vendredi 22 avril 2011

vélo et minorités

Quand je prends un vélo dans la ville de Biarritz, je me retrouve immédiatement dans la position d’une minorité agressée. Ce que les conducteurs me disent en permanence, le message qu’ils me passent à chaque instant que mes fesses entourent la selle, que mes pieds appuient sur les pédales, que mes mains se crispent sur le guidon, que je me construis un équilibre précaire en appuyant sur les pédales ou en mettant un pied à terre pendant que l’autre tente de démarrer, bref, que j’accomplis toutes les tâches qui sont celles d’un cycliste ordinaire, à partir de ce moment-là, on me fait comprendre à chaque instant que je ne suis pas à ma place, que je ne devrais pas être là. La voiture qui me klaxonne dans une rue trop étroite pour me doubler, la voiture qui me klaxonne pour que je me déplace pour la laisser se garer, la voiture qui me fait une queue de poisson à trente mètres de son garage, la voiture qui me refuse la priorité au rond-point, à chaque instant, on me dit que je n’ai pas ma place sur la chaussée et si j’ai le malheur de rouler sur le trottoir, les piétons me font comprendre que je n’ai pas de place sur le trottoir non plus. Il me vient alors à l’esprit que si j’étais un cycliste noir, je serais alors doublement minoré, et un femme cycliste noire, triplement, et une femme cycliste noire et voilée, je crois sincèrement qu’elle n’arriverait jamais à destination, même pas la peine d’essayer.

Pour comprendre ce qu’est la vie quotidienne d’un noir, d’un Arabe, d’une femme voilée, d’un handicapé, prenez un vélo et faites le tour de Biarritz en fin de semaine.

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