Martin Parr
Martin Parr est un photographe mondialement connu et reconnu. Il a été invité à résider une semaine à la Goutte d'Or, il a photographié le quartier et ses photos sont exposées à l'Institut des Cultures de l'Islam (ICI) depuis le 5 avril jusqu'au 2 juillet. Il est resté une semaine à sillonner les rues, avec deux guides, car les gens n'aiment pas ici être photographiés, on dit tellement du mal de la Goutte d'Or. Il a même renoncé à la rue, parce qu'on a failli lui voler son appareil. Il était accompagné constamment de deux guides, on pourrait dire des gardes du corps. Naturellement, il n'a pas pu photographier les marchands à la sauvette, ni les drogués, ni les dealers, ni la médiathèque, ni le Centre Barbara, ni les sorties d'école. Il faut reconnaître malgré tout une certaine audace: l'exposition s'ouvre avec une charcuterie avec au premier plan un énorme cochon en céramique.
Le résultat, c'est à dire l'exposition, ne pouvait être que le point de rencontre de toutes ces contraintes. Un immense talent, de belles photos, qui auraient pu être prises dans n'importe quelle ville d'Afrique du Nord. On se promène dans l'exposition comme un touriste à Bab-el-Oued. Une semaine en résidence, le résultat ne pouvait être que celui-là. Un quartier exotique avec de belles images.
Le public qui visite l'exposition dont une partie vit dans le quartier ne se voit pas dans les photos. Les gens qui sont photographiés ne visitent pas l'exposition. Encore un ratage. On peut se contenter de dire les images sont belles. La réalité du quartier, la diversité de sa population, les problèmes et les solutions qui s'entrechoquent, ne pouvaient pas être saisies par l'objectif parce que l'artiste est resté une semaine dans un quartier qui prend des années pour s'approcher. Un quartier sensible et blessé, furieux et accueillant. Comment imaginer qu'il pouvait être apprivoisé avec un appareil photo et deux gardes du corps? Une belle approche du quartier est celle de Hortense Soichet, photographe, qui a pris des mois à prendre contact avec des habitants, à leur parler, à leur exposer son projet, à photographier les intérieurs et on voit avec ses photos la complexité culturelle et sociale de la Goutte d'Or. Un beau travail artistique et sociologique.
Ce que je reproche à l'exposition est son nom. Goutte d'Or. Si on avait appelé l'exposition "photos de Martin Parr", aucun problème. Il expose des œuvres. Elles sont belles. Mais Martin Parr prétend exposer mon quartier. C'est un bon photographe à qui une agence a proposé un voyage d'une semaine dans un immense territoire dont il ne parlait même pas la langue et il en a ramené un beau carnet de voyage.
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