mercredi 23 août 2017

guerre civile


Les sociétés dites totalitaires sont des sociétés en guerre. Dans le roman d’Orwell, 1984 se mène en permanence une guerre contre l’étranger et contre les ennemis de l’intérieur. Kim Jong-Un le dictateur de la Corée du Nord se maintient au pouvoir comme chef de guerre. Regardez-le, je ne le connais pas, mais qui imaginerait Kim Jong-Un dérouler des arguments dans une réunion électorale, affronter un adversaire dans un débat télévisé ? Si son pays n’était pas en guerre, réelle ou jouée, il ne tiendrait pas cinq minutes au pouvoir. Peut-être encore moins. À la guerre, des millions de gens sans avenir peuvent obtenir des galons, des récompenses, des voitures de fonction, des appartements confisqués. Remplacer des ingénieurs et des directeurs d’usine. Dans une société de guerre civile, un fusil remplace les diplômes, les compétences. Une lettre de dénonciation permet d’obtenir un logement, un poste. Une action d’éclat vous réserve une place au paradis.

         Le terrorisme vise à construire une société totalitaire sans passer par une révolution. Il transforme un territoire paisible en camp retranché. Les tribunaux de paix deviennent des cours martiales. Les grandes questions politiques sont guerrières : que fait-on des prisonniers arrêtés, libérés, amnistiés, glorifiés ou vilipendés ? Où voit-on se précipiter des milliers d’hommes et de femmes, derrière des élus, en un gigantesque jeu de pistes pour trouver des caches d’armes et ensuite les déterrer ? Dans des sociétés marquées par le terrorisme. Faut-il amnistier ou prolonger la détention ? Faut-il construire des monuments aux soldats tombés ou à leurs victimes ? Faut-il commémorer ou oublier ?

         Dans une société tétanisée par la peur, les gens se partagent en patriotes et en traîtres. Tout le monde a peur, d’être arrêté, d’être dénoncé, d’être abattu. Des combattants qui ont quitté le combat mercredi sont la cible de ceux qui le quitteront vendredi. Faut-il un procès ou faut-il oublier la terreur ? Longtemps après le silence des armes, les gens continuent d’avoir peur. Peur de dénoncer des héros qui se sont sacrifiés. Peur de n’avoir rien dit, d’avoir détourné les yeux. Surtout que le silence règne. Il faut déterrer les armes mais pas les charniers.

         Sous nos yeux, la vie politique se partage en deux immenses options. Entre ceux qui considèrent que les adversaires doivent être éliminés pour qu’émerge une solution, et ceux qui considèrent que les adversaires font partie de la solution. Pour les etarras et les nationalistes corses, la réponse était au bout du fusil. Au Venezuela, Chavez et son successeur Maduro ont plongé leur société dans une guerre civile larvée. Une guerre civile froide. Qui n’est pas avec nous est contre nous. Le contraire d’une société apaisée où qui n’est pas contre nous est avec nous. Voyez Mélenchon et ses mots d’ordre militaires « dégagez ! Place ! Nous ne voulons plus de vous ! ». Il entasse des dictionnaires pour construire des barricades. Tout en haut des millions de mots accumulés, il est à l’aise parce que sur une barricade, il n’y a que deux côtés. Dans une chambre qui s’étale en arc de cercle, il semble embarrassé car il devient compliqué de tracer des frontières.

La droite extrême partage la France entre des Français dignes de l’être et des Français indignes à qui il faut ôter le droit de voter. Et les nationalistes corses et basques aspirent à créer un statut de « résident », avatar des Français de souche, ceux qui s’inclinent devant les monuments aux morts des terroristes dont le sang a fertilisé des vignes amères.

Je n’arrêterai jamais de lutter pour une société démocratique. Contre Mugabe, je choisis Mandela. Contre Maduro, je choisis Luisa Ortega. Gorbatchev a cru pouvoir réformer la société russe comme si c’était une société civile.  Hélas, elle était encore en guerre et c’est un ancien du KGB qui est au pouvoir. Jamais les criminels n’ont été jugés. Contre les terroristes ou contre les demi-soldes du terrorisme, tous les jours, partout, il faut choisir.

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