lundi 27 avril 2020

trois mondes


Trois mondes.



Dans le premier, les rues sont quasiment désertes, les restaurants fermés, les passants masqués, parfois, pas toujours, se disent bonjour. Des enfants roulent à bicyclette. Les vitrines des magasins sont aveugles. Le premier monde est le mien quand je vais acheter un journal ou une baguette de pain, vestiges d’un passé tout proche. Il est aussi le mien quand je regarde les débats et les informations sur ce qu’il faut faire et ne pas faire pour alléger la pression sur les hôpitaux qui sont pleins.



Dans le second monde, des reportages dans les hôpitaux et les ehpads, des discussions interminables, des spécialistes qui nous expliquent comment un nouveau monde est en train de naître et qu’il faut y réfléchir.



Dans le troisième monde, des parcs d’attraction rutilants de lumière, des appartements de vacances au bord de l’eau, des lampes tournantes et des couples heureux de vivre. Des voitures roulent le long de la mer, des manifestations contre les interdictions de manifester, des festivals de musique. Des policiers poursuivent des bandits, des cadres supérieurs courtisent des stars javellisées et des garçons apportent des boissons alcoolisés sans que personne ne leur ait rien demandé. Dans le troisième monde, des espions les poches pleines de devises hèlent un taxi qui n’attendait que ça et se roulent sur un matelas à eau avec une créature de rêve.



            Le premier monde est un peu morne, mais on y trouve un peu de vie. Des enfants qui pleurent et qui rient. Des parents qui échangent en respectant les distances. Le second tourne en rond.



            Le troisième monde toujours très actifs, toujours très applaudi est en fait le plus répétitif de tous et pourtant il réussit à nous faire oublier le premier et le second.



            Je ne sais pas bien où placer les échanges téléphoniques qui font dialoguer des parallépipèdes et des lèvres souples, les lectures toujours promises enfin réalisées ; parmi lesquelles je vous conseille Samuel Beckett et la conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole.

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