Je fus, je suis favorable au G7. Je reste
favorable au G7. Mais après le temps de la raison, est venue la dure réalité. Est
venu le temps où protégé par une canne et des cheveux blancs, je me suis dirigé
vers la zone interdite, d’abord la rue Lousteau, puis à gauche vers l’océan,
puis à droite le long du Radisson et là vint l’heure de vérité. Deux camions de
CRS en quinconce, sur les trottoirs, des gendarmes. Avec ma canne et mes
cheveux blancs, je me suis avancé lentement et un gendarme m’a demandé mon pass. Je lui ai montré mes cheveux blancs, ma canne
et une carte d’identité toute neuve. Le gendarme m’a dit pass. J’ai dit baguette, journaux, café, Victor Hugo, il m’a dit pass.
Le gendarme dit un pass. Un autre dit laissez-passer, un autre un badge. Dites pass et tous les mots associés. Je dis pass et j’associe. Pass, c’était le papier dont avaient besoin les habitants des townships en Afrique du Sud pour
pénétrer dans les quartiers blancs, quand ils étaient femmes de ménage ou
jardiniers, pour aller travailler, il leur fallait un pass. D’autres mots se pressent. En Union soviétique, pour pénétrer
dans la capitale, il fallait un permis. ¨Pas de permis, pas de d’entrée. Dans
les villes de l’après-guerre en France, certains quartiers étaient déclarés off limits, nous lycéens on se poussait
du coude, parce qu’on savait que c’étaient des quartiers à filles, des
quartiers de prostitution. Ensuite, pendant les quatre jours du G7, on se met à
dire, tout naturellement, zone libre, zone occupée. J’habite en zone libre, je
n’ai pas besoin de pass pour me
promener en zone libre, mais pour pénétrer en zone occupée, il me faut un pass. Un ausweiss.
Quand la capitale reçoit des chefs d’état, les
Parisiens n’ont pas l’impression de vivre dans un pays en guerre, avec une zone
libre et une zone occupée. A Biarritz, petite ville balnéaire de 25 000 habitants,
on parle de bunkers, de zones rouges, de pass.
Est-ce la taille de la ville ? Normalement, quand on reçoit des hôtes de
marque, c’est une fête. Musique, flonflons, tapis rouge, uniformes de parade. Pourquoi
quatre jours de guerre pour ce G7 ? à cause des black blocs ?
Je suis pour un G7 jour de fête, organisé
par Jacques Tati ou Jean-Paul Gaultier. Sans pass, sans ausweiss, sans
zone rouge. Vous pensez que c’est impossible ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire