mercredi 17 avril 2013

bonheur privé, malheur public


            Les enquêtes d’opinion nous le répètent : les Français se déclarent majoritairement heureux dans la sphère privée, ils sont satisfaits de leur vie familiale ou individuelle, mais sont malheureux dans la sphère publique. (Yann Algan, libération, 2 avril 2013. Parmi les raisons de l’insatisfaction, les inégalités. La France a l’un des niveaux d’inégalité les plus bas en Europe. Mais c’est en France que les inégalités sont perçues comme beaucoup plus injustes que dans les autres pays.  Or, ce sentiment est parfaitement justifié. La société française est très hiérarchisée et si le malaise à l’école notamment est si fort, c’est que la France est le pays d’Europe où le déterminisme social et économique explique le plus les réussites scolaires. Surmonter ces blocages aurait donc des effets sur le bien-être général.

            Ruwen Ogier (Libération, 2 avril 2013) ne regrette pas cette insatisfaction : si les Français sont moins heureux que les autres peuples européens c’est qu’ils accordent moins d’importance au bonheur qu’à la liberté, la justice sociale, la solidarité. Même si cela les rend plus malheureux. Et il cite John Stuart Mill : "mieux vaut être un Socrate malheureux qu’un imbécile heureux ".

            Je ne suis pas certain qu’on puisse choisir. Mais mon expérience de militant le confirme. Il y a des formes d’engagement dans la vie publique qui visent à rendre les gens heureux : les cours de yoga, les religions pentecotistes, la relaxation, les régimes bio, les rassemblements festifs, la distribution de drogues légales ou illégales. Ne les méprisons pas. Ils sont à la fois agréables et nécessaires. L’engagement politique est d’une autre nature : il vise à créer du mécontentement pour changer, réformer, faire bouger les lignes. Il vise à transformer des imbéciles heureux en Socrates malheureux. Pas étonnant que le militant politique ne soit pas toujours bien accueilli. 




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