Le film de Marcel Trillat et de Maurice Failevic (Atlandide) sur l'effondrement du communisme, diffusé sur France 2 est une imposture. Juste une remarque préliminaire pour expliquer ce mot: tous les interviewés sauf deux ont été membres du PCF et ont été exclus ou l'ont quitté. Le film ne dit jamais qu'ils ne sont plus membres du PCF.
On peut passer sur les distorsions familières. Le pacte germano-soviétique est survolé légèrement, la livraison par Staline à Hitler d'antifascistes allemands n'est pas évoqué, la résistance d'avant 1941 est attribuée au parti communiste alors que Jacques Duclos demandait la permission de faire reparaître l'Humanité, etc.
Les relations avec l'Union soviétique: Léo Figuères était à Moscou pendant les procès et les purges. Dans une école d'un an. Il constate qu'à mesure que l'année s'écoule, certains de ses profs disparaissent. Il se demande pourquoi. "nous n'étions pas très à l'aise". En 1965, Kanapa, journaliste à Moscou, envoie une lettre à Waldeck Rochet sur l'état de l'URSS, les arrestations, etc. et WR le croit. C'est incroyable. Il le croit. D'un seul coup, en 1965, on découvre le goulag, et on le croit.
La chute du mur: depuis que l'URSS est tombé, les syndicats, les mouvements populaires, les revendications sont affaiblis. Parce que les pays capitalistes dans la concurrence avec un autre régime, avaient tendance à accepter les réformes pour que leurs peuples ne virent pas vers le communisme. Il fallait que vingt millions de personnes meurent de faim de fatigue et de froid pour obtenir une cinquième semaine de congés payés. Maintenant que ces peuples sont libres, c'est plus difficile. Le rapport Kroutchev a fait beaucoup souffrir les communistes, disent les entretiens. Il a surtout signalé que beaucoup de soviétiques ont beaucoup souffert sous Staline.
Le meilleur, c'est Henri Malberg, qui fait la liste des crimes du capitalisme "dont on ne parle plus": les massacres des peuples dans les conquêtes coloniales, la guerre du Vietnam, etc. Il oublie un détail. Contre la guerre en Algérie, j'ai manifesté, contre la guerre au Vietnam, j'ai manifesté. Contre le goulag, contre les procès, contre les atteintes aux libertés dans les pays soviétiques, je n'ai pas manifesté. La différence, mon cher Henri, est que le goulag et les arrestations d'opposants, d'intellectuels, d'ouvriers, de juifs et d'ukrainiens, tous ça se faisait en ton nom et au mien, au nom de mes principes, et ton parti trouvait le bien globalement positif. En ton nom, et plus au mien, à l'époque, j'étais déjà loin. Et aujourd'hui, tu continues à faire semblant de ne pas savoir que tu étais complice de Pol Pot. Tu connais Pol Pot? Et la Révolution culturelle, tu as oublié? Au nom des principes communistes. Les communistes français étaient un peu contre la révolution culturelle chinoise parce que les soviétiques étaient contre les dirigeants chinois. Mais si les soviétiques avaient été pour, les communistes français et Henri Malberg auraient accepté ou ignoré les millions de morts de la révolution culturelle chinoise et Henri Malberg les aurait oublié. Pourtant, à la différence des massacres qu'il a énumérés, ces massacres se sont accomplis en son nom et au mien.
Sinon, dans l'ensemble, on célèbre les engagements, la solidarité, la camaraderie…C'est magnifique, la camaraderie. Souvenir de camaraderie. Mais dangereux la camaraderie. La camaraderie est présente dans tous les système totalitaires. Quand on fait la guerre, quand les luttes sont des luttes à mort. La camaraderie rassemble des militants engagés totalement. S'ils posent une question, s'ils expriment une différence d'opinion, la camaraderie cesse immédiatement et on ne serre plus la main de celui qui n'est plus d'accord. Vous avez oublié?
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