dû apprendre ce qu’est un bulletin de vote et une urne. Elle a annoncé une grande cérémonie de fermeture, d’abandon, de terminaison, de fin de course. L’ETA annonce sa mort prochaine. Comment peut-on mourir autant de fois ? Nos élus basques français sont en train de ranger leur écharpe tricolore pour assister à l’enterrement.

C’est la dernière fois, je vous le jure. C’est ma dernière tournée.  Oui, je sais, il y a longtemps que je ne chante plus, que je ne tue plus, que je n’existe plus. Mais c’est dur. Excusez-moi si à nouveau je remonte sur les planches, permettez-moi une dernière fois de remettre ma cagoule, de lever la hache et le serpent, de brandir encore une fois une torche dans les ténèbres. Je sais que j’ai annoncé plusieurs fois la fin de ma carrière. Mais chaque fois, mes amis me disent que j’ai encore un public. Que des gens manifestent pour mes amis emprisonnés. Que dans les endroits où je n’ai tué personne, des gens voudraient me voir à nouveau défiler. Que les élus du Pays Basque préparent à nouveau mon enterrement. Qu’ils voudraient faire la fête encore une fois, une dernière fois. Alors, j’ai cédé à leur pressante demande. C’est la dernière fois, je vous le jure.

Il faut soigner le faire-part. Ils tiennent conférence de presse le mardi 13 mars dans un hôtel près de l’aéroport de Biarritz. Il y aura  à cette conférence de presse demain 11.30 Txetx, les blanchisseurs, Frédérique Espagnac, Jean-René Etchegaray, Michel Veunac. Ils n’ont rien obtenu et n’obtiendront rien. Mais ce n’était pas leur objectif.

Pour le premier anniversaire de la Grande Escroquerie basque, la célébration de la fin d’une guerre qui n’existait pas, ils veulent une nouvelle cérémonie. Au mois d’avril prochain. Ils diront, sous la dictée des Corrects (c’est Vincent Bru qui a dit des prisonniers basques condamnés pour activités terroristes en bande armée qu’ils étaient « corrects » et chaque fois que je rencontre ce mot, « corrects », les souvenirs font bouillir mes veines) sous la dictée des Corrects, Otegi, Mouesca, Bake Bikea et Bagoaz (qui les appelle prisonniers politiques), ils diront que l’État français et espagnol ne font rien, qu’ils doivent rapprocher les Corrects et les prisonniers politiques de leur famille, amnistier, libérer. Puisque ce sont des prisonniers politiques corrects (l’expression est de Vincent Bru, mais quand il a rencontré des victimes au Pays Basque espagnol, il n’a pas dit que les emprisonnés étaient corrects. Devant la famille de Yoyès, la famille de Blanco, il n’a pas osé).

Pour mesurer l’escroquerie, lisez  Au revoir là-haut, de Pierre Lemaitre.  Deux rescapés de la Grande Guerre vendent des monuments aux morts, en grande demande depuis que la guerre est finie. Sur catalogue. Ils prennent des avances et filent avec la caisse. C’est simple, non ? Les blanchisseurs sont des escrocs du même type, sauf qu’ils ne font pas ça pour de l’argent. Il s’agit d’une escroquerie politique. Les blanchisseurs vendent des monuments aux morts d’une guerre qui est terminée depuis près de dix ans. Ils les appellent des monuments de la paix. Il s’agit d’une sculpture de bronze avec une hache.

Ils disent que c’est pour la fin du conflit. Ils sont les Grands Guérisseurs des Malades imaginaires. Ils sont docteur Knock et réussissent à persuader toute la ville qu’ils sont malades. Ça vous chatouille ou ça vous gratouille ?

Donc ils manifestent pour que la fin de la guerre terminée se termine plus vite. Ils disent qu’ils sont préoccupés du sort des prisonniers. Menteurs.

S’ils veulent que les prisonniers soient libérés le plus vite possible, ils doivent leur demander de regretter leurs actions terroristes, de se repentir, de s’engager à remplacer pour toujours les fusils par le bulletin de vote. Là ils les aideraient à sortir. Comme ça s’est déjà produit. Pour Aurore Martin par exemple.

Mais je vais vous confier un secret : les prisonniers ils s’en fichent. Ce qu’ils veulent, c’est vendre des monuments de la paix qui ne seront jamais construits. Ce qu’ils veulent, c’est être félicités pour avoir guéri des malades imaginaires.

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