Ecole
Il ne
serait pas inutile d’analyser les convulsions scolaires comme un moyen par
lequel se manifestent les immenses tensions dues aux inégalités du système. Le
système scolaire français est caractérisé par une coupure profonde entre les
filières d’excellence et le reste. « le reste » est vécu comme un
échec. Il en résulte une course effrénée à l’excellence, une course sans fin.
On quitte la Goutte d'Or pour traverser le boulevard, on quitte le public pour
le privé et dans les maternelles les enfants doivent apprendre le chinois à quatre
ans et la géométrie dans l’espace à six.
Les
enseignants les mieux payés sont les professeurs des classes préparatoires. Et
voyez Alain Finkelkraut, qui enseigne à Polytechnique. Son école s’est battue
contre l’entrée des femmes, contre l’entrée des boursiers, mais il donne des
leçons au monde entier sur la valeur du savoir et de la transmission des
connaissances.
Cette
fissure court tout au long du système. Toutes les matières peuvent devenir
instrument de sélection : la dictée, l’orthographe, le latin, les maths.
Toutes les pédagogies peuvent servir à renforcer les inégalités. L’échec se
réalise très tôt et le rattrapage est difficile ou impossible. Il existe des
« écoles de la deuxième chance », comme si tout l’enseignement ne
devrait pas être une seconde chance offerte en permanence à tous.
Si tout
est bon pour sélectionner, tout est bon aussi pour exprimer frustration et
colère et les tensions qui agitent les sociétés scolaires ne sont surprenantes
que si l’on n’intègre pas ce facteur. Tout le monde veut le bien des enfants,
parents, enseignants et les élèves eux-mêmes et pourtant ils s’étripent sur les
notations, les rythmes scolaires. Sans doute parce qu’on parle d’autre chose.
Les
réformes dans ce domaine sont difficiles. Ceux qui sont du bon côté
s’accrochent, ceux qui n’y sont pas veulent y entrer. Dans ces conditions,
améliorer les maternelles, les primaires, le collège, est tout à fait
nécessaire, mais si notre système d’enseignement continue de ressembler à un
entonnoir renversé, les conséquences pourront être une sélection ressentie plus
cruellement encore. Il faut démocratiser par le haut, desserrer l’étau, ouvrir
les fenêtres, créer des aspirations et des respirations nouvelles. Les projets
de rassembler patiemment prépas et filières universitaires vont dans le bon
sens.
Et
donner l’exemple. Que le PS insère de nouvelles couches sociales parmi nos élus
et nos responsables. Qu’il organise des instituts de formation et de promotion
de nouveaux cadres. Montrer l’exemple, c’est renoncer au cumul des mandats qui
bloque la machine. Examiner la composition sociale des élus, des cabinets
ministériels et se dire que limiter le recrutement à des anciens de l’ENA, de
la presse, du marketing, de l’inspection des finances, c’est une vraie question
politique.
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