jeudi 24 mars 2016

entrepreneurs d'ethnicité


Dans ce petit bout de territoire français se joue le destin du monde. Dans la définition d’une démocratie moderne, une nation est composée de tous les citoyens, natifs ou arrivants. S’oppose à cette conception la définition des nations du 19ème siècle, qui a dominé en Europe centrale, dans les pays baltes et slaves, dans les pays celtes et dans l’Europe du Sud. Cette conception fonde la nation sur « la terre, le sang et les morts ». (Jean-Loup Amselle). L’appartenance à la communauté remonte dans la nuit des temps, elle est attestée par le sang des martyrs, par la langue, par l’attachement à la terre. Cette thèse est une thèse raciste qui a resurgi en France au moment de l’affaire Dreyfus, sous le régime de Vichy, Elle redevient prégnante avec la définition de la citoyenneté ethnique par le Front national.

            En écho et en opposition à ces thèses racistes se créent, nous dit Jean-Loup Amselle, des « entrepreneurs d’ethnicité », qui mobilisent des identités essentialisées et contribuent ainsi à la séparation entre « autochtones » et « allochtones ». Cette mobilisation est l’écho de la droite raciste et en reproduit les principes. Pour Jean-Loup Amselle, « la montée du FN, la résurgence des identités régionales » sont les avatars de l’ethnicisation du politique. Avec les revendications basques, nous sommes en plein dans le chaudron identitaire. Alors qu’il faut lutter en permanence pour la contractualisation citoyenne de la vie politique, les revendications d’un territoire basque effacent le contrat citoyen au profit d’une appartenance qui donne des droits particuliers, déniés aux « «étrangers » et aux « touristes ». Dans les discours d’élus républicains se retrouvent les notions de « frontières sacrées », d’histoire ancestrale, d’un territoire dessiné par la langue et par le sang des martyrs. Alors, oui, il faut le dire et le répéter, dans ce petit bout de territoire français se joue le destin du monde. Alors, il faut le dire et le répéter. Il faut beaucoup de haine à l’égard des habitants du pays Basque pour les enfermer ainsi dans un statut d’indigènes, et il faut beaucoup d’amour à l’égard des habitants du pays Basque pour les considérer comme des citoyens et pas comme des autochtones.

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