Une planète lointaine habitée par des êtres
intelligents vient de découvrir que la terre est attaquée par un coronavirus
qui met en danger sa survie. Depuis des dizaines de milliers d’années, ils nous
suivent dans un feuilleton hebdomadaire qui
a énormément de succès, depuis le néolithique jusqu’au pithécanthrope,
les guerres de religion et la grippe espagnole, Hiroshima et Nagasaki et puis
ce putain de merde de coronavirus comme si c’était la fin du monde.
Dans ce feuilleton, certains épisodes étaient
plus réjouissants. La Renaissance, la Réforme, les Lumières, la bataille d’Hernani
et la Flûte enchantée, les films de Frank Capra, Hamlet et le Misanthrope, la
pénicilline et l’état providence, les Beatles, la Pyramide du Louvre, la Joconde
et le Front populaire.
Nos amis de cette lointaine planète
observèrent un phénomène nouveau et inquiétant. Dans toutes les catastrophes
qui frappaient la planète terre, guerres et maladies, une petite musique, plus
ou moins déterminée, chantait « ça ira mieux demain ». Or, depuis l’offensive
du coronavirus, cette musique était en train de disparaître. Ils avaient l’impression
que pour l’humanité qui portait la planète terre, ça n’irait pas mieux demain. Pendant
toute son histoire, l’humanité avait été portée par l’idée que ça irait mieux
demain et que si ce refrain disparaissait, l’humanité jusque-là portée par l’espoir
de lendemains qui chantent sombrerait dans la désespérance. Son avenir même
était en jeu. Car si ça n’irait pas mieux demain, pourquoi se battre pour
demain ?
Dans cette planète lointaine, cette idée
était insupportable. Le feuilleton terre tenait leur société debout et si l’humanité
disparaissait, ils risquaient de la suivre dans la submersion. Ils se réunirent
fiévreusement et finirent par trouver une solution. Chaque habitant de la
planète lointaine enverrait un message chaque habitant de la planète terre lui
expliquant qu’il ne faut jamais baisser les bras, que rien ne vaut la vie, qu’il
ne faut jamais désespérer. Ils lui envoyèrent même un hologramme de Jésus et de
Marx qui eut quelque succès.
Les Terriens appréciaient modérément les
messages lointains. L’espoir était dans les messages, mais eux vivaient avec le
coronavirus. Ils répondirent par dizaines de millions par un message qui
disaient en substance : s’ils voulaient la poursuite du feuilleton, ils n’avaient
qu’à nous envoyer un vaccin contre le virus. Les habitants lointains se
frappèrent le front. Mais nous avons sûrement ça dans nos dossiers. Et effectivement,
ils trouvèrent dans une éprouvette une molécule tueuse de coronavirus.
Depuis, le feuilleton a repris.
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