Je me réveille
un matin dans un quartier classé sécurité prioritaire. Pas de voitures qui
brûlent, pas de règlements de compte, pas de batailles rangées, seulement des
vendeurs à la sauvette qui bloquent l’accès des bouches de métro et du marché
Dejean, du deal, de la prostitution. Dans la pratique, des interventions plus
régulières des forces de police dégagent les accès au métro. Je ne me plains
pas de pouvoir circuler plus librement. Fallait-il une étiquette QPS pour obtenir
deux voitures de police ?
Deux grandes questions
dans la Goutte d'Or : éviter l’enfermement et dégager l’avenir des plus
démunis. Donner des raisons aux couches moyennes diplômées de s’installer et de
rester. Le classement du quartier en QPS est de ce point de vue une catastrophe.
Il enferme davantage les habitants sans avenir, il fait davantage fuir les
habitants qui maîtrisent le leur. Il y a de quoi être en colère. Le travail
patient des élus, des associations, des professionnels de la santé, de l’éducation,
de la prévention, tous ceux qui ont maintenu le quartier debout, ont agi pour
qu’il ne soit pas un ghetto, détruit les taudis et reconstruit des logements
sociaux, qui ont bâti des bibliothèques, des centres de musique, une rue de la
mode, un institut des cultures de l’Islam, reconstruit le Louxor, ceux qui accueillent
et soignent les usagers de drogue, tous ceux qui maintiennent les extrêmes à la
marge, qui mettent à jour des priorités autres que la sécurité, tout leur
travail est recouvert d’une sombre capuche sécuritaire.
Si l’on
cherche des urgences, j’en vois quelques-unes : une réflexion active sur
la ghettoïsation de l’enseignement. La reconstruction de l’ancien magasin Vano
à Barbès. Une ouverture au métro Château Rouge toujours au bord de l’asphyxie,
la réouverture de la bibliothèque de la Goutte d'Or fermée depuis près de deux
ans. Des lieux de consommation de drogue à moindre risque.
La sécurité, c’est
ce qui reste quand on a tout oublié.
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