mercredi 29 août 2012

il n'y a pas de flics


Il n’y a pas de flics. Cette guerre civile est justifiée jour après jour par les mots qui commandent et les comportements qui obéissent. On ne dit pas : il est dangereux de rouler vite, on dit : Tu peux y aller, il n’y a pas de flics. On ne dit pas, il est dangereux de rouler avec de l’alcool dans le sang. On dit : on peut y aller, il n’y a pas de flics. Quand la qualité de l’air requiert un ralentissement général, on ne dit pas : il est dangereux pour la santé de tous et particulièrement de mon grand-père et de mon petit-fils et de ma tante asthmatique de rouler vite, on dit : on peut y aller, il n’y a pas de flics. Quand il n’y a pas de flics, on peut asphyxier bébé, étouffer grand-père, euthanasier la tante. Puisqu’il n’y a pas de flics.

Parfois, les radars remplacent les flics et les mots changent. On peut y aller, il n’y a pas de radars. Parfois, des conducteurs autour de moi grognent parce qu’ils ont perdu des points de leur permis. Je leur demande pourquoi. Ils disent en général parce qu’ils ont dépassé la vitesse prescrite. Je leur demande : et maintenant vous respectez les limitations de vitesse ? Ben, oui, disent-ils, parce que si je perds encore des points, je risque de perdre mon permis de conduire ou d’être obligé de perdre une journée dans un stage de remise à niveau où on me montrera des photos d’accidentés, horribles, en couleur, avec du sang très rouge et des blessures ouvertes, je vous jure que ça coupe l’appétit et si je manifeste de l’intérêt pour ce diaporama routier, on me rendra des points. Tout ça pour dix kilomètres en plus par heure, soit un kilomètre en trop pour cinq minutes, que dalle. Il n’y avait personne sur la route, il était trois heures du matin, sur une route de campagne. Mais savez-vous, lui dis-je, que la majorité des accidents mortels se produisent à trois heures du matin sur les routes de campagne ? Il me regarde avec haine. Mais puisque je vous dis qu’il n’y avait pas de flics, pas de radar, juste un groupe de jeunes éméchés qui rentraient chez eux à pied, en chantant, je ne les ai vus qu’au dernier moment et maintenant, ça fait des belles photos pour les stages de remise à niveau et il n’y avait ni flics ni radar, ils n’ont qu’à installer des flics et des radars, ces jeunes-là seraient encore vivants. 

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