lundi 26 août 2019

impérialisme compassionnel


Nadine Machikou Ndzesop, « La compassion a appauvri l’Afrique ». le monde 17 août 2019.



Il existe  à l’égard de l’Afrique un « impérialisme compassionnel ». Trois moments de cet impérialisme : la colonisation, l’appui au développement et l’ingérence humanitaire. La compassion est un dispositif de pouvoir. Colonisation : Kipling « la fardeau de l’homme blanc : était de sauver le corps et l’esprit noirs. De les civiliser, de les nourrir, de les soigner. L’Afrique s ‘est trouvée enfermée dans un rôle d’éternelle victime. Elle n’existe plus que dans ce regard compatissant. Certains Africains acceptent d’entrer dans cette culture victimaire et l’utilisent par exemple pour expliquer ils n’ont pas de démocratie forte. Par l’humiliation qu’elle suscite chez celui la reçoit, la compassion a appauvri l’Afrique. Leur seule identité est la souffrance. « Or il n’est pas possible de se construire dans la passivité. Il faut opter pour une théorie de l’action. »



Il faut refuser toute compassion impérialiste. Travailler sur la souffrance de nos proches. Nous sommes moins émus par ce qu’il se passe chez nous que par les catastrophes de l’Occident. Des chefs d’état africains sont venus défiler à Paris contre le terrorisme mais que font-ils dans leur pays contre ce fléau ?



Ainsi parle Nadine Machikou Ndzesop.



Cette notion « d’impérialisme compassionnel » peut être élargie. Il a maintenu l’Irlande dans le sous-développement économique, sociétale et  culturel jusqu’au vingtième siècle. Jusqu’aux années 1960 où une conception appelée « révisionniste » de leur histoire a fait réfléchir. Le sous-développement était –il uniquement dû à l’impérialisme britannique ou aussi à la passivité irlandaise ?  Que les Irlandais qui s’enrichissaient allaient investir leur argent à l’étranger, était-ce l’impérialisme ? L’adhésion sans critique à une religion catholique qui redoutait par-dessus tout la modernisation des mœurs et de l’économie, était-ce le résultat de l’impérialisme britannique ?



D’autres exemples d’ « impérialisme compassionnel ». Le terrorisme. Quand il sévit chez nous, en France, dans une société démocratique développée, il provoque des condamnations unanimes. Toutes les forces politiques, tous les intellectuels, les églises, les associations, tous se retrouvent derrière la condamnation. Quand le terrorisme tue en Irlande, en Corse, au Pays Basque, on lui trouve des justifications, on se contorsionne, on manifeste avec les terroristes, on parle de l’impérialisme espagnol et français. C’est le même impérialisme compassionnel, un avatar de mépris colonialiste. Notre société civilisée ne mérite pas le terrorisme. D’autres sociétés sont peut-être moins développée, sont peut-être un petit peu Africaine, sous–développée, et le terrorisme est la marque d’un sous-développement de la démocratie. Ce sont de grands enfants qui jouent avec des allumettes.



D’autres exemples : la langue. La langue basque a été réprimée par l’impérialisme espagnol et l’impérialisme français. L’identité de la langue basque est l’oppression. Pas la culture, l’oppression. Et les élus sont tous saisis par le même « impérialisme compassionnel », il faut l’aider par tous les moyens. Mais l’apprendre, ça c’est une autre histoire. C’est trop difficile trop long, alors que verser des larmes humanitaires à l’égard de la langue basque est le raccourci le plus commode pour montrer leur générosité.


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