mercredi 27 mai 2020

la honte


Quand Le Pen est arrivé second aux élections présidentielles de 1995, j’étais universitaire, je me déplaçais à l’étranger et chaque fois on m’interrogeait. Comment était-ce possible ? C’était possible. J’avais honte. La France des droits de l’homme… Et puis il y eut l’Autriche, la Ligue du Nord en Italie, des néo-nazis en Allemagne. Et puis Donald Trump aux États-Unis, Bolsonaro au Brésil, Boris Johnson et le Brexit et Salvini, sans oublier Poutine et Orban. Fier de la victoire d’Emmanuel Macron, j’écoutais avec un regrettable esprit de revanche mes amis d’antan avoir honte à leur tour.

Politiquement, j’étais assez fier de raconter à ces mêmes amis l’alliance républicaine à Biarritz, une alliance entre gauche réformiste, droite républicaine, patriotes modérés. Pas beaucoup de villes où un rassemblent nécessaire, urgent, se mettait en place de cette manière. Pour des raisons qui ne sont pas politiques, cette alliance s’est disloquée et au premier tour des élections municipales se retrouve en tête une candidate extrême droite, qui parle comme Salvini, agit comme Donald Trump, regrette telle ou telle déclaration tant qu’elle n’est pas encore au pouvoir et insultera les valeurs républicaines si elle gagne les élections. Ce sera à mon tour d’avoir honte.

Dans une société démocratique, les responsables sont élus. Ni Trump, ni Bolsonaro, ni Johnson ne sont arrivés au pouvoir par un coup d’état, mais par des élections. Si demain, Maïder Arosteguy devient maire de Biarritz, ce ne sera pas un coup d’état, mais la décision des électeurs : leur vote, leur abstention, leurs paroles ou leurs silences. Si demain, Maïder Arosteguy gouverne grâce à une alliance entre J.B. Aldigé, plus celui qui n’accorde la citoyenneté qu’aux « gens d’ici », plus l’appui silencieux du RN, ce ne sera pas un coup d’état, ce sera le résultat d’élections.

Encore une fois, j’aurais honte. Les journalistes traités de flics, un terrain de sport associé à un camp de concentration, des plaisanteries homophobes.

J’aurais honte. Mais un moment de honte est vite passé. Il risque de durer six ans. Pas plus.

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