mercredi 22 avril 2020

âger de concert


Le monde fatigue et moi aussi.

L’âge fatigue. Il n’a pas besoin de maladies ou d’accidents pour fatiguer. Il lui suffit d’âger. Cette fonction de l’âge est magique. Son objectif est de fatiguer, et il n’a rien à faire ; aucun effort, aucune compétence, pour remplir sa fonction. Chacun peut en faire l’expérience. S’il réussit à interrompre quelque temps la fonction de l’âge, il sera moins fatigué.

Malheureusement, je ne connais personne qui sache où se situe l’interrupteur de l’âge. L’âge poursuit donc sa fonction sans crainte sinon sans reproche.

Revenons maintenant au réel. J’âge donc je suis. S’ajoute à cet âgage quotidien une maladie qui fatigue davantage et non seulement cette maladie fatigue, mais les soins pour la soigner, provoquent aussi une fatigue intense. Le résultat est logique. Fatigue de l’âge, plus fatigue de la maladie, plus fatigue des soins aboutissent à une immense fatigue que j’ai un peu de mal ici à décrire tant elle épuise les fonctions physiques et intellectuelles.

Or, le hasard et les circonstances se sont unis en une rencontre exceptionnelle. L’âge fatigue le monde comme il fatigue les gens. Mais depuis environs deux ou trois mois, le monde est frappé d’une maladie qui le fatigue davantage que les ravages habituels. Non seulement le monde était déjà pas mal fatigué par son âge mais il est frappé d’une maladie qui lui abime toutes ses fonctions habituelles, réduit ses fonctions familières, affaiblit ses muscles et ses neurones. Comme si ces ravages ne suffisaient pas, les soins utilisés pour tenter de réduire les dégâts de l’agâge pathologique ont des effets secondaires qui accentuent la faiblesse accidentelle. Le résultat est connu de tous : les flux nerveux, les échanges intercontinentaux, la production des produits de première nécessité, les aires de repos indispensables, les surfaces qui permettent production de légumes et reproduction des élites se réduisent et parfois sont complétement fermées. Les marchandises et l’argent ne circulent plus.  

La situation est dramatique. L’âge du monde a pris de l’avance sur l’âge des gens. Sept milliards d’êtres humaines veulent naître, apprendre, aimer, s’amuser, vivre enfin, et le monde les en empêche. Tout le monde est malheureux.

Moi seul suis en harmonie avec le monde tel qu’il est. Une grande lassitude, les réseaux embrouillés, les portes fermées, une immense tranquillité. Combien de gens sont en harmonie avec le monde tel qu’il est ? J’en fais partie. C’est peut-être cela le bonheur.

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