jeudi 21 mars 2019

discussion avec un sympathisant des gilets jaunes


Remi Hess J'ai un parcours proche du tien, sauf qu'adhérent à une autre syndicat que le tien, lorsque j'étais professeur certifié, je n'ai jamais eu conscience d'être mal payé. Ayant travaillé en usine pour payer mes études, j'avais l'impression d'être très, très riche, quand j'ai reçu mon premier salaire de professeur certifié ! Aujourd'hui, en tant que retraité de l'université ayant travaillé 50 ans, (de 17 à 67 ans), j'ai une retraite qui m'apparait invraisemblable... Ma pension aujourd'hui dépasse le dernier salaire de ma fin de carrière ! C'est pour cela que je me sens solidaire des personnes qui m'entourent à la campagne et qui n'ont même pas les moyens d'avoir une voiture, qui ne peuvent pas voir leur enfants établis à quinze kms, parce qu'eux-mêmes n'ont pas de voiture... Ma vie quotidienne est une actualisation permanente de la dialectique "centre et périphérie" que j'ai décrite dans mon livre de 1978 sur ce thème et qui s'actualise dans le mouvement des gilets jaunes ! A 7 h 30, j'ai pris le café hier avec un femme retraitée depuis deux ans et qui me dit : "Je suis déprimée. Je ne peux pas quitter Dormans... Je ne peux rien faire ! Je cherche des ménages..."... Moi, on vient de me proposer de prendre la présidence du Collège coopératif de Paris ! Je suis des cours de langue à l'université de Reims. Je danse le tango ici et là. Je fais mon jardin... J'ai à écrire dix articles ou livres qui m'ont été commandés... Cette femme est enfermée dans le "rien à faire", ; moi, je décide le matin si je m'investis dans tel moment ou dans tel autre ! Un prochain président devra mettre l'éducation comme projet de société, non pour former de acteurs au système de production, mais pour aider chaque citoyen à se former, à se donner une forme, à se créer des moments qui donnent sens à sa vie ! L'éducation tout au long de la vie était écrite dans le programme du candidat Macron : où est-elle ? Sur les rond-points, davantage que dans le grand débat probablement. Malheureusement, à Dormans, nous n'avons pas de rond-point ! Cette femme que j'ai rencontrée hier n'a même pas cela pour donner sens à sa vie !

 

J’avoue ne pas bien comprendre. Au lieu de gémir avec ceux qui ont de réelles difficultés, tu ne peux pas élaborer certaines solutions ? La personne qui ne peut pas aller voir ses enfants qui vivent à quinze kilomètres, tu pourrais lui proposer de la transporter une ou deux fois par mois, par exemple. La femme qui cherche des ménages, propose lui une ou deux heures de ménage par semaine puisque ta retraite te le permet. La multiplication de gestes solidaires ne révolutionne pas la société, mais elle la transforme. Tu veux d’autres exemples ? À la Goutte d'Or, les familles voyaient les enfants mourir de consommations de drogues frelatées. Puis, elles ont entrepris des démarches pour installer EGO, (espoir Goutte d’Or), une démarche de diminution des risques, qui a réduit les morts, a accompagné les vivants vers des centres de traitement. Financés par le système capitaliste. Pendant que dans les pays du socialisme réel, on emprisonnait les consommateurs de drogue. Pendant que les révolutionnaires manifestaient contre l’embourgeoisement de la Goutte d'Or. Ils criaient que nous voulions simplement remettre les toxicomanes sur le marché du travail.

L’éducation comme projet de société ? C’était Vincennes. Avec ces milliers de salariés qui voulaient changer de vie, accéder à d’autres métiers, à d’autres activités. En entretenant une agitation permanente, en faisant grève matin midi et soir (tout en étant payés, bien entendu), les extrêmes de gauche ont fini par chasser cette population. Pour tous ces gens, Vincennes était porteur d’espoir. Créatrice de nouveaux projets de vie. Des chauffeurs de poids lourd se sont retrouvés agrégés d’histoire. Des exclus de toutes les filières ont soutenu une thèse d’état. Mais comme tu dis, il ne fallait pas former des « acteurs au système de production ». Sauf que toi et moi, on était déjà des acteurs au système de production. Pour nous ça allait. Pas pour les autres.

Les extrêmes de gauche, bolchevick, castristes, chavistes, ont saccagé les espoirs et les rêves. Ils ont aussi saccagé les solutions modestes qui aident les gens à mieux vivre. Il serait temps qu’ils fassent le bilan.

 

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