vendredi 25 novembre 2016

prisonniers politiques


Lettre envoyée à la semaine du pays Basque  vendredi 18 novembre 2016 après la parution du dossier sur les prisonniers basques.

Un prisonnier politique est une personne emprisonnée pour ses opinions, pour des activités politiques. Pour avoir écrit un article, collé une affiche, manifesté sans violence. Vous pensiez qu’il n’y avait pas de prisonniers politiques en France ? Erreur.

Au pays Basque, il y a des prisonniers politiques. Plus exactement, en France, il y a des prisonniers basques qui sont des prisonniers politiques. Ces prisonniers sont-ils emprisonnés parce qu’ils ont écrit un article, collé une affiche, manifesté une opinion ? Non, ils sont emprisonnés pour avoir tué des gendarmes, ou kidnappé un patron d’entreprise, abattu un conseiller municipal, plastiqué une sous-préfecture. Ils nient ces actions et se déclarent innocents. Ils sont en prison parce qu’ils ont été condamnés pour ces actions. Injustement ? Je ne sais pas. Je sais que les actions de l’organisation à laquelle appartiennent ces prisonniers politiques ont causé près de mille morts au pays Basque et si tous les prisonniers basques sont innocents, alors il y a eu au pays Basque une épidémie de voitures piégées, de balles dans la tête, d’explosions mortelles qui s’est arrêtée quand les etarras cessé leurs actions dites politiques.

Depuis cinq ans, les responsables politiques du pays Basque espagnol ont licencié les gardes du corps. Depuis cinq ans, les etarras ont remisé leurs explosifs et leurs armes politiques dans des caves, des appartements, et quand la police trouve ces armes, ils protestent vigoureusement, avec autant de véhémence que si on leur avait confisqués des tracts ou détruit une imprimerie. Ils disent que ces explosifs étaient politiques et pas des armes de destruction des biens et des personnes. Ils continuent à tenir des conférences de presse en cagoule.

Les patriotes ont imposé leurs mots et leurs idées au pays Basque français, pourtant épargné désormais par la violence armée.  En première page de la semaine, une photo de manifestation, une grande banderole « droits de l’homme » en français, euskal presoak en basque. Prisonniers basques. Droits de l’homme se traduit Euskal presoak en basque Et derrière la banderole, des élus de la République, Colette Capdevielle, Michel Veunac aux côtés de l’ancien prisonnier politique, Gaby Mouesca, condamné à vingt de prison pour distribution de tracts sur la voie publique. Les élus de la République ne portent pas leur écharpe tricolore d’élus républicains parce que les anciens prisonniers politiques n’aiment pas les écharpes tricolores de la République et leur ont demandé poliment de ne pas porter leur écharpe d’élus de la République qui leur aurait valu cinq années plus tôt d’être considérés comme cibles légitimes par les anciens prisonniers politiques. Et tous ces gens sont côté à côte, souriant, eux qui ont accepté pendant des dizaines d’années que leurs collègues de l’autre côté de la frontière soient abattus par de futurs prisonniers politiques sans jamais manifester contre la terreur dans les rues de Bilbao, de San Sebastian ou de Vittoria. Max Brisson, élu LR, déclare que si les prisonniers basques ne sont pas traités comme des prisonniers politiques, la violence pourra revenir et ce sera la faute des gouvernements français et espagnols. Ne pas traiter la question des prisonniers, c’est laisser au pays Basque une « bombe à retardement ». C’est un argument éminemment républicain : si ne vous cédez pas à mes revendications, je tire. Ce n’est pas un chef de l’ETA qui parle. C’est Max Brisson.

Tant que ces prisonniers politiques ne sont pas libérés, « le pays Basque souffre et attend » dit l’éditorial de la semaine du pays Basque. Pourquoi oublier qu’Aurore Martin et d’autres ont été libérés parce qu’ils  regrettaient les assassinats de l’ETA, condamnaient la violence armée, qu’ils s’engageaient à ne plus recourir à la lutte armée ? Ces prisonniers, pour lesquels il a pourtant manifesté, comme Aurore Martin, ne l’intéressent plus. Max Brisson est sur la ligne la plus dure des anciens etarras.

Si tous ces élus sans écharpe veulent réellement libérer les « prisonniers politiques », qu’ils demandent à l’ETA de livrer ses armes et de se dissoudre. En Irlande du Nord, il n’y a plus d’IRA, les armes ont été détruites, il n’y a plus de prisonniers politiques.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire